Tomber, se relever
Peu d’auteurs parviennent à raconter, d’un seul trait, le plus intime et la marche du monde. C’est le cas de Didier Castino. Les pages poignantes d’Après le silence nous livraient le dialogue impossible d’un père, mort à l’usine, avec son plus jeune fils, tout en chroniquant le sort des ouvriers et de leurs luttes. Dans Rue-Monsieur-le-Prince, Castino, enseignant marseillais né en 66, revenait sur le meurtre par la police de Malik Oussekine en interrogeant le parcours et les renoncements d’une génération.
Son troisième roman, Quand la ville tombe, poursuit avec talent cette exploration singulière mêlant drame personnel et enjeux collectifs. Un couple amoureux, qui élève à Marseille trois enfants sans cesser de combattre les injustices, est violemment brisé : Blanche est tuée sur le coup par la chute d’un balcon. Peu de temps avant l’effondrement d’un immeuble insalubre fauchant la vie de ses locataires.
L’histoire fait bien entendu écho à la tragédie – éminemment politique – de la rue d’Aubagne. Le récit, qui perd volontiers le lecteur entre passé et futur, fiction et chronique du présent, touche juste une fois de plus. Par la force poétique et la sobriété du style, celles de mots témoignant du deuil, de l’amour et de l’ardente nécessité de se révolter pour vivre.
Quand la ville tombe, par Didier Castino, édition Les Avrils (groupe Delcourt), 256 pages, 20 euros.