Au-delà (et vers l’infini…)
Quand à l’aube de l’an 2000, I-télé (l’ancêtre de C News) a surgi, parmi les équipes de télé « classiques », l’émoi fut grand : des journalistes qui faisaient à la fois l’image, le son, le montage et la transmission ! Mais nul besoin de remonter au siècle dernier pour savoir que les journalistes peuvent être de véritables hommes-orchestres et savent être tout-terrain.
On ne parle pas des éditocrates et autres patrons de médias qui passent sans encombre d’un magazine à la radio sans oublier la télé. Mais de l’appétence et de l’intérêt pour un journaliste à changer de support. En tête, la participation de notre consœur de Mediapart Louise Fessard à La revue dessinée consacrée aux violences policières ou Marius Rivière, un des journalistes qui a contribué au consortium La grande vacance (auquel participe le Ravi), qui a choisi la BD pour parler de la centrale de Gardanne dans XXI.
Perma-lectures
Autre exemple ? L’initiative de Lucie Aubin qui a décidé de proposer à l’écoute la lecture d’articles du mensuel pour lequel elle est pigiste, L’Âge de faire : « J’ai eu cette idée à l’époque où je participais à la web-radio Radio Perma, avec l’envie de proposer des “perma-lectures” d’articles de médias qui nous étaient proches. Cela ne s’est pas fait. Mais, lors du premier confinement, on s’est dit à l’Âge de faire que c’était le bon moment pour tester cette formule. »
Pour l’heure, on compte une petite cinquantaine d’articles : portraits, enquêtes, reportage… « On choisit les articles pour leur sujet et non pour leur “musicalité”, précise-t-elle. Et pour l’instant, c’est une simple lecture. À la base, je suis journaliste, pas comédienne ! Mais on réfléchit à des lectures à deux voix et à enrichir les articles avec des podcasts. Car, quand on est journaliste, on a énormément de matière mais on n’en exploite qu’une partie alors qu’elle est pourtant intéressante. »
Si L’Âge de faire propose ce nouveau contenu gratuitement, trouver un modèle économique voire penser cette démarche collectivement titille nos collègues. D’autant que la sauce a l’air de prendre : « L’audience dépend du sujet. Mais les retours sont positifs. On peut “écouter” un article et faire autre chose. Et ça permet de décrocher des écrans ! »
Journalisme vivant
Pigiste notamment pour Mediapart, Jean-Baptiste Mouttet a décidé d’aller plus loin avec le concept de « journalisme vivant » : « Le numéro zéro, ce sera le 1er juillet à Urban Prod à Marseille. Il existe déjà Live Magazine avec des journalistes, des photographes qui montent sur scène pour parler d’une enquête, d’un reportage. Mais on est dans le registre du making-of. Là, l’idée, c’est, face au public, dans un lieu le plus ouvert possible, de raconter un article, en faisant intervenir des témoins et de la place au son comme à l’image. »
Notre confrère va s’appuyer sur une enquête déjà publiée. Celle sur l’évacuation du Vieux Port en 1943 et la plainte pour « crime contre l’humanité » : « J’ai choisi ce sujet parce qu’on a là des témoins qui ont l’habitude de raconter cette histoire. Mais, tout le reste est à inventer. Et l’envie, à terme, est de mettre en place un média en tant que tel. Avec des enquêtes inédites. Et des ateliers d’éducation aux médias afin d’aller à la rencontre de publics plus ou moins éloignés des médias, dans des endroits où l’on ne va pas assez : les quartiers populaires, les zones rurales… »
Pour ce projet, Jean-Baptiste, qui vient de créer l’association «Mediavivant», n’est pas seul : « Il y a une comédienne qui me forme. Un ingénieur qui s’occupe du son et de la lumière mais aussi un gérant de bar ! Le but, c’est de renouer avec le public. Il y a une vraie crise de confiance envers les médias. Et pour regagner cette confiance, il y a besoin d’un retour aux sources. À plus d’un titre. Là, quand on va faire appel à un témoin, une source, ça va permettre aux gens de voir d’où vient l’info. Concrètement. » Une démarche qui résonne dans la cité phocéenne qui accueille, en juin, une rencontre nationale des conférences gesticulées !