El Gofio et le chant du cygne
Quel titre mystérieux, énigmatique, intrigant… mais tellement empli de poésie !!
Lorsque le cygne commence à sentir la vie quitter son corps, il se lance dans son plus beau chant, le plus mélodieux, son œuvre ultime… Du moins c’est ce que partagent entre eux les poètes.
Si vous vous en rappelez, je vous exprimais dans ma dernière chronique le projet de voyager en Afrique avec des semences à offrir ou échanger. En novembre, j’ai réalisé mon souhait en entreprenant la traversée du Maroc, de la Mauritanie et du Sénégal, pour finir aux îles Canaries.
Un chemin initiatique proche des paysans et de la population où j’ai été touché, souvent au cœur, par d’autres formes de cultures, modes de pensées, ainsi qu’une autre approche du temps et du vivre ensemble. Je me suis senti, surtout, disponible à la vie.
Parallèlement, en France, me parvenait l’écho d’un soulèvement inhabituel.
Comme si le peuple français prenait la rue au nom des peuples du monde pour mettre un terme à la folie de nos classes dirigeantes et reprendre notre destinée collective en main.
J’ai beaucoup aimé vivre de loin l’éveil de cette partie de la population qui jusqu’à présent encaissait les coups sans rien dire puisque maintenue sous camisole médiatique.
Et alors que je vivais incroyablement fort dans un « ici maintenant » dénué des tracasseries qu’entraîne un quotidien posé comme un fardeau sur nos épaules, je regardais mes sœurs et mes frères se faire tabasser lors de manifestations pacifiques avec une violence qui, dès le début, apparaissait comme démesurée, créant du coup un élan de sympathie de près de 80 % de la population pour ce qui allait devenir le mouvement des gilets jaunes…
Je me suis plu à imaginer ces gens aux origines différentes expérimenter de nouveaux modes de fonctionnement et côtoyer d’autres possibles… Puis j’ai appris la révolte menée par les collégiens, lycéens et étudiants pour sauver la planète, mouvement international fortement réprimé lui aussi.
Mais ce qui m’a le plus marqué, c’est toute la créativité émanant de cette période, comme si l’humanité entamait son chant du cygne pour enfin devenir phénix et renaître autrement.
Un peu chenille et papillon, l’avènement du printemps après des millénaires d’hiver !
Et le gofio me direz-vous, qu’est-ce qu’il fait dans le titre de cette chronique, mon petit ?
Et bien c’est pour la recette ! Le gofio, c’est cet aliment typique des îles Canaries.
Il s’agit de céréales grillées et moulues à la pierre. C’est un aliment déjà utilisé par les guanches, autochtones des îles dont les origines seraient berbères.
Il est riche en fibres, vitamines et minéraux et il peut se consommer sous de multiples formes.
Au petit déjeuner, avec du lait végétal et du miel, c’est juste un formidable apport énergétique et une saveur, jusqu’ici, inconnue pour moi.
On peut également le faire en mode café sur le même principe.
On le trouve en sachets comme la farine, et la texture, après mélange avec un liquide, peut passer de soyeuse à sableuse.
La meilleure recette que j’ai goûtée fut réalisée par Pascale, mon hôte lors de mon séjour à la Palma, une île préservée et magnifique.
Je ne me rappelle plus le nom du plat, mais il est assez simple à préparer. Il suffit de délayer du gofio de maïs dans de l’eau chaude jusqu’à obtenir une pâte qui se tient. Vous y rajoutez du fromage de chèvre frais fumé, du poivron, un peu d’huile d’olive, du sel et du poivre. Hachez du curcuma et du gingembre et rajoutez un jus de citron vert. Faites un boudin avec la pâte et coupez-la en rondelles.
Avec un petit mesclun et du mojo verde (sauce au poivron vert, huile d’olive, citron et coriandre), c’est juste délicieux et si simple à réaliser.