Marc Vuillemot remonte sur Seyne
En ce mercredi matin de juin, jour de marché, sous le soleil de La Seyne-sur-Mer, le premier tour des municipales semble bien loin dans les esprits… Quelques affiches ornent les panneaux électoraux, principalement celles de Nathalie Bicais (DVD), conseillère départementale LR du Var arrivée en deuxième position en mars dernier avec 21,82 % à presque rien du maire sortant Marc Vuillemot (ex-PS, aujourd’hui Gauche républicaine et socialiste), élu depuis 12 ans, en tête avec 23,02 %. Contrairement à ce qui était craint, le jeune candidat RN parachuté, Dorian Munoz, ne s’est hissé qu’en troisième position avec 15,61 % des voix, perdant les deux tiers de son électorat par rapport à 2014. Le docteur Luc Patentreger et sa liste d’alternative écolo et citoyenne à gauche « La Seyne verte et ouverte », soutenue par l’adjointe à l’urbanisme dissidente, Denise Reverdito (EELV), a pointé en quatrième position avec 13,84 %. Et enfin, Sandra Torrés, conseillère régionale LR, a fait 11,19 %. LR n’ayant donné l’investiture à aucune des listes de droite.
Quadrangulaire animée
Au premier tour, ils étaient huit candidats pour une ville de 65 000 habitants, avec une gauche divisée, une droite éparpillée et un RN censé tout déchirer… Au second tour, on part sur une quadrangulaire. Mais – surprise ! – la gauche s’unit, la droite se tire plus que jamais dans les pattes au risque de tout perdre et finalement le RN n’inquiète plus trop. « La droite a siphonné une partie de l’électorat RN, en prenant dans ses équipes d’anciens FN », analyse le maire sortant. « Nous sommes la seule liste sans résidus d’extrême droite », ironise Marc Vuillemot. En effet, la liste de Nathalie Bicais, qui va de Debout la France au centre, compte en son sein Damien Guttierez, candidat frontiste en 2014 et conseiller départemental, viré du FN pour avoir postulé à la présidence du parti contre Marine Le Pen en 2017. De son côté, Sandra Torrés a récupéré la conseillère départementale ex-FN, ancienne colistière de Guttierez en 2014, Virginie Sanchez. Elle aussi exclue du FN par le secrétaire départemental en 2016, ce dernier accusant un militant proche de l’élue de l’avoir giflé. En ce mercredi de marché, c’est elle qui distribue les tracts pour Sandra Torrès. Dorian Munoz, peu ancré localement a, quant à lui, déjà rendu les clefs de sa permanence.
Guerre à droite
Folle ambiance à La Seyne… Pour ce second tour, ce sont donc les deux candidates de droite encore en lice qui se tirent dans les pattes. Et elles n’y vont pas de main morte ! La conseillère régionale Sandra Torrés s’est mise les LR à dos en choisissant de se maintenir au second tour en s’unissant à l’autre candidat de droite Serge Daninos (8,83 %). Malgré les suppliques de Renaud Muselier, le président LR du Conseil régional. « La Région lui a proposé à peu près tout pour qu’elle se retire, elle a refusé… On ne comprend pas, à moins de vouloir nous faire perdre… », déplore Nathalie Bicais qui insinue un arrangement entre la dissidente et la gauche locale. Elle n’hésite pas à employer le terme d’« association de malfaiteurs » dans un entretien accordé à Var-Matin (18/06/20). Ce qui fait sourire à gauche mais met en rage Sandra Torrés. « Ces propos sont intolérables, je ne compte pas en rester là. J’ai déposé plainte pour diffamation », souligne l’élue régionale accusant à son tour un des colistiers de Nathalie Bicais d’avoir proféré des menaces à son encontre. Et de préciser : « Les LR ne m’ont pas virée, je suis une femme libre, moi on ne me tient pas. » Tension… Chacune assurant avoir tendu la main à l’autre… sans jamais s’atteindre visiblement. En ces temps de Covid, ce n’est peut-être pas si mal.
Fusion à gauche
A gauche on ne cache pas son plaisir : « A dix jours du second tour, dire que ce qu’il se passe à droite m’attriste serait faux-cul ! », sourit Vuillemot. Là où c’était loin d’être gagné au premier tour, un boulevard s’ouvre finalement devant sa liste recomposée pour le second tour. « Avec Luc Patentreger, on a mis une heure pour s’entendre et seulement dix minutes sur le contenu, nos projets n’étant finalement pas si éloignés que ça », explique l’édile sortant. « La différence c’était la méthode, son équipe, plus jeune, est plus dans l’échange et la confrontation. Ça donne du boost, là où on se sclérose un peu », poursuit-il. Luc Patentreger et Denise Reverdito ont quant à eux choisi de ne pas figurer sur la liste laissant la place justement à cette nouvelle génération. A droite, on lève les yeux au ciel face à cette fusion : Patentreger ayant fait campagne en critiquant le bilan Vuillemot et en le traitant de « maire bétonneur »…
Repartir pour un troisième mandat, Vuillemot avoue qu’il s’en serait bien passé mais son équipe manquant de « leader » lui aurait demandé de se réengager fin 2019. « Je n’y vais pas en marche arrière, mais je compte utiliser les pouvoirs de délégation pour assurer la succession et ne pas rempiler pour un quatrième mandat », prévient le maire sortant. Ce qui l’inquiète vraiment, c’est « que le citoyen n’utilise pas son droit civil et civique ». Seulement 35 % des votants se sont déplacés au premier tour. Covid oblige mais pas que.
« Les gens sont lassés, on a l’impression d’avoir une ville qui n’avance pas, le centre se meurt, y a rien qui change. Et la droite n’a rien de mieux à nous proposer qu’un pont piéton [référence au projet de Nathalie Bicais. Ndlr]…», explique Michel, Seynois de 50 ans qui n’a pas voté en mars et en fera de même en juin. « La Seyne est la seule ville de gauche et c’est la poubelle de la métropole », lance Papy, 88 ans, retraité de l’enseignement dédouanant ainsi le maire sortant. « Malgré sa position de deuxième ville du Var, La Seyne reste un village. Comme à Toulon où des gens de gauche votent pour Falco, ici il existe un électorat de droite républicaine qui ne votera pas pour des candidates ayant sur leur liste des élus FN », souligne Marc Vuillemot plein d’espoir. Et de conclure : « La seule véritable inconnue est de savoir si le 28 juin il fera beau ou pas ! »