Le Front à la Région ? Des « bleus » qui marinent !
Le FN (rebaptisé RN en 2018), ce sont ceux qui en sont partis qui en parlent le mieux ! À la région, on a l’embarras du choix. En 2015, le FN comptait 42 élus. Aujourd’hui, une petite trentaine. Elisabeth Philippe a d’ailleurs tenté – en vain – de rassembler dans un groupe les « non-inscrits » (Cf le Ravi N°169) : « On aurait ainsi mis en place une autre opposition. Plus constructive. Parce que le FN, à part faire le show et dire non à tout… Mais pour s’opposer intelligemment, il faut travailler ! » Exclue elle du parti, l’ex-frontiste de Tarascon Valérie Laupies n’est pas tendre non plus : « C’est mon deuxième mandat. Le premier, c’était avec Jean-Marie Le Pen. Là, c’était une vraie opposition ! Aujourd’hui, elle est de façade. RN et LR, c’est bonnet blanc et blanc bonnet ! Christophe Castaner [alors tête de liste PS] s’était retiré pour Christian Estrosi (LR). Là, face à Renaud Muselier (LR), le RN veut présenter Thierry Mariani [ex-RPR, ex-UMP, rallié au RN]. Qui vient du même parti ! » Depuis le départ de Marion Maréchal (nous voilà) Le Pen, difficile d’identifier un leader, en dehors de l’inamovible Frédéric Bocaletti. Avec, derrière le Varois, des proches du sénateur marseillais Stéphane Ravier (Eléonore Bez, Sandrine D’Angio, Franck Allisio) et une poignée de figures locales (Amaury Navarranne de Toulon, le Niçois Philippe Vardon…)
Agit-prop
Rires à droite : « Le RN, c’est l’opposition rêvée ! Ils n’ont aucune consistance ! » Même tonalité pour Julien Aubert, le député LR du Vaucluse pourtant bien à droite : « Ce n’est jamais simple d’être dans l’opposition mais là, ce qui frappe, c’est la désagrégation du RN. D’abord leur chef et puis, petit à petit, quasi un tiers du groupe. Certains qui ont quitté LR pour le RN avouent : “Si on avait su…” ! » Pour lui, « quand Marion Maréchal était là, c’était électrique. Après, on a senti que ce n’était plus géré. Désormais, c’est un peu plus constructif ». Au point que le RN a obtenu de Muselier qu’il renonce à soutenir « une association aux positions apparemment pas très républicaines ». Mais ils sont rares à trouver grâce aux yeux de Julien Aubert : « Bocaletti ? Non ! Vardon ? Un bulldozer. Navarranne ? Un comique ! Ceux qui s’en tirent ? Liottaux qui bosse les budgets et Thibault de la Tocnaye qui s’y connaît à l’international. Mais la plupart sont dans l’agit-prop, croyant être députés alors qu’on est à la région. » Un face-à-face qui « n’a rien de bon ».
Pas de souci pour Bocaletti qu’on n’ait pas fait appel à lui pour les régionales : « Je n’étais pas candidat ! Il faut quelqu’un capable de rassembler au-delà de nos électeurs ! » Et de douter, d’ailleurs, que Stéphane Ravier ou David Rachline, « très attachés, l’un à Marseille, l’autre à Fréjus » aient été candidats à la candidature face à Thierry Mariani, le candidat toujours officieux fin février. L’ex patron du FN 83 juge le bilan du RN « plutôt constructif. Même si ça n’a pas été simple ». À commencer par le départ de Marion Maréchal : « Après, Estrosi, lui aussi, est parti ! » Quant aux défections : « La plupart, ce sont ceux qui n’ont pas été investis aux élections successives. Quant à Marc-Etienne Lansade, lui, il était candidat pour prendre la tête du groupe à la région. Comme c’est moi qui a été désigné, il nous a quittés. »
Dialogue en commission
Le plus compliqué, dit-il, « c’est l’opposition systématique [de la majorité LR] à tout ce qu’on propose. La caricature d’une gestion politique ! D’autant qu’il n’y a pas vraiment de débat. Une fois que le rapporteur s’est exprimé, nous, on n’a qu’une poignée de minutes. Et les plus gros dossiers, ce n’est pas en plénière mais en commission. Sans public ni journalistes. » Toutefois, poursuit l’élu d’extrême droite, « ils ont fini par se ranger à notre avis sur les portiques de sécurité, sur la Villa Méditerranée… Et sur l’islamisme, on a été un peu entendu ». Le marseillais Jean-François Luc estime lui qu’en « commission, le dialogue est plus apaisé, plus constructif. Et nous, quand ça va dans le bon sens, on vote pour ».
Ambiance tendue toutefois lors de l’avant-dernière plénière mi-février. Pourtant, en début de séance, Muselier assure que « la majorité est globalement respectueuse de son opposition ». Et accepte que soient examinés les amendements du RN au rapport présenté en urgence et intitulé « Région sud, région sûre », un catalogue de mesures sécuritaires dans la droite ligne de la loi sur les « séparatismes ». Mais Bocaletti voudrait que la région aille plus loin et s’engage non seulement à lutter « contre l’islamo-gauchisme sous toutes ses formes » mais aussi qu’elle cesse « tout financement d’associations ou dispositifs qui concourent à l’entrée et/ou au séjour d’immigrés, légaux ou illégaux, demandeurs d’asile compris »! Amendements rejetés. Alors Vardon explose : « Sans déconner, vous êtes fiers de vous ? Oui, je suis énervé ! » Et Muselier de lui couper le micro…
En attendant les élections régionales les 13 et 20 juin, au RN, on se hâte lentement. Même dans l’entourage de Mariani, on joue la prudence : « Lors de la dernière commission d’investiture, deux nouvelles candidatures venant du Var ont été examinées. Pour l’heure, donc, rien n’est officiel. De toute manière, il est impossible de faire campagne. Et puis, les régionales, à part les politiques et les journalistes, tout le monde s’en fout. Ce dont les gens se préoccupent, c’est quand ils pourront se faire vacciner. » Et de se refuser à tout commentaire sur le bilan frontiste au conseil régional. Alors, le RN, à la région, c’est du vent ? Un indice : le titre de leur publication. Mistral…