Accès interdit
Chargé de la mission bidonvilles de Médecins du Monde Paca, Jean-Régis Rooijackers voit dans les entraves à la mobilité un « symbole des problèmes d’accès à la santé à Marseille » : « Pour y accéder, il faut pouvoir y aller et quand il n’y a pas de réseau, que c’est payant ou qu’on risque une amende, les personnes défavorisées ne vont pas prendre le risque de prendre les transports en commun ! »
Très présente dans le nord de la ville, nous avions abordé cette thématique dans le cadre du projet de journalisme participatif sur les problématiques de santé dans les quartiers populaires de Marseille que le Ravi a initié en septembre au centre social les Musardises, dans le 15e arrondissement. Chantal Bagur y participait. Et même si le reconfinement a mis fin plus tôt que prévu aux ateliers, cette retraitée a accepté de poursuivre l’aventure sous forme réduite, en réalisant avec nous des entretiens. Avant la mise en sommeil du projet, nous l’avions aussi interviewée. Suite à une poliomyélite, Chantal ne peut en effet se déplacer qu’appareillée et avec des béquilles. Sa maladie a entraîné d’autres problèmes : une scoliose et de l’asthme. Elle a donc un suivi médical et des soins réguliers. Ce qui devient le plus souvent un vrai chemin de croix pour s’y rendre : aucun bus ne traverse son quartier, Ruisseau-Mirabeau.
« Tous les mois ou tous les deux mois, selon mon état physique, j’ai des rendez-vous, témoigne Chantal. Malgré ma volonté, je n’ai plus de force, j’ai des difficultés à me lever, à me déplacer. Je commence alors un parcours de rééducation pendant deux mois et demi, en institution ou à domicile. En général, j’essaie de coupler mes rendez-vous pour éviter de faire trop de déplacements. Le centre médical est à Saint-Antoine (15e arrondissement) mais il faut prendre trois bus pour y aller, le 36, le 25 puis le B2. Aucun ne traverse la cité, il faut donc en sortir, marcher beaucoup, pour y accéder. Si mon rendez-vous est plus loin, en centre ville, c’est le métro et le bus. »
Et Chantal Bagur de conclure : « Je pourrais aussi prendre des ambulances, mais je n’aime pas trop le faire parce que ça coûte cher à la sécurité sociale. Je ne veux pas non plus perdre mon autonomie. Je veux montrer aux autres que je peux faire ce genre de déplacements. Il existe aussi le service mobilité réduite de la RTM, pour les personnes âgées et/ou handicapées, mais c’est payant et il faut s’y prendre très longtemps à l’avance. Et c’est dur pour moi. »