Mal logés : les associations toujours en première ligne !
Depuis le début de la crise sanitaire, ils ne s’étaient revus qu’en visio. Ce mardi 23 novembre, à l’initiative de la Fondation Abbé Pierre, une vingtaine de porteurs de projets venus de la France entière sont enfin réunis pour la 9ème édition des rencontres annuelles des acteurs de terrain. « Ces journées sont importantes pour nous. Voir cette richesse de terrain, ça fait chaud au cœur. On se dit que l’on est forts et que l’on n’est pas seuls à œuvrer », sourit Iham Nassoha-Gilg, cofondatrice et administratrice de la Compagnie Mémoires Vives qui a fait le déplacement de Strasbourg. Cette année, le rendez-vous est donné à Lille, dans la grande salle mise à disposition par le Centre social du Faubourg de Béthune.
« Mal logés, acteurs de leur devenir », l’intitulé de la journée reflète à lui seul les deux rudes années qui viennent de s’écouler et celles qui se profilent. Délaissés en plein confinement par les pouvoirs publics, les habitants des quartiers populaires et les associations ont été en première ligne. « Les gens sont restés debout. Ils ont été éblouissants ! Les jeunes qui sont critiqués de toute part, ont été les premiers à apporter leur aide. Tout cela c’est de la puissance d’agir », souligne Malika Chafi, responsable du secteur Promotion des habitants de la FAP, en lien direct avec les associations.
Depuis le début du Covid, les donateurs réactifs et le mécénat d’entreprise, a permis à la Fondation de récolter environ 8 millions d’euros dont 30 % ont pu être redistribués aux quartiers populaires. Chaque année 20 millions de subventions peuvent être engagées. « Une goutte d’eau dans la mer mais qui, nous l’espérons, a pu changer le quotidien des habitants », souligne Frédérique Kaba, directrice des missions sociales. C’est grâce à la distribution de colis alimentaires et de chèques services, et au financement de micro-projets que les habitants n’ont pas sombré. « La Fap fait le travail que, dans un monde idéal, les pouvoirs publics devraient faire », insiste Erwan Godet, directeur de l’association Breizh Insertion sport à Rennes. Ali Rahni, figure du militantisme roubaisien et bénévole de la Coopérative Chibanis, lui, a une pensée pour l’Abbé Pierre « qui fait que dans les quartiers, ça ne brûle pas ».
« Les gens sont restés debout ! »
A l’ordre du jour de cette journée, l’accès aux financements privés est un thème important qui fait débat entre les associatifs. La disparition des emplois aidés et la baisse des subventions publiques, ont affaibli les petites associations de terrain. Celles qui sont ici se tournent vers la FAP, parce qu’elles savent qu’elles seront écoutées. Pour autant, la plupart ont des réticences à aller vers les entreprises privées. Sanoussi Diarra, fondateur de Rebonds ! à Toulouse, tente de rassurer les récalcitrants : « Dans les entreprises, on trouve des gens humains comme vous et moi, et avec lesquels on peut discuter, ce ne sont pas tous des magnats du Cac 40 ! » Et Hamza Aarab, président du Montpellier Méditerranée Futsal de poursuivre : « Sans les financements privés, on n’existerait plus. »
A la FAP, on n’a pas d’avis tranché sur la question. « Mais avec la RSE (La responsabilité sociétale des entreprises), des opportunités nouvelles peuvent être explorées. Bien sûr, dès lors que l’on peut s’entendre sur des intérêts communs avec les entreprises concernées », précise Malika Chafi. Beaucoup d’associations que nous soutenons fonctionnent sur le mode du bénévolat, c’est inacceptable car avec de faibles moyens, elles pallient les carences d’un service public. » Pour la FAP, il est primordial aussi que les associations se structurent afin de pérenniser leurs actions. Et pour cela la question des locaux a été posée durant cette journée. Certains n’ont pas de lieux dédiés, d’autres ont des locaux partagés qui ne permettent pas de recevoir dans un cadre confidentiel. Mohamed Mechmache, porte-parole d’AC le feu, dans le 93, rêve d’un Après-M, ancien Mac Do des quartiers Nord de Marseille repris par des militants… Quoi qu’il en soit « le travail social ne peut pas se développer « sans domicile fixe ». Il est devenu urgent qu’il existe des lieux pérennes, équipés et avec des moyens », note Malika Chafi. Et de conclure : « Sinon, comment redonner de la dignité à nos publics si nous mêmes, nous recevons dans des lieux qui ne le sont pas ? »