Test complet du meeting du frontiste marseillais Stéphane Ravier, le 6 mars au parc Chanot. Juste à côté du Vélodrome un jour de match. Ambiance garantie !
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• Note technique : 4/10
– Qui, où, combien, quand : Le sénateur frontiste marseillais Stéphane Ravier (50 ans, employé chez Orange, ancien maire des 13 et 14ème arrondissements), le 6 mars 2020, au parc Chanot, à Marseille, avec, en guest, Marine Le Pen. A peine 400 personnes !
– Le dispositif de sécurité : du CRS à foison, des gendarmes en renfort, la Bac à l’affût et même Vigipirate en faction. Ce soir-là, y a « match » !
– Le style de la salle : palais des congrès aseptisé dont le balcon et les ailes sont condamnés, faute de convives tandis que, juste à côté, le « salon de la médecine douce et du bien-être » bat son plein.
– Le style du public : les yeux sont bleus, les cheveux blancs, les lèvres rouges… C’est âgé, parfois à crâne rasé, souvent déguisé, d’une croix ou d’un pin’s texan. Et quand c’est jeune, ça a déjà l’air vieux.
– Le nombre de journalistes : Plein, du local comme du « parisien ».
Durée : 1 h 20 de meeting (précédé d’une heure de contre-manif)
• Note artistique : 2/10
– Le slogan : Retrouvons Marseille
– LA promesse de campagne : « Avec nous, l’Aquarius n’accostera plus à Marseille ! » (Marine Le Pen)
– La musique d’entrée : Un Johnny méconnaissable métissé de techno wagnérienne
– La meilleure punchline : « Il faudra qu’on se débarrasse de cette racaille d’extrême gauche ! » (phrase introductive du discours de Stéphane Ravier)
– La meilleure punchline dupublic : « Y a quoi déjà d’écrit sur ton drapeau ? », demande un frontiste à son voisin qui agite son fanion « Marine présidente » aussi frénétiquement que son drapeau tricolore.
– Le pire soutien : ex-aequo, le vieux frontiste Bernard Marandat (celui pour qui « le fascisme, c’est la fête ») qui lance à ses ouailles, en vieux fan de Jean-Marie Le Pen : « Je vous ai à l’œil. » Mais, à l’entrée, avec poussette et bébé, Anastasia Palmieri, ancienne porte-parole de l’Action française et Jérémy Palmieri, qui est passé du Bastion social au biberon.
– La mise en scène : spartiate. Têtes de liste avachies sur fauteuil, drapeaux en berne, Un gros « # Ravier 2020 » sur fond bleu marine… Qu’est devenu le fan de Johnny et d’AC/DC ?!
– Le clip d’entrée : vue aérienne made in drone pour filmer les calanques comme le marché aux puces, images aussi léchées qu’anxiogène, sauf quand Fanou joue aux boules avec sa nièce ou que la Bonne Mère protège Marseille…
– L’affiche : quand l’équipe de Ravier ne se déguise pas en armée de spermatozoïdes en K-way blanc prête à affronter le coronavirus sur les marches de la mairie du 13/14, le frontiste fait des affiches digne d’un Pôle Emploi avec chef et sous-chef côte à côte sur fond bleu même pas marine.
– Les goodies: C’est la dèche, même pas un pin’s ou un nounours à la flamme. A peine un drapeau en plastique ou le dernier bouquin du « conseiller spécial » de Marine, Franck Allisio.
– Le buffet : pas un p’tit four, même pas un verre de schnapp’s ou le début d’un jaune, c’est convivial comme une liquidation judiciaire
« On est là, même si Marine le veut pas, on est là ! » scandent rigolard, une centaine de militants antifa, manifestant contre la présence de Marine Le Pen venue soutenir le sénateur marseillais Stéphane Ravier, à deux pas du Vélodrome où l’OM accueille, ce vendredi6 mars, Amiens. Le militant frontiste se fait donc un peu malmener avant d’être accueilli par le DPS, le service d’ordre du parti d’extrême droite, et s’installer dans un palais des congrès loin d’être rempli. Un jeune militant soupire : « Entre le coronavirus et les antifa… »
Tandis que le couple Palmieri (maman royco, papa « vive la bière, vive le Bastion… ») pouponne non loin de la candidate du 15/16 Sophie Grech, Bernard –« le fascisme, c’est la fête »– Marandat rase les murs. Et, après avoir accueilli sur scène ses têtes de liste, Ravier, en costard anthracite, fait grise mine, grinçant contre la « racaille d’extrême gauche », ces « crasseux qui n’ont rien d’autre à faire que de s’en prendre à nos militants ».
A 9 jours du 1er tour, ça sent la fatigue et la tension. Oubliez le Ravier qui pousse la chansonnette, comme lors de ses vœux au Dôme en janvier 2017 immortalisés par le Ravi :
Il s’agit d’aller à l’essentiel. Taper sur Vassal, en priorité. Mais aussi, sur les autres, on ne sait jamais. En scandant, comme mot d’ordre : « Coupable ! » Mais si le dictateur nord-phocéen fanfaronne, il n’en assure pas moins ses arrières. Pour briser le fameux plafond de verre, le voilà à s’adresser à ces marseillais qui ne sont pas « de souche » : « Je vous tends la main. Mon histoire est la même que la vôtre. J’ai grandi dans les quartiers nord… »
Le « en même temps » à la sauce frontiste ne tient pas longtemps. Et le voilà à dénoncer « islamisme » et « ensauvagement », tout en promettant un « coup de tonnerre politique comme on en a pas connu depuis le 21 avril 2002 ». Quoi de mieux pour accueillir la fille qu’une référence au seul coup d’éclat du père ? D’autant que, privilège, c’est, à la veille du premier tour des municipales, le seul meeting de la patronne du RN ! Sauf qu’elle a beau lancer aux militants marseillais « la France vous regarde » et assurer que « Marseille a besoin d’un Stéphane Ravier », son discours, elle aurait pu le prononcer dans n’importe quelle ville tant elle mâche et ressasse les thématiques et obsessions frontistes : sécurité, islamisme, immigration…
D’où un tunnel sur l’Europe, la Grèce et la Turquie. Même Ravier bloque sur son smartphone ! Retour en France où la députée européenne promet à une salle qui commence à se vider : « Votre motion de censure, c’est votre bulletin de vote ! » Ça se lève mécaniquement pour la Marseillaise, Ravier se précipitant sur le micro pour encourager les militants à tenir les bureaux de vote « parce que nos adversaires sont prêts à tout, y compris la fraude ! » Anastasia Palmieri berce son enfant tandis que la salle beugle : « Qu’un sang impur abreuve nos sillons ! » Les yeux écarquillés de ce dernier semblent dire : « Mais qu’est-ce que j’fous là ? » On n’a rarement été autant d’accord avec un jeune militant d’extrême droite…