Attention : enfants !
Lilou, 23 ans, étudiante
« Je n’ai pas de désir maternel et ne me suis jamais projetée dans un schéma “classique”. Plutôt nomade qu’avec des enfants ! Et le monde actuel ne donne pas envie d’en avoir. Mieux vaut être heureux sans, qu’en avoir et ne pas être bien parce que ce n’est pas ce qu’on voulait. Je culpabilise quand mes parents me disent : “On n’aura jamais de petits-enfants ?” Plus jeune, je prétendais en vouloir. A la récré, chacun imaginait le prénom de ses enfants et je faisais pareil. Aujourd’hui encore, il y a des gens qui me disent que si demain je tombais enceinte, ce ne serait pas la fin du monde. Pour moi si ! “Tu verras quand tu seras plus grande”, me dit-on. Comme si j’avais 12 ans ! Ne pas en vouloir ne veut pas dire qu’on les déteste. J’ai d’ailleurs fait de l’animation. Peut-être un jour en voudrai-je. Mais je ne veux pas être enceinte. On parle d’une expérience magnifique. Moi, j’y vois une grosse atteinte à la pudeur. Et on peut aimer un enfant sans l’avoir porté. »
Camille, 41 ans, infirmière
« Je n’ai pas d’enfant et j’en suis heureuse. Non que je ne les aime pas. A voir des enfants traverser la frontière dans le briançonnais dont je reviens, je ne peux pas dire que je n’ai pas été touchée. Comme à l’hôpital où j’en vois tous les jours. Mais j’assume de ne pas en avoir. Politiquement déjà. Car, en tant que femme, c’est la tâche que l’on t’assigne : le terme médical pour une femme qui n’a jamais accouché, c’est nullipare ! Et, dans notre système, en avoir, c’est un peu “alimenter la machine”. Et puis, personnellement, ça n’a jamais été le moment. Une fois, ça a failli avec quelqu’un avec qui je me suis vue fonder une famille. Mais ça n’a pas marché. Et aujourd’hui, je suis contente de ne pas être “freinée”. Et éduquer, transmettre, surtout dans ce monde, je ne sais pas faire. Ça ne veut pas dire que je les déteste. Je ne supporte pas non plus l’injonction à ne pas en avoir. Ma sœur en a deux que j’adore. Je l’ai même aidée à la naissance du premier. Et je suis “marraine” de cinq gosses. L’un d’eux me surnomme “tatanarchie” ! »
Sophie, 52 ans. Secrétaire
« Ne pas avoir eu d’enfant n’est pas un choix : l’opportunité ne s’est juste pas présentée. Celui avec qui j’étais, je ne l’aimais pas au point de faire un enfant : c’est un choix qui doit être réfléchi et décidé à deux. Vu le contexte, on ne fait pas un enfant comme ça. J’ai une nièce de 32 ans qui, vu le contexte économique et environnemental, ne veut pas d’enfants. Ce n’est pas égoïste. C’est aussi la liberté d’être autonome et indépendante. Sportive, cela m’a permis de faire des compétitions. Mais on est stigmatisée : “Ah la pauvre, elle est célibataire sans enfant.” On pense que tu es lesbienne, une vieille fille… Mais je le vis bien. Ce n’est pas arrivé, tant pis. J’ai deux neveux et une nièce que j’ai connus petits et un lien s’est créé : j’ai les avantages sans les inconvénients. »
Propos recueillis par S. B. et N. P.