« Des droits ne sont pas respectés »
Une balle, deux balles, trois balles… La boite du mal-logement du chamboule-tout de la société idéale refuse obstinément de tomber de la table. C’est aussi une des plus choisies par les enfants venus participer avec leurs parents au Banquet expérimental organisé aux Pins, à Vitrolles, par les centres sociaux Les Salyens et Le Bartas. Dans ce quartier de près de 800 logements en fin de rénovation urbaine ça n’est peut-être pas non plus étonnant.
Le jeu propose de dégommer deux pyramides de mots : les « vilains » et les « jolis », explique Sophia une éducatrice de l’Addap 13 venue prêter main-forte. Parmi les plus recherchés par les enfants, on trouve aussi « pauvreté », « discrimination », « injustices », d’un côté ; « amitié », « fraternité » ou encore « liberté » de l’autre. « Des mots dont on parle à l’école », précise un petit groupe de minots (6 à 13 ans) sur le départ vers une chasse au trésor sur la citoyenneté. « Ce genre de jeu permet d’expliquer deux-trois notions », note Sophia. Tout en se désolant : « Des choses ne devraient plus exister, comme la malnutrition ou le mal-logement. »
« C’était trop bien de faire ensemble »
En fin de soirée et de chasse au trésor, Zacharie approuve. « J’ai appris qu’on a des droits mais que certains ne sont pas respectés. Il y a par exemple des enfants esclaves qui sont obligés de travailler », raconte ce garçon de 10 ans et en CM1 aux joues encore rondes. « Comme le droit à la famille, aux loisirs », explique aussi Tanissia, une collégienne de 13 ans. Qui se réjouit de sa soirée : « On devait trouver le mot « solidarité », car c’est important de s’entraider. [D’ailleurs], nous on s’est aidé et c’était trop bien de faire ensemble. »
A une table, des religieuses de l’Action catholique des enfants proposent aussi le jeu du pingouin. Habillées en civil, elles vivent en communauté dans un logement social du quartier quasiment depuis sa création et accompagnent les jeunes sur des activités de solidarité, de l’aide aux devoirs, etc. « C’est un jeu de rôle autour des enfants du monde entier, pour découvrir leur manière de vivre… », explique Lucette, une des nones, un peu méfiante. « L’objectif c’est qu’ils comprennent certains enjeux, de les ouvrir à des débats, mais aussi qu’ils puissent eux aussi s’exprimer », développe Aurélie Verjus, l’animatrice, en charge de l’accompagnement à la scolarité cette année scolaire, et qui a porté le Banquet des minots.
« Au lancement de l’expérimentation par la fédération, le projet était plus tourné vers les adultes. Mais au fur et à mesure, s’est posée la question de l’accueil des familles et donc comment travailler avec les enfants. On aurait aimé mettre en place des ateliers en amont, mais c’était compliqué », poursuit la jeune femme. Un objectif pour l’année prochaine, qui permettrait aux enfants de participer au banquet comme aux débats aux côtés des adultes. Un sacré droit !
J-F. P.