Transparence : le Printemps en clair obscur…
Au printemps, c’est bien connu, on se découvre ! Et c’est ce qui était promis et annoncé : avec le Printemps marseillais, fini l’obscurité, le manque de communication et vive la transparence, la participation des citoyens… Un an plus tard, c’est la gueule de bois.
Les dispositifs ne manquent pas. « Budgets participatifs » du socialiste Joël Canicave, « lundis de la transition » de l’écolo Sébastien Barles qui doivent déboucher sur l’expérimentation d’une « cité zéro » l’an prochain, mise en place des « comités d’initiative et de consultation d’arrondissement » sans oublier les « ateliers citoyens » du benjamin Théo Challande ou la volonté de développer l’open-data de l’élu du Parti Pirate Christophe Hugon.
Sauf que, comme le résume Arnaud Dupleix, élu société civile du 4/5 qui a démissionné après le remplacement de Rubirola par Payan : « Pour débattre, la base, c’est d’avoir les infos. Même quand j’étais élu de secteur, je n’avais pas accès aux annexes des rapports sur lesquels on nous demandait de nous prononcer avant le conseil municipal. Comment prendre position quand on n’a pas le détail ? »
Recours en justice
Les choses ne semblent pas s’être améliorées à en croire, début novembre, la tribune « Marseille, capitale de la transparence ? » interpellant mairie et métropole, estimant que « l’enjeu de la transparence semble toujours au second rang ». Comme le dénonce Arnaud Dupleix, « on a fait nombre de demandes de documents. Par exemple, pour les écoles, les diagnostics amiante, la liste des personnels, les rapports d’incidents… Et, alors que la Commission d’accès aux documents administratifs nous a donné raison dans 90 % des cas, nos demandes sont encore, pour la plupart, restées lettre morte ».
Et celui qui milite désormais dans le Collectif des écoles de poursuivre : « Normalement, la transmission des documents, c’est la règle, pas l’exception. » Les arguments opposés ? « La propriété intellectuelle, les données personnelles qui font qu’on se retrouve avec des documents caviardés… Ou le fait qu’on a affaire à des documents provisoires. Et quand on demande un document, on nous répond “open-data”. Ce n’est pas la même chose ! Face à une demande, la réponse peut être immédiate. Alors que l’open-data, ça va mettre des années… » En effet, la transmission de documents pourrait être instantanée, alors que mettre à disposition des données rendues exploitables par tous prend plus de temps.
Le pire, pour Arnaud Dupleix ? « La mise en place d’une commission “communication et ouverture des données” ! D’après la loi, chaque collectivité doit mettre en place une personne responsable de l’accès aux documents. En général, un agent de la collectivité. Ce qui est le cas à Marseille. Mais là, on rajoute une structure et on réintroduit le politique ! Si Gaudin avait fait ça, on serait vent debout ! »
Omerta
Sur les 303 élus interpelés, seule une douzaine a apporté son soutien à la demande des collectifs. Sur Twitter, Hugon (1) se dit « le premier frustré » tout en bottant largement en touche, préférant mettre en avant le lancement sur le site de la ville d’une page « Open Data » : « Les dernières avancée sur les données de la ville vont nous permettre de faire très vite de grand pas. » Commentaire à la Quadrature du net : « Très bien l’open-data. Mais nous, ce qu’on veut, c’est accéder aux documents que l’on a demandés ! » Fin novembre, sur les 40 demandes formulées, seules 4 ont abouti, 24 sont sans réponse et il y a eu 11 refus…
De fait, le rapport entre citoyens et élus est parfois rugueux. Comme ce membre du Collectif des écoles qui, confie-t-il, n’aurait pu assister à la visite ministérielle d’un établissement scolaire au nom, semble-t-il, de la « sécurité » et du « protocole ». Et l’on notera qu’en réaction à un article du Ravi sur les services de lutte contre l’habitat indigne où était interrogé un des anciens responsables, Dominique Dias, l’adjoint au logement Patrick Amico a commenté : « M. Dias ne fait plus partie des effectifs. Il n’est donc plus en mesure d’en être un quelconque porte parole ou analyste […] Ses jugements hâtifs n’engagent que lui. » Réplique de Dias : « Il y a un projet d’omerta à la ville de Marseille ? C’est ça la transparence promise par Payan ? »
En attendant, faute de réponse de la ville aux demandes de documents que la Cada a validées, les collectifs signataires de la tribune n’excluent pas d’aller en justice. Et tiendront les médias informés. En toute transparence…
1. Sollicité, Christophe Hugon n’a pas répondu à la demande d’interview du Ravi.