Au pays des vins qui pétillent...
Petite anecdote : en soutien à un petit lieu, des vignerons de la région livrent quelques caisses de leur dernière production. Mais, le vin, avant de le servir, il convient de le goûter. Première bouteille : ça fait un drôle de bruit, ça pétille et, d’un point de vue gustatif, on oscille entre poire et pomme. Deuxième : idem. Troisième, itou. Peu après, coup de fil des vignerons : « Désolé, on s’est planté. Ce qu’on vous a livré, c’est pas un blanc, c’est un poiré qu’on a loupé ! »
Dans le monde du vin nature, les expérimentations ne sont pas toujours heureuses : le métier qui rentre ! Et comme il n’y a pas que la bière dans la vie, pour trouver des alchimistes, visite à des vigneronnes qui nichent au cœur des villes. Comme Nathalie Cornec dont le chai est à deux pas du Ravi et qui, avec ses vins « Pour », en est à son « 7ème millésime ».
« Je ne suis pas une grande amatrice de bière parce que les seules que j’arrive à boire sont celles à fermentation spontanée, c’est-à-dire sans ajout de levure, explique-t-elle. Et je ne maîtrise pas très bien les processus de fabrication. Mais je connais les brasseurs artisanaux du coin. On se croise souvent et on se retrouve sur cette volonté de favoriser les circuits courts. D’une certaine manière, les micro-brasseries de quartier ont ouvert la voie aux chais urbains. Les gens font le parallèle. »
Toutefois, note Nathalie, « le rapport à la matière première n’est pas le même. Si les brasseries sont ancrées sur un territoire, les matières premières viennent souvent d’ailleurs. A ce titre, je trouve particulièrement intéressant que les brasseurs de Provence développent une filière de houblon local. Avec mes vins, je m’inscris dans un territoire : la vallée du Rhône et la Provence. Je n’irais pas chercher de raisin dans le Sud-Ouest ou dans la Loire. » Et d’ajouter : « Idem pour le rapport au temps. Nous, on suit la plante pendant des mois et on ne fait qu’une récolte par an. Les brasseurs, eux, peuvent produire en permanence et adapter la quantité à la demande. »
Nathalie Cornec compare les brasseurs à des cuisiniers : « Ils ont plein d’ingrédients, de techniques. Nous, dans le vin, l’essentiel est de s’adapter à la plante. » Mais notre vigneronne aime aussi les expérimentations. « Avec la distillerie de la Plaine, dans les locaux de la Bière de la Plaine, on a fait une eau de vie à partir de mon vin. Et, la brasserie Rubé, à la Belle de Mai, a fait une bière en se servant de la lie de mon vin pour brassin… »
C’est dans ce quartier populaire que nichent d’autres vignerons, Cuve. Avec des vins vraiment « pas pareils » puisque cette bande d’autodidactes a produit des cuvées étonnantes : « On a fait des pétillants, des blancs barriques, du vin à partir de raisin de table, des vins qui ne sont ni des rouges ni des blancs… », explique Alexia. Qui reconnaît sans peine une parenté avec les brasseurs : « Les process sont similaires puisque à la base, il y a une fermentation. Et on retrouve un côté expérimental. Après, la différence, c’est la temporalité. Avec, pour le vin, le fait de suivre pendant des mois l’évolution d’une plante. »
Ce qu’illustre sa dernière cuvée qui, avec le gel et les aléas climatiques, a offert des surprises : « J’ai un peu galéré », avoue-t-elle. Mais ce n’est rien à côté de ce qui se profile : « Cuve, ça s’arrête. Visiblement, le couvent Levat, où Cuve est installé depuis des années, ne veut plus de nous. Et, de fait, je me suis retrouvée un peu seule, ne parvenant pas à trouver des gens pour prendre la suite. On est un peu triste. Mais cela aura été une super expérience. Grâce à Cuve je sais aujourd’hui que ce que je veux faire dans la vie, c’est du vin. Ce n’est pas par hasard non plus si Guillaume, l’un des fondateurs, a fini, lui, par s’installer dans les Cévennes comme viticulteur. Et il y a d’autres personnes qui se forment. » Comme Manu de la Casa Consolat, la cantine italienne rue Consolat qui, depuis des années, produit sa propre cuvée. Sourire d’Alexia : « En attendant, on va multiplier les moments festifs parce que notre dernière cuvée, il va bien falloir l’écluser. » Beau programme en attendant la mise en bière !