« Le droit à la mort, l’ultime liberté ! »
Vous avez choisi de finir vos jours dans le sud ?
Non, je me partage entre Paris et Marseille qui est, pour moi, un deuxième lieu de vie. Écrivain, je ne me vois pas prendre ma retraite. Ici, j’ai présenté mes derniers livres au café-librairie Manifesten, au Cira (Centre international de recherches sur l’anarchisme) ou encore Mille Bâbords.
Si la région ne se distingue pas côté suicide, Jean Léonetti, le maire d’Antibes, est à l’origine de la loi sur la fin de vie…
C’est un os à ronger pour les partisans du droit à mourir dans la dignité mais qui ne répond absolument pas à la problématique posée. On n’est pas dans le registre du suicide assisté mais dans l’accompagnement des personnes en fin de vie. Sauf que ceux qui sont censés la mettre en œuvre sont ceux qui n’y ont absolument pas intérêt : les services de soins palliatifs. Et elle n’empêche pas les affaires comme celle de Vincent Humbert. Mieux, c’est Léonetti qui a évalué l’application de sa propre loi !
Vous parle-t-on encore de « Suicide, mode d’emploi » ?
Cela arrive parfois, des personnes qui évoquent le suicide d’un proche… Si ce n’est pas le premier livre à être censuré, il fait l’objet d’un véritable acharnement. En 1982, quand il sort, il ne contrevient à aucune loi. Alors, au début, on nous poursuit, nous, les auteurs, pour « non-assistance à personne en danger » au regard des courriers de nos lecteurs. Sans succès. Alors, en 1987, sera taillée une loi sur mesure contre la « promotion du suicide ». Mais les lois ne sont pas rétroactives. C’est donc la réédition du livre qui a été interdite. Aujourd’hui, on ne le trouve plus que sur le marché de l’occasion. Avec des exemplaires qui atteignent jusqu’à 300 euros. Alors que, sauf pour les bibliophiles, il faut savoir que les médicaments que l’on évoque dans le dixième et dernier chapitre du livre sont aujourd’hui totalement dépassés. Contrairement au Pentobarbital, qui, en atteste un reportage de la TSR qui suit du début à la fin un suicide assisté en Suisse, a tout du produit miracle ! Nous, avec les «cocktails» de médicaments que l’on indiquait, cela prenait entre six et dix heures. Avec parfois des douleurs, des vomissements. Mais cela avait au moins l’avantage d’avoir le temps, le cas échéant, de changer d’avis.
Au-delà de votre ouvrage, y a-t-il des associations qui bataillent sur ce terrain ?
Il y a l’ADMD, l’Association pour le droit à mourir dans la dignité mais qui fait surtout de l’information auprès de ses membres et promeut un lobbying auprès des politiques. Et une autre association, baptisée Ultime liberté, plus radicale. Mais la répression n’est jamais loin. L’an dernier, il y avait eu des perquisitions auprès de membres de l’ADMD suite à des commandes en ligne de médicaments.
Le regard sur le suicide a évolué ?
Nous, on a abordé la question du suicide d’un point de vue libertaire, estimant que le droit à décider de sa propre mort est l’ultime liberté. Mais on est encore loin des législations très avancées comme en Suisse ou en Belgique avec le suicide assisté. On est typiquement sur une thématique où l’opinion est majoritairement pour tandis que l’État, les institutions, les partis, les syndicats sont contre.
Même à la gauche de la gauche ?
Dans les milieux militants, on promeut difficilement ce qui peut être vu comme de la désertion.
En savoir plus : « Le droit à la mort, Suicide mode d’emploi, ses lecteurs et ses juges », 2019, éditions Imho, 320 pages, 18 euros.