Philippe Pascal lance l’alerte contre le RN
Après un tractage sous une chaleur écrasante au marché de Vedène, ce mardi 15 juin, Philippe Pascal se repose à l’ombre de la terrasse de l’Orient Express, un kebab au Pontet. « Je suis Sagittaire ascendant sagittaire, c’est un signe de feu… », assure-t-il le sourire aux lèvres. Candidat d’une large « union sociale et écologique » dans le canton du Pontet pour les élections départementales, il tracte presque tous les jours depuis déjà un mois.
On dit souvent qu’avoir deux prénoms porte chance. Elle lui a pourtant parfois manquée. Ex-inspecteur à l’URSSAF, il a mené un combat de sept longues années contre François Mariani (cousin d’un certain Thierry, le candidat du RN aux régionales), patron d’un hôtel de luxe qui a dirigé la CCI du Vaucluse. Après avoir lancé l’alerte face à de graves irrégularités, Philippe Pascal subit des menaces puis, sanctionné par son employeur, sombre en dépression. Mais, déterminé, il ne lâche pas l’affaire. Il vient de publier J’accuse l’URSAFF, retraçant sa bataille devant les tribunaux.
L’union plutôt que la défaite
Encarté à la Gauche démocratique et sociale, il conduit maintenant, aux côtés de Fabienne Vera (PCF), la seule liste opposée au conseiller départemental sortant, candidat à sa réélection : Joris Hébrard, le maire d’extrême droite (RN) du Pontet, ville où Thierry Mariani installera son quartier général de campagne le soir du premier tour. « La famille Mariani doit me détester ! », plaisante Philippe Pascal. Dans les rues vides – où seul des ouvriers qui s’interpellent en arabe s’affairent sous le soleil – il reprend rapidement son sérieux en fustigeant le RN, « un parti inhumain ».
Ayant tiré les leçons de leur défaite aux départementales en 2015, les gauches se sont rassemblées cette fois derrière Jean-François Lovisolo (PS), le maire de la Tour d’Aigues. Du PS à La France Insoumise, en passant par EELV, le PCF, et cinq autres partis de gauche et écologistes, se sont mis d’accord pour un « pacte de non-agression » sur 16 des 17 cantons du Vaucluse. Pour le plus grand plaisir de Philippe Pascal qui craignait que, si la gauche ne s’était pas entendue, l’extrême droite emporte le département.
François Goudet, « chef colleur » d’affiches, a proposé à Philippe Pascal de l’aider pour sa campagne après avoir lu son livre sur l’affaire François Mariani. Il partage cette envie d’unité : « quand on est d’accord à 90 % autour d’un projet centré sur la solidarité et l’entraide, on pourra s’entendre sur des sujets clivants qui provoquent des guerres intestinales dévastatrices à gauche. » Dans le canton du Pontet toute la gauche soutient Philippe Pascal et sa colistière. Même les maires et sénateurs de droites locaux ont renoncé à présenter une liste en incitant leurs électeurs à bloquer Joris Hébrard et le RN.
Antisocial tu perds ton sang-froid !
Malgré une mairie d’extrême droite, depuis 2014, il a pourtant l’air de faire bon vivre au Pontet. Les routes sont entretenues, les commerçants sont sympathiques, il y a de nombreux équipements sportifs… bref la définition même d’une prospérité tranquille. Mais Philippe Pascal brise cette jolie vitrine lors d’une visite du parc municipal en face de la cité Joffre. « Regardez l’état de la verdure ici » peste-t-il en montrant d’un large geste les haies non taillées et les herbes folles qui poussent sur les chemins. Le candidat aux départementales dénonce « une ville coupée en deux » par la politique de son maire, d’un côté les beaux quartiers de l’autre les logements sociaux laissés à l’abandon.
Un choix politique affirmé par Joris Hébrard dés le début de son mandat en supprimant la gratuité des cantines pour les plus précaires. « Les gens me disent que c’est difficile depuis cette mesure…, témoigne Philippe Pascal. Des fois, leurs enfants mangent un jour sur deux. Les élus du RN font tellement de clientélisme ! Ça fait plus de vingt ans que je vois comment se comporte le maire d’Orange (Ndlr, Jacques Bompard, maire d’extrême droite de la Ligue du Sud). Ils ne favorisent que leur électorat… »
Retour à Vedène, l’après-midi, pour une nouvelle séance de tractage devant la maternelle Les Jardins. « Les gens ne comprennent pas que le RN c’est le danger, regrette Fabienne Vera, la colistière de Philippe Pascal. Pourtant, ils s’en prennent aux cas sociaux, aux pauvres, aux mineurs migrants mais aussi à l’associatif : beaucoup vont sûrement voir leurs subventions coupées. » Entourée de parents venus chercher leurs enfants, la candidate confie avoir peur pour l’avenir de son deuxième fils dont le père est marocain. En distribuant ses prospectus, elle assène toujours le même message : « venez voter dimanche pour faire barrage à l’extrême droite ! »
Difficile d’anticiper les résultats du scrutin ce dimanche. Une certitude : avec seulement deux listes, il n’y aura pas de second tour. Le premier arrivé en tête sera élu. Joris Hébrard part avec plusieurs avantages. Il est le conseiller départemental sortant et le maire, réélu à deux reprises, dans la principale commune du canton. Tout au long de la journée, la majorité des personnes croisées déclarent ignorer la date des élections, avouent « ne pas avoir suivi » la campagne ou affirment ne pas souhaiter aller voter… Philippe Pascal, déterminé, continue d’espérer : « je pense que le RN est sûr de gagner mais il pourrait y avoir une surprise… »