Quand 13 Habitat sort ses griffes de papier
Dans la nuit du 16 au 17 juillet 2021, un incendie se déclare dans le bâtiment A2 de la cité des Flamants, dans le 14e arrondissement de Marseille. Cet immeuble, théâtre de tous les trafics et d’un squat géant de logements vides, fait partie du programme de rénovation urbaine touchant cette cité débuté en 2002. Trois demandeurs d’asile trouvent la mort dans ce drame, sans compter les hospitalisations pour de graves brûlures.
Parmi les victimes collatérales, la douzaine de familles légalement installées en attente d’un relogement depuis plusieurs années pour laisser place aux travaux. Évacuées à l’hôtel ou chez des proches, beaucoup ont accepté des propositions d’appartement dans des cités qu’elles avaient jusque-là refusées . Ginette Fernandez, la dernière à avoir résisté, a failli payer le prix fort : le 14 octobre, trois jours après avoir reçu un courrier de 13 Habitat (en notre possession), son bailleur et celui du département des Bouches-du-Rhône présidé par la LR Martine Vassal (1), lui laissent 72 heures pour accepter une dernière proposition de relogement sous peine de se voir expulsée de son hôtel, le gérant de ce dernier annonçait à cette mère de famille de 53 ans que sa prise en charge avait cessé…
Menaces et manœuvres
La raison de cette menace : Ginette Fernandez aurait refusé trois propositions de relogement, l’obligation légale du bailleur. Une affirmation contestée par la mère de famille : « Je n’ai refusé qu’une proposition. Sinon, je n’ai jamais signé aucune lettre de refus à propos de ces soi-disant propositions puisque elles ne m’ont jamais été présentées. » Comme déjà raconté par le Ravi, 13 Habitat a eu tout au long de l’opération de relogement de ses locataires en vue de réaliser ces travaux une attitude plus que douteuse, leur interdisant une partie de son patrimoine, notamment le plus récent et le mieux situé.
Paniquée, Ginette Fernandez s’en remet à une élue du secteur. Elle contacte Rachida Tir, la suppléante du député LREM des quartiers nord de Marseille, Saïd Ahamada. L’ancienne présidente de l’Alliance Savinoise, personnalité respectée du quartier, accepte de l’accompagner. Son intervention a un effet immédiat : 13 Habitat envoie un de ses salariés proposer, toujours oralement, à la quinquagénaire, un relogement provisoire dans la cité des Hirondelles, située à proximité des Flamants. Mais Ginette souhaite, comme elle l’a maintes fois signifié au bailleur, quitter le quartier pour les Hauts de Sainte-Marthe, Saint-Mitre ou encore Château-Gombert, dans le 13earrondissement.
Une ultime manœuvre qui ne fait pas céder la locataire. Après une nouvelle intervention musclée de Rachida Tir – en particulier sur les réseaux sociaux –, le bailleur du « CD13 » finit par plier. Mais sans rompre. « Mme Fernandez aura un T3 situé dans une résidence neuve, Les Étoilés, explique la suppléante de Saïd Ahamada. Elle signera son bail prochainement. Mais comme la résidence ne fait pas partie du parc locatif de 13 Habitat, mais de celui de la Logirem, elle va devoir déposer un dossier auprès de ce bailleur pour être inscrite sur sa liste de locataires. En attendant, elle sera logée aux Hirondelles. Et la Préfecture s’est engagée à faire respecter ses droits. »
En attendant, aux Flamants, une autre histoire se dessine. L’institut régional des travailleurs sociaux (IRTS), installé de longue date aux Flamants, a choisi de fermer provisoirement ses portes fin octobre. L’esplanade sur laquelle il est installé, et où se trouve également la Maison de la Solidarité et le centre social, est devenu le nouveau point de vente des dealers du quartier. À parier que le bailleur ne laissera pas ce lieu emblématique de son action dans la situation explosive qui a conduit, semble-t-il, au drame de juillet dernier.
1. 13 Habitat n’a répondu ni à nos sollicitations téléphoniques ni à nos questions envoyées par mail.