Fais-le toi-même
La belle lumière du printemps inonde un triste monde. Trois petits oiseaux guillerets picorent en sifflotant la charogne de nos démocraties. Fleurissent les orchidées sur le compost de nos libertés. Bourgeonnent nos arbres millénaires, vieux sages qui semblent s’en foutre. L’Homme a la parole mais pas le choix des mots. C’est le printemps, on va voter, mais pour quel suicide ?
Comment est-ce possible que je me sente aussi déprimé à la veille d’une élection au suffrage universel, au début du printemps, dans un pays où, somme toute, je peux faire à peu près ce que je veux, penser ce que je veux ? Le fond du problème est-il que la plupart de mes concitoyens croient en des projets politiques médiocres, se trouvent près à voter pour des gens corrompus, voire pour des gens qu’ils détestent ? Le fond du problème est-il que la plupart de mes concitoyens sont des abrutis de racistes, passéistes tremblant de peur à la perspective du moindre changement ?
Une fois de plus ce climat d’élection présidentielle me rappelle à ce que je suis, moi, être politique. Je suis forcé de renouer avec mes idées et tant pis si je ne me reconnais dans aucun prétendant au trône : l’important c’est ce que je fais. Tous mes gestes sont politiques. Chaque acte posé. Et chaque acte couramment véhiculé par cette société est une arnaque : faire ses courses au supermarché, rouler au pétrole, fumer, boire, travailler trop, payer un loyer… En fait, ces actes constituent tous une forme de transgression par rapport à mon système de valeurs. Et voici que pourtant je pose presque quotidiennement chacun de ces actes comme les gens médiocres et corrompus de mon paysage politique.
Merdre je suis donc mon paysage politique !
Eh bien je vais commencer mon auto-campagne par une bonne bouffe pour me remettre de mes émotions. Qu’y a-t-il sur les étals ? Des asperges ? Qu’à cela ne tienne.