Moi Michèle Laroque, la bourgeoise populaire
« On dirait le Sud / Le temps dure longtemps / Et la vie sûrement / Plus d’un million d’années / Et toujours en été » (1). Il est 8 heures du matin, dans son grand appartement niçois situé sur la promenade des Anglais, Michèle Laroque, joyeuse comme à son habitude, chantonne du Nino Ferrer en étendant sur son balcon les slips propres de son « républicain » d’amoureux, François Baroin (2) qui termine son petit déjeuner en lisant Le Figaro.
Lassée de l’andouillette de Troyes, ville dont François est maire, et pas mal affectée par l’attentat du 14 juillet 2016 (3) à Nice, où elle a grandi, elle a choisi de venir s’y réinstaller et d’y réaliser son premier film, Brillantissime (4). D’ailleurs, depuis juin, on peut la voir dans le nouveau clip promotionnel de la Région, où elle vante la douceur de vivre du Sud : « La Méditerranée est mon jardin, la Provence de mon enfance, une terre où l’on joue, où l’on rit, où l’on danse c’est ici, c’est dans le Sud » (5). « Tu parles encore toute seule ma chérie ? », lui lance François en rajustant sa cravate. « Faut que je me dépêche, je vais être en retard à la banque » (6), poursuit-il en l’embrassant, se prenant le brushing dans la banderole tricolore accrochée au-dessus de la fenêtre « M’en bati, sieu Nissart » (7). « Michèle, tu me feras le plaisir d’enlever cette merde, avec le mistral ça va finir par tuer quelqu’un », s’énerve-t-il.
« C’est ma promenade de petite fille qui n’était que joie, plaisir, bonheur, liberté et c’est fini pour toujours. C’est impossible ce qui s’est passé, impossible à intégrer » (8), lui lance Michèle en larmes. S’ensuit un long soliloque : Tu préfères que je fasse graver « Unité, indivisibilité de la République, Liberté, Égalité, Fraternité ou la mort« ? (9), comme sur ta mairie, c’est ça ? Tu m’en veux François d’avoir voulu revenir vivre à Nice ! Mais j’en pouvais plus de ta ville sans soleil et sans plage ! Je suis niçoise, moi, François ! Je bouffe de la socca, de la pissaladière, de la tapenade ! Je hais l’andouillette, tu m’entends ! JE LA HAIS ! Et puis tu veux que je te dise ? J’étais bien moi à Las Vegas (10) en exilée fiscale, pas contrainte de faire la promotion de Muselier pour arrondir les fins de mois ! Ben non, y a fallu que tu deviennes ministre du Budget (2) et que je me rapatrie !
– Mets la « Pédale douce » (11), Michèle ! Je me tape quand même plus de six heures de trajet pour rejoindre ma mairie, plusieurs fois par semaine, pour ton bien être. Toi par contre, pour me remercier tu signes des tribunes avec tes copains saltimbanques (12) pour me discréditer ! Je n’ai pas accueilli de migrants à Troyes « pour la simple et bonne raison que je suis en surcapacité à l’échelle régionale des centres d’accueil des demandeurs d’asile, qui sont aujourd’hui sur-occupés depuis des mois et des mois » (13).
– J’en peux plus François de ton discours policé ! « J’ai un côté très bcbg, mais dans ma tête je ne suis pas bien élevée du tout » (8). « Mon père me répétait tous les jours : « ne sois pas un mouton » » (8) et je ne serai jamais un mouton François ! « Je suis une artiste, on me propose parfois des choses qui peuvent être un peu fofolles et le fait d’être associée à quelqu’un qui était justement membre du gouvernement a fait que j’ai refusé pas mal de choses, justement pour ne pas gêner les gens qui ont une certaine idée de l’image qu’on doit avoir. » (14). Et ça, plus jamais ! Pourtant au début, j’y ai cru à ton : « Il n’y a rien de plus intense que le regard d’un élu qui vous fait vivre sa passion » (15). Tu sais quoi ? « Si j’étais magicienne, j’effacerais les peurs afin de redonner confiance aux gens. Les riches redistribueraient leurs richesses, on n’aurait même pas besoin de politiques qui nous disent ce que l’on doit faire » (16).
– Arrête avec tes beaux discours Michèle ! Toi la défenseuse des opprimés ! Tu veux qu’on en parle de ton voyage en Israël ? (17) Jusqu’à quand tu vas me les briser menues Michèle ? Jusqu’ici, j’ai été plutôt compréhensif ! J’ai voté contre le mariage gay et toi tu trouves rien de mieux que de jouer un couple de lesbiennes sur la scène de Troyes (18), mais surtout tu déclares dans les médias « Sans le mariage pour tous on n’aurait pas pu jouer « Elles s’aiment » en prime sur France 2 » (19). Je le répète : « Dans mon entourage, des amis qui sont gays, je n’en connais pas un qui veut se marier. En revanche, j’en connais beaucoup, quasiment tous, qui ont été heureux de pouvoir se pacser. » (20).
Michèle se sert un jus de Bojus (21) et installe son tapis de yoga (21), tout en poursuivant ses attaques assassines. Mais arrête ! En 1999, t’as même pas voté pour le Pacs ! (20). Tu veux que je te dise : tu es un lâche François !
François à bout de nerf, hausse le ton, le brushing en ébullition, et se met à la vouvoyer : « Vous posez la question du courage. […] Est-ce du courage de mentir, de basculer dans la démagogie, de taire la vérité, de vous accrocher à des vieilles lunes socialistes ! […] Et vous pourrez crier, le bruit n’ajoutera rien à l’affaire et vous pourrez vous lever, et vous pourrez quitter la salle et adresser des quolibets, vous serez vous aussi en face des procès au rendez-vous de la vérité » (22).
Michèle se met en position du lotus. Tu frôles l’hystérie mon pauvre Francois ! Penses-tu qu’Emmanuel et Brigitte se disputent de la sorte ? Non ! Elle enchaîne avec la posture de la grenouille. « J’adore le couple qu’ils forment, ils ont une histoire différente et j’aime beaucoup quand la différence n’empêche pas d’aller au plus haut niveau » (23). Si tu vois ce que je veux dire. Elle lui sert un grand verre de jus de Bojus. Tu sais mon amour, « le couple c’est là où on règle beaucoup de choses que l’on n’a pas réglé de l’enfance » (8). Il faut « arrêter de vouloir tout contrôler, arrêter d’avoir peur, arrêter d’être jaloux. L’important c’est d’être heureux tout seul, et que l’autre soit un merveilleux plus » (8). Alors contente-toi simplement d’être mon merveilleux plus… conclut-elle en enchaînant les postures du guerrier.