La « balkanysation » aixoise
À Aix-en-Provence, les municipales, ça déménage ! Pour sa campagne, la candidate « société civile » Charlotte de Busschère s’est payée un camion avec sa frimousse, qu’elle gare au milieu des voitures de luxe de l’hôtel Pigonnet. Sueurs froides à la réception. Et stupeur en apprenant que la patronne d' »Aixpression démocrate » va y tenir une conférence de presse.
Quoi de mieux qu’un 5 étoiles pour un mariage ? Celui entre sa liste et « Vert’Aix », celle de Stéphane Salord, ancien adjoint de Maryse Joissains puis farouche opposant. Pour celui qui roule pour Génération écologie, « il faut sortir de la phase incantatoire et nous rassembler ». Et, le contrat de « mariage » à peine signé, d’appeler le suppléant de la députée macroniste Anne-Laurence Petel, Dominique Sassoon, qui lui, est candidat EELV, à rejoindre « notre clan… euh, camp ! J’me suis bien planté, moi ! ». Fin de non-recevoir du chirurgien : « En décembre, on lui avait proposé la troisième place sur la liste et la première à la métropole, il a refusé. »
Pas facile de se retrouver dans ce « marigot » aixois. Même si, corrigent nombre de candidats, la situation ne serait pas exceptionnelle. Encore que… On assiste à une « balkanysation » de la vie politique aixoise. L’actualité judiciaire de la maire sortante, Maryse Joissains, est copieuse. Mais, comme l’explique son entourage, malgré sa condamnation, notamment pour la promo express de son chauffeur, la cour de cassation est en passe d’exaucer ses vœux : « Il y aura d’ici plusieurs mois une nouvelle audience à Montpellier car si les motifs pour lesquels elle a été condamnée sont maintenus, les peines, elles, ont été annulées, notamment celle d’inéligibilité. » Elle peut donc mener sa liste.
Affaires et convoitises
Mais Alexandre Gallèse, son adjoint à l’urbanisme, lui, vient d’être mis en examen pour sa gestion très particulière de ce dossier, aux côtés notamment d’un promoteur ! Et, même s’il assure qu’il n’y a « pas eu d’enrichissement personnel », il a dû se retirer de la liste. D’ailleurs, d’après Anticor, l’association anti-corruption, celui qui, avec l’association Reflaixion, est en charge de la 14ème circonscription pour les LR ne serait pas le seul dans le viseur.
Toutefois, la maire sortante a l’imprimatur de LR. Et son ancien adjoint, Jean-Marc Perrin, lui aussi candidat, fait la moue : « C’est une grosse prise de risque de ma famille politique. La commission a suivi aveuglément les statuts. Je me refuse à commenter l’actualité judiciaire et je ne sais si Maryse Joissains a un plan B. Peut-être un plan S… » Comme Sophie, sa sénatrice de fille, très présente sur le terrain. Le directeur de campagne de la maire minimise : « C’est uniquement lié aux vacances et à l’agenda du Sénat. »
À Aix, la « balkanysation » se traduit aussi par une pléthore de candidats. Perrin temporise : « Aix est une belle princesse que beaucoup convoitent. Et avec le miracle Macron, des personnes jeunes, pas très expérimentées se sont faites élire. Ça peut donner des ailes. » Une manière de railler l’embouteillage du côté de la Macronie. Si la députée Anne-Laurence Petel a été officiellement investie par LREM, cela n’a pas empêché l’autre macroniste du coin, le député Mohamed Laqhila, de se lancer dans la course pour le Modem. Sans oublier le suppléant de Petel, Sassoon, qui, n’ayant pas eu l’investiture En Marche, a le soutien d’EELV. Et celui d’un ex-fervent macroniste (et ex-écolo), le député François-Michel Lambert.
À la tête d’Aix en partage, l’ancien chevénementiste Marc Pena, loin d’être tendre pour ses adversaires, plastronne : « Face à la confusion, la clarté, elle est de notre côté. On propose non seulement une alternance mais une vraie alternative avec une liste citoyenne qui rassemble toutes les formations de la gauche. » Sauf EELV qui, comme à Marseille, part en solo. Ni Hervé Guerrera, du Parti Occitan, n’ayant guère goûté le poids du PS.
Ce qui confirme l’éclatement du groupe d’opposition « Démocratie pour Aix » né en 2014 autour d’un duo – l’avocat PS Édouard Baldo et la bête noire des Joissains, Lucien-Alexandre Castrono – qui ne rempile pas. Et pas que pour des questions d’âge : « Je ne me reconnais plus dans ce monde d’ambition, soupire Castronovo. Le nomadisme politique intéressé, très peu pour moi. Comme je l’ai dit à l’un des candidats qui m’a approché : “Si je venais avec toi, tu ferais une bonne affaire mais moi, je ne pourrais plus sortir dans la rue la tête haute” ! » Pendant ce temps-là, chez les Joissains…