À Saint-Just, nous ne nous défendrons plus...
Attaquer signifie pour nous : faire attention, être en alerte ensemble face aux violences produites par ces mêmes politiques dont nous sommes témoins et victimes. Et cela, à court et long termes.
Attaquer cela veut dire s’interroger sur la place que nous avons prise pendant l’année, poussé.e.s par l’État à endosser la place de classes de subalternes. L’une part chaque jour brader sa force de travail auprès d’entreprises qui l’exploitent à peu de frais pour rebâtir Marseille, ville des grands travaux de bords de mer. Cette classe même qui ne voit pas ses droits à l’hébergement reconnus doit, grâce à son travail dissimulé et affranchi de droits sociaux, tenter de sous-louer à des marchands de sommeil des bouges insalubres et empunaisés. L’autre, « solidaire », travaille gratuitement et en secret afin de pallier les manques institutionnels. Peut-on crier victoire ?
Nous ne perdrons pas de vue notre lutte. L’ouverture est un outil de lutte politique pour défendre nos droits d’êtres humains et l’hébergement inconditionnel, elle est un outil pour des personnes qui se mettent à l’abri quand l’État, raciste, leur impose de vivre dehors parce qu’elles sont étrangères et considérées comme indésirables. Un an de lutte à Saint-Just a fait économiser au Conseil départemental 4 320 000 euros et à la préfecture 576 000 euros !
Un an déjà que des mineurs, des familles en demande d’asile et des militant.e.s ont ouvert les portes du squat Saint-Just. Un an que nous alertons sur le défaut de mise à l’abri et d’accès en foyer pour les mineurs et d’accès à un logement décent pour les familles dont certain.e.s des enfants sont des bébés, voire sont né.e.s au squat. Un an que des solidaires et des associations militant.e.s accompagnent au travers de démarches administratives, les mineurs, familles et enfants pour l’accès à leurs droits : la santé, la scolarité, la dignité humaine pour ne plus voir dormir des enfants dans les rues de Marseille.
Stop ! Nous ne réclamerons plus nos droits, comme on les mendierait, nous attaquerons ceux et celles qui ont des devoirs et le pouvoir politique et économique de les mettre en œuvre. Aujourd’hui ils sont muet.te.s. Aujourd’hui à travers cette tribune, nous demandons aussi au diocèse, propriétaire qui chauffe le bâtiment de Saint-Just, de mettre en œuvre ses requêtes juridiques contre les réels responsables de cette occupation : la préfecture et le Conseil départemental des Bouches-du-Rhône.
Diocèse et autres paroisses : attaquez !
Partout où des bâtiments sont occupés, attaquons en justice ceux et celles qui méprisent leurs missions, méprisent ceux et celles pour lesquel.le.s iels ont un mandat et une responsabilité professionnelle, politique, économique.
Saint-Just fête un an d’existence, un an de luttes, un an de sommeils au chaud. De nombreuses personnes sont passées par ce lieu, pour quelques nuits ou quelques mois. Grâce à la complicité sans faille de solidaires, d’une vingtaine d’associations et collectifs militants (parmi lesquels El Mamba, Emmaüs, Médecin du monde, Katilla ou Pain et Partage pour ne citer qu’eux..), comme des Marseillais.e.s, ce qui était une action coup de poing est devenu un réel lieu de vie
Le week-end du 14 et 15 décembre, le Collectif 59 Saint-Just a accueilli à Marseille un inter-squat. Ont répondu à l’appel Avignon, Lyon, Saint-Étienne et Grenoble, dont les militant.e.s qu’iels soient squatteur.se.s ou non, sont venu.e.s débattre des conditions d’accueil, d’hébergement, de travail, de soins, de traitements en France. Nous avons partagé nos outils et nos stratégies, nous avons évalué nos forces pour nous mobiliser face aux institutions, et aux pouvoirs des solidaires et des habitant.e.s dans la lutte. La richesse de nos échanges est un truc de ouf. Notre capacité à nous organiser est notre arme.
Cet inter-squat est le symbole de la créativité et l’inventivité de nos mobilisations. En 2020 un nouveau combat commence, celui de protéger les liens à l’œuvre à Saint-Just. Nous ferons en sorte que le droit à un logement décent prime sur celui à la propriété, pour les habitant.e.s de Saint-Just comme pour toutes les autres personnes concernées. Tant que cela sera nécessaire, nous continuerons à réquisitionner dans un État raciste.