Sos Ravi !
Nous voulions ne plus jamais devoir l’écrire. Mais les faits sont têtus. Ce numéro pourrait être le dernier. Sans une mobilisation très rapide et massive de nos lectrices et lecteurs, celles et ceux d’aujourd’hui, d’hier et de demain, sans une réaction de nos « ami.e.s » sur les réseaux sociaux, sans un sursaut des passionné.e.s de la presse libre et de la satire, le Ravi ne poursuivra pas son aventure éditoriale. Et son association, la Tchatche, devra mettre un terme définitif à ses actions d’éducation aux médias et à ses projets de journalisme participatif…
L’enjeu n’est pas d’abord de préserver des emplois chichement payés – ceux de 6 salariés, les petits revenus d’une douzaine de dessinateurs et d’une poignée de pigistes. L’enjeu est démocratique. Il s’agit avant tout de préserver un espace de liberté singulier, construit pas à pas depuis dix-huit ans, dans une région, Paca, où les trois principaux titres de la presse régionale risquent de tomber sous la coupe d’un seul milliardaire : Xavier Niel. Un journal qui, sous la bannière du dessin de presse, mélange les genres en informant avec rigueur et irrévérence, en se faisant le porte-voix de ceux qui s’engagent dans les alternatives et en assumant des partis pris sans être partisan : les urgences démocratiques, écologiques et sociales. Une association pionnière dans l’éducation aux médias auprès des jeunes et de moins jeunes.
Une refonte éditoriale, pour aller vers une nouvel objet papier, encore plus beau.
L’enjeu est de défendre et de maintenir cet espace. De lui permettre enfin de réaliser sa refonte éditoriale. Pour aller vers un nouvel objet papier, encore plus beau. Vers une autre temporalité pour mieux articuler version imprimée et internet. Pour publier notre hors-série rassemblant le meilleur de 18 ans de dessins de presse. Pour raconter notre belle région de manière différente, en prenant plus de temps pour enquêter, en prenant encore plus de distance avec l’actualité.
Alors qu’à la « guerre » auto-proclamée contre une épidémie succède une guerre, bien réelle, en Europe, avant que ne reprenne une « guerre » économique au détriment une fois de plus des urgences sociales et écologiques, l’enjeu est aussi et surtout de ne pas renoncer au pouvoir d’informer et à celui – salvateur, précieux et si fragile – de rire !
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Malgré notre précarité, nous multiplions les succès. Le lancement de notre site, leravi.org, juste avant le confinement, nous a permis de surmonter une crise sans précédent de la diffusion dans les kiosques en augmentant notre nombre d’abonnés. Nous venons d’obtenir une relaxe face à un procès bâillon de la Chambre de commerce et d’industrie d’Arles, et une décision de principe de la Cour de cassation a validé le sérieux de nos enquêtes dans l’affaire Odel Var. La Tchatche, qui assure l’indépendance du journal, s’est auto-financée en 2021 à plus de 70 % : une prouesse dans le milieu associatif ! Le tribunal de Marseille vient d’acter très officiellement la fin d’un redressement judiciaire après sept années de bataille : une performance réservée à seulement 5 % de ceux qui, un jour, déposent le bilan.
Le risque des semaines à venir, c’est que nous retournions devant le tribunal pour être « liquidé ». Car si le Ravi et la Tchatche n’ont plus de dettes, ils n’ont plus également de trésorerie ! En 2021 aucune grande collectivité locale n’a soutenu le journal ou son association avec ses actions en milieu scolaire ou dans les quartiers populaires. Toutes investissent pourtant chaque année des millions dans la presse, surtout celle appartenant à des milliardaires, en y communicant ou en y finançant des partenariats. Toutes multiplient pourtant les déclarations d’amour pour la liberté d’expression, le pluralisme, le droit à la satire, l’éducation aux médias.
Nous avons des ressources. Celles que nous donnent plus de 1 500 abonnés. Celles de donateurs. Celles des partenaires – comme en 2021 le Fonds pour une presse libre, la Fondation abbé Pierre, la Ligue de l’Enseignement, la Fédération des centres sociaux des Bouches-du-Rhône, les Petits frères des pauvres, France active… – qui accompagnent nos actions. Celles des échanges non marchands, dans l’écosystème des médias pas pareils que nous défendons. Celles permises par des dizaines de collectifs et associations que nous contribuons à mettre en réseau.
Mais plus que jamais, notre journal libre a besoin qu’on finance son indépendance. Sans vos dons et abonnements, nous ne passerons pas l’obstacle. Ces 100 000 euros nous permettront de travailler enfin sereinement pendant les deux années à venir. Autre option : on arrête immédiatement. Mais nous n’exaucerons le rêve de certains élus que s’ils nous donnent 1 million d’euros !