La cas Riboux
« C’est le plus mauvais jour pour venir ici », plaisante sous le brouillard et la pluie Bernard Cal, 61 ans, arboriculteur et l’un des sept conseillers municipaux que compte le village de Riboux, 45 habitants au compteur. Bien qu’attributaire du code postal 13170, la commune – à 500 mètres d’altitude en pleine Sainte-Baume – est bien située dans le département du Var, mais à sept kilomètres de Cuges-les-Pins, dans le « 13 ». Pour y arriver, il faut emprunter une route sinueuse de montagne de laquelle, par beau temps, on peut observer la mer et l’île des Embiez. C’est ici qu’ont été tournés Jean de Florette et Manon des Sources…
Bien que voisine de sept kilomètres du parc d’attractions Ok Corral, ici, pas de règlements de compte en vue des élections municipales. Suzanne Arnaud, 85 ans, maire depuis 1983 (au conseil municipal depuis 1971 !) devrait sans trop de suspens rempiler pour six ans. Pourtant « il n’y a rien à gagner à être élu ici, on donne du temps et de l’argent. C’est moi qui déneige au tracteur l’hiver à 4 heures du matin ! », insiste Bernard Cal. La seule employée de mairie – la fille du maire – est secrétaire de mairie à mi-temps.
Le village se résume à quelques petites maisons, dont un lot mitoyen où siège la minuscule mairie, plus un petit hameau. Une table à manger au rez-de-chaussée de ce qui semble être une habitation classique. Seul le portrait de Macron accroché au mur trahit l’administration. Ici pas de scrutin de liste mais la bonne vieille technique du panachage, où chaque votant peut inscrire le nom de qui bon lui semble.
Suzanne Arnaud, « amoureuse de son village » se bat pour ne pas qu’il ne disparaisse : « Quand j’ai été élue, il n’y avait que deux habitants ! » À Riboux, les loisirs sont la chasse et la randonnée. Un bistrot de pays, financé par la communauté de communes, va ouvrir en début d’année. Ici, le portable ne passe pas mais une antenne 4G devrait bientôt débarquer. Bernard Cal a passé un an sans téléphone fixe… Internet ? Il faut acheter une parabole pour passer par le satellite : plus de 50 euros par mois pour des résultats très aléatoires. Des problèmes d’approvisionnement en eau également. Le village a dû se faire livrer cet été…
« C’est clair qu’il ne faut pas oublier le pain !, rigole Bernard Cal. Certains viennent s’installer pour la carte postale mais ils déchantent rapidement au bout de trois ou quatre mois. L’école est à 20 minutes. Et puis ça revient cher en pétrole ! » Ce qui n’est pas le cas de Djamel Bazi, installé avec sa femme et sa fille de quatre ans depuis un an et demi, « pour la tranquillité ». Pour lui qui travaille tôt le matin à Aubagne « le plus dur, c’est la route, l’hiver ». Il ira voter à Riboux pour la première fois en mars prochain, très probablement pour reconduire la maire sortante : « C’est une passionnée, elle est conviviale et défend le village. »
Riboux vote à droite toute : la droite et le Rassemblement national ont cumulé 60 % des voix au 1er tour de la dernière présidentielle et 50% aux européennes. Mais « on ne parle pas de politique !, assure Suzanne Arnaud. L’idée c’est d’agir pour le village. Mais si c’est ce que vous demandez, oui je suis à fond Les Républicains ! La mairie, c’est la moitié de ma vie. Ce n’est pas de tout repos, surtout que nous avons très peu de moyens. Heureusement que la communauté de communes nous aide. Je vais repartir pour un mandat, ça ne plaît pas à mon mari ni à ma famille mais dans la vie il faut faire des choix ! » Addiction politique à tous les étages.