Graisse matinée
Je ressens le confinement comme une sorte de méta-réalité. Comme si je conservais mes besoins et mes désirs, mais dans un présent différent. Je vois la même personne dans la glace le matin. C’est le même appart, où je passais si peu de temps, qui se retrouve soudain avec moi dedans tout le temps. Je suis là qui tangue dans une semi-létargie parallèle.
Je regarde ma vie, mes choix, mon être, mon mental, mon caractère, mon corps, tout ça figé dans un éternel dimanche.
Mes rêves du dimanche matin sont toujours particuliers. Je me réveille à l’aube, par habitude, puis je me rendors parce que c’est dimanche. Et là, de mes rêves, je peux me souvenir.
Je me lève et je pars marcher dans la ville déserte, une patrouille de flics apparaît au coin d’une rue. Le flic assis sur le siège passager m’a vu. Comme je ne suis pas en règle, j’ai bifurqué dans une ruelle et me suis mis à courir. J’entends crisser les pneus des flics. Je décide de me cacher dans l’embrasure d’une porte. La porte n’est pas fermée, je rentre en vitesse et grimpe l’escalier quatre à quatre. Au dernier étage une porte s’entrouvre, on m’invite à entrer. En bas les flics commencent à faire entendre leurs bottes sur les marches. Je refuse de rentrer pour ne pas faire prendre de risque à la famille qui vit là. La dame me tend un arc et des flèches et me montre la lucarne qui accède aux toits. Je m’y hisse discrètement, précédé de mon arc.
J’entends un murmure dans la rue, c’est un drone-flic qui inspecte l’immeuble depuis l’extérieur. Je le perce d’une flèche en plein dans sa vilaine carcasse et il s’abat sur la voiture de police garée en dessous. Je condamne la lucarne avec du fil de fer qui traînait là. Puis je commence à courir sur les toits. Je suis essoufflé et trempé de sueur. Je trébuche sur les tuiles. Et là, sur une cheminée, un gros chat m’appelle : « Papa ! »
– Papa !
– Papa, réveille-toi ! Tu as dit qu’on faisait des nems aujourd’hui.
– J’ai dit ça moi ?…
Bon OK