J’ai testé pour vous : les sénatoriales
Haaaa, je m’y voyais déjà… Sortir d’un bureau de vote impeccable sous les lambris dorés de la préfecture, aller retrouver mes camarades grands électeurs dans un grand restaurant. Une dizaine d’années en arrière, plusieurs élus de gauche de tous bords parlaient avec émotion des banquets républicains qui accompagnaient les élections sénatoriales. Las : alors que me voilà enfin désigné parmi l’élite de 3 588 « délégués » appelés à choisir les représentants du 13 (en force) à la chambre haute, la préfecture des Bouches-du-Rhône a délocalisé le vote au parc Chanot pour cause de Covid. Et l’union des gauches qui, en tant qu’ex-colistier du Printemps marseillais, m’a appelé à voter, n’a rien prévu du tout durant la journée. Le banquet ce sera sandwich avec les potes, si on trouve un restaurant d’ouvert à quelques heures de leur fermeture, toujours pour Covid.
100 € d’amende
L’avant-vote n’avait guère été mieux. Je m’attendais à être contacté par Jean-Noël Guérini, qui tente de sauver son siège de sénateur. Déception : seule la République en marche a pris la peine de m’écrire personnellement, pour m’inviter à deux réunions en ligne. Même mon camp ne m’a rien dit : j’ai appris dans la presse la composition de sa liste. Jérémy Bacchi, ex-tête de liste PC dans les 13e et 14e arrondissements de Marseille, qui en se retirant face au RN a contribué à priver la gauche d’une majorité nette au conseil municipal. Marie-Arlette Carlotti, PS, ministre déléguée période François Hollande. Comme le dit un haut cadre du Printemps marseillais : « Pas la liste dont on aurait rêvé. » On essaie de se dire que c’est le prix à payer pour une nécessaire union aux cantonales et régionales l’année prochaine, que le vote aux sénatoriales est obligatoire sous peine de 100 € d’amende, que le Sénat de toute façon tout le monde s’en fout mais bon, la couleuvre a du mal à passer. Les socialistes ont eu un droit à un mail les appelant gentiment mais fermement à la discipline de vote. Les communistes à des réunions avec leur tête de liste. Les citoyens se débrouillent.
Chapeau d’Indiana Jones et T-shirt Spiderman « un grand pouvoir implique de grandes responsabilités », me voilà devant mon bureau de vote. Les grands électeurs arrivent par cars entiers de tous les coins du département. Je saisis TOUS les bulletins, Guérini compris, et accomplis mon devoir de super-citoyen. En sortant, je balaie du regard la file d’attente en essayant de deviner QUI, dans cette foule 2020, peut encore voter pour l’ex-président du CD 13. Assez, semble-t-il, pour que Jean-Nono refasse un tour de piste. En début de soirée, l’ex-socialiste avait retrouvé son siège avec 303 voix. Stéphane Ravier (RN) aussi. Droite et gauche, elles, ont fait jeu égal avec trois sénateurs chacune. EELV tablait sur 1 200 grandes voix pour la liste d’union de la gauche. Elle en aura rassemblé 987, presque 20% de moins.