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L’été arrive. Les nordistes aussi. Le sudiste, interloqué : « Qu’est-ce que vous venez f… ici ? » Il y a certes « le ciel, le soleil et la mer ». Pourtant à y vivre, on peut s’interroger. Mais c’est l’été. Au risque de la lourdeur, la presse sait se faire… plus légère. D’où, après celui des « villes à fuir », notre « palmarès de ceux qui défoncent Paca ».
Pierre Falga, spécialiste à L’Express de l’exercice, s’esclaffe : « Comme quand on fait « les 50 qui font la région » ! C’est vrai que, dans la presse, sportive mais pas seulement, c’est une tradition. Et pas qu’en France. C’est même un genre littéraire. Un exercice hautement subjectif ! L’intérêt, c’est de se doter d’un référentiel solide pour s’assurer du sérieux du classement. Mais aussi d’aller chercher des éléments rarement mis en valeur. Pour les élus, le cumul de mandats ou encore les condamnations… » La question du classement est suffisamment sensible pour que Pierre Falga ait eu droit à des retours de la part d’édiles : « Certains refont les calculs, d’autres vous invitent. Et avec les réseaux sociaux, c’est encore plus sensible ! »
Nos chers élus
Nos chers élus… Comment ne pas penser à eux ? Avec une section « hors catégorie » ! Par où et qui commencer ? Gaudin, pour l’ensemble de son œuvre comme pour le final rue d’Aubagne avec ses amis propriétaires de taudis ? Sa meilleure ennemie, l’Aixoise Maryse Joissains ? Prenons un peu de champ avec la multi-casquettes Martine Vassal, la présidente du CD 13 et de la métropole marseillaise qui préfère les églises aux cinémas. Ou son pendant à la Région, Renaud Muselier, le type qui a une « Cop d’avance » tout en faisant la retape pour la F1. Et que dire du « sinistre » de l’Intérieur Christophe Castaner ?
Ne faisons pas l’impasse sur ceux qui ne sont jamais très loin comme Guérini. Ceux qu’on n’arrive plus à classer, comme les macronistes ou le motodidacte niçois définitivement tout-terrain Christian Estrosi. Et n’oublions pas que Paca abrite le plus grand nombre de villes frontistes et parmi les plus belles figures du « RN ».
Mais, comme les « people », les « sportifs » et autres représentants de la « culture », ces cibles seraient presque trop faciles. En témoigne cette soirée au Théâtre de l’œuvre à Marseille consacrée à la « co-construction de l’action et des politiques publiques ». Et la mobilisation d’une foultitude de collectifs : derrière chaque grande figure, il y a des groupes, des réseaux, des petites mains. Et des acteurs, notamment économiques.
« Un exercice hautement subjectif ! »
Un terrain qu’explorent des chercheurs en sciences sociales qui se coordonnent actuellement pour le suivi des municipales. Mais pas simple d’en parler. Confidence anonyme de l’un d’eux travaillant sur le lien entre les milieux patronaux et politiques : « Ma recherche est en cours. Je ne veux pas « griller » mes sources si jamais elles se reconnaissent. »
Idem de la part d’un de ses collègues qui s’est cassé les dents sur les milieux industriels : « Quand tu ne peux même pas accéder aux archives et encore moins interroger qui que ce soit, tu ne peux rien faire ! » Ce qui ne l’empêche pas de se pencher sur la macronie ou l’entourage de Vassal, « fille d’un entrepreneur qui officiait à Mazargues, le fief de Gaudin. Et qui a, dans son entourage, Marc Gimenez, de Ricard, le président de l’Upe 13, Johan Bencivenga… »
Un Zéribi en cache un autre
Les milieux économiques sont eux aussi friands de classements. En témoigne « le magazine des 50 personnalités de Provence-Alpes Côte d’Azur ». 132 pages, 25 000 exemplaires, un magazine qui se veut « un support d’attractivité et de networking » pour cette région qui « doit devenir la Silicon Valley de l’Europe » ! Derrière ? Jamil Zéribi, le frère de Karim, l’ex-élu marseillais mis en examen et devenu depuis chroniqueur chez Cyril Hanouna. « A la base, je viens du monde associatif et j’avais monté un blog d’info sur Avignon. Et, en voyant Le Point ou L’Express faire leur classement, sans véritable transparence et avant tout pour vendre de la pub, on s’est dit qu’on allait faire notre propre classement pour mettre en valeur les acteurs et entreprises du territoire trop souvent oubliés. »
D’où, pour le palmarès régional, la sollicitation d’un « jury de personnalités qualifiées » : le patron de la CCI Jean-Luc Chauvin « pour l’international », Stéphane Sotto « pour la French Tech » ou encore le patron du théâtre Toursky Richard Martin « pour la culture ». Quand on lui demande quels sont les critères, Zéribi reconnaît le caractère très subjectif : « C’est comme pour le foot. Y a 50 millions de sélectionneurs potentiels ! Mais on peut faire confiance à notre jury pour bien connaître les acteurs dans chaque domaine. Notamment pour mettre en avant des personnalités qui ne sont pas forcément les plus connues ».
Malgré un lancement à « New York », le magazine est loin d’être à l’équilibre. Et Jamil toujours à la SNCF. Même s’il fait aussi, avec son associé, dans la com’ et la formation. Avec le soutien d’un député macroniste étonnant, Jean-François Cesarini, qui, non content d’être presque frondeur, n’hésite pas à jouer les comédiens dans le « Off » d’Avignon ou les « braqueurs » dans un clip de rap !
Alors, puisqu’aux plus riches heures du stakhanovisme, un fabricant de médailles pouvait lui-même être décoré pour sa productivité, bombardons Jamil Zéribi en bonne place de notre palmarès en tant que… fabricant de palmarès. Une problématique qui est loin d’être spécifique au sud-est comme le documente le passionnant travail du chercheur Fabrice Bardet sur Lyon dans la revue Metropoles.
A l’issue de ce petit tour qui invite à aller voir ailleurs si on y est, une pensée pour Bienvenue chez les Ch’tis, ce grand moment de cinéma. A la fin du film, Dany Boon lance : « Quand on arrive dans le Nord, on braie deux fois : quand on arrive et quand on repart. » Dans le Sud, c’est la même chose. Sauf qu’au lieu de pleurer, on a le sourire. Alors, merci qui ?