Moi, Logan Nisin, ni d'esprit

Radio Courtoisie (1) grésille en gothique : « On est skinheads, bêtes et méchants ! Et le pire de tout, c’est qu’en plus on est contents ! (2) ». Désolé pour la musique… Comme j’ai dit aux enquêteurs : « La détention m’a fait réfléchir. Après, mes idées, je vais pas vous mentir, j’y crois encore mais je suis conscient que je suis allé trop loin. » (3) J’m’appelle pas Logan pour rien : « Dans ma partie, je suis le meilleur. Même si ce n’est pas bien. » (4) Mon deuxième prénom, Alexandre. Oui, j’suis plus taillé comme un sandwich SNCF avec raie sur le côté et œil qui tressaute. Quelqu’un qui « au premier abord, paraît buté, un brin autiste, placide » mais « qui est très intelligent, insaisissable, bizarre et calculateur » (5).
Wagner s’invite sur les ondes… Il disait quoi Woody Allen ? « Quand j’entends Wagner, j’ai envie d’envahir la Pologne ! » Grösse humour ! Mais achtung ! Le 28 juin 2017, c’est le Raid qui est venu me cueillir à Vitrolles. Comme mes « kamarades » en région parisienne mais aussi Forcalquier : « association de malfaiteurs en vue d’une entreprise terroriste ». Nous voilà jugés à Paris en même temps que le procès des attentats du 13 novembre.
Le nôtre durera moins longtemps… D’après Gérard Collomb, le ministre de l’Intérieur, on n’est « pas la bande la plus sérieuse arrêtée ces derniers temps » (6). Lui qui avait sans le savoir pour voisin l’ancien du Gud recherché par la police, Logan Djian ! Oui, Logan, c’est la mode chez nous.
Attention, on a tué personne ! Chez moi, y avait juste deux revolvers, un fusil à pompe et une affichette clamant : « Rebeus, blacks, dealers, migrants, racailles, djihadistes, si toi aussi, tu rêves de tous les tuer, nous en avons fait le vœu, rejoins-nous ! »(7) Notre groupuscule s’appelait OAS : « organisation d’armées sociales ». Moi j’étais le « régent ». Le but ? « Enclencher la remigration » (7). En 2002, Maxime Brunerie voulait se faire Chirac. Nous, « l’idée n’était pas de tuer pour tuer » (9). On voulait s’attaquer au marché aux puces à Marseille, à un restaurant indien à Aix-en-Provence, à la grande mosquée de Vitrolles… Mais aussi à Jean-Luc Mélenchon et Christophe Castaner. Face aux enquêteurs, Thomas, de Forcalquier (10), a minimisé : « [Logan] s’est intéressé à Castaner parce qu’il a vu que j’habitais la même commune. Je ne me souviens pas qu’il ait dit qu’il voulait le tuer. Concernant Mélenchon, je sais qu’il voulait faire une action contre lui… Il voulait faire plein de trucs. On a toujours laissé traîner. On le laissait parler. On voulait rester amis avec lui. » (8)
Sympas, les potes ! Comme Olivier Bianciotto : « Logan est connu pour être dans la provocation » (10). C’est vrai que j’ai dit « toute ma sympathie » pour Anders Breivik, un militant d’extrême droite norvégien qui a tué 77 personnes en 2011 et à qui j’ai consacré une page Facebook (11). Sur les réseaux, je suis un peu « fada » (9) : j’avais pour pseudo « KlausBraun13 », la contraction de Klaus Barbie et Eva Braun (7).
« J’aurais préféré fusiller quelqu’un… »
De quoi attirer l’attention. J’ai dû me calmer : « Les gars, il faut que je sorte des radars. » (7) Joli lapsus ! Moi qui étais « connu des services de police, notamment pour des faits de destruction par moyen incendiaire en réunion d’un radar » (8). Une soirée arrosée avec Olivier et des anciens du Front, comme Richard Bonacase.
La radio entonne « Unis par le vin » de Komintern Sect : « Comme tous les samedis soir, on va encore se faire chier / Heureusement on va boire… »
Ils me font marrer les enquêteurs : « S’étant tourné vers l’âge de 13 ans vers le nazisme, [Logan Nisin] s’était orienté vers 15 ou 16 ans vers l’extrême droite et le nationalisme français, sans toutefois faire partie actuellement d’un quelconque mouvement connu. » (8) J’pourrais écrire un « Guide du routard » : les Jeunesses nationalistes de Gabriac, le Mouvement populaire nouvelle aurore avec Bianciotto. C’est nous, l’action contre la stèle de Manouchian : « Manouchian, grosse merde, on ne veut pas de ça à Marseille » (12).
Olivier passera devant les tribunaux pour ce coup. Et je le retrouve au Parti de la France où je rencontre Thomas de Forcalquier. On sera à Marignane à la cérémonie de commémoration de l’Adimad, des « nostalgériques » qui aiment bien l’OAS (13). Plus tard, je croise d’autres potes d’Olivier à l’Action Française même si les roycos effaceront tout lien avec moi (14). J’étais pas à l’aise, « le seul à n’avoir pas fait d’études » (17)…
Moi, au fond, c’est au Front que je finis. Pas étonnant quand on est de Vitrolles… J’ai fait la campagne du parachuté Jean-Lin Lacapelle et même un selfie avec Marion Maréchal ! Ben oui : « Si la stratégie sont les élections, alors oui, il y a tout à gagner à une union et à trouver un point fédérateur ou un compromis. » Même si « plus une section est petite et plus les liens sont forts et plus elle est unie » (15). Des clous ! Après mon arrestation, tout ce beau monde a clamé ne pas me connaître ! Y a qu’Olivier qui a organisé une cagnotte…
J’voulais pas lâcher : « Faites ce qui doit être fait, que je ne sois pas là pour rien. » (3) A ma mère, j’avoue : « J’aurais préféré prendre dix ans de prison, fusiller quelqu’un plutôt qu’être là pour rien. » (9) Peut-être pour ça qu’il y a eu un « commando » qui a demandé ma libération en menaçant de s’en prendre à un match de foot (16) !
Mais pas question de débarquer devant le juge en tapant un « Sieg » comme Breivik. Face aux enquêteurs, j’ai fait mon kakou : « Je partage la même idéologie. C’est un personnage qui est allé au bout de ce qu’il pensait. » (9) Depuis, j’ai vécu « dans l’enfer de la détention provisoire ». Au début, « tout le monde croyait que j’étais là pour défaut de permis ». Quand on a su qui j’étais, « chaque jour, j’étais la cible de menaces, de quolibets ». Et un jour, en promenade, « Mehdi » a sorti une « pique ». Et c’est « Mohamed » qui m’a sauvé : « Voilà à qui je dois ma vie » (17) !
Au tribunal, je fais profil bas : « Je peux comprendre avec le recul que mes propos racistes sont globalement condamnables. » Si j’étais raciste, c’était « par rancœur », par « ignorance » (18). Merde, y a un groupe d’ultra-droite qui voulait s’en prendre à des franc-maçons qui vient de se faire serrer ? Faut que je me mette le paquet : « J’étais un monstre ! » (19) J’espère que le juge sera clément. « J’ai passé plus de temps en prison que dans l’extrême droite. » Après, maintenant, ça se passe « plutôt bien, même avec des profils radicalisés dans l’islamisme. » (17) D’ailleurs, mon meilleur pote c’est « Tarik », un « musulman et ancien policier de Nice » (17). Si ça c’est pas la preuve que je suis « déradicalisé » (9) ?!