Une présidentielle très « primaire »
A croire que certains y prennent goût. Après le raz-de-marée de la primaire de la droite, même le député « bleu Marine » Gilbert Collard a plaidé pour des primaires… au Front national. Avant de se faire recadrer. Car à l’extrême droite, c’est primaire : la patronne, c’est la fille du patron.
En attendant, au PS, on s’active. Certes, Mélenchon, Macron ou Jadot (EELV) font bande à part, mais les organisateurs de la primaire de la « belle alliance populaire » sont volontaristes. « En 2011, on avait eu 2 millions de votants. La droite en a rassemblé plus de 4. Avec la démission (sic) de Hollande et la candidature de Valls, on sent que les gens veulent reprendre la main, assure l’Istréen Lionel Jaréma, en charge des primaires dans le "13". Et puis, avec Fillon, on a affaire à une droite dure, le choix est donc clair. »
Pour Cécile Muschotti, secrétaire fédérale du Var, c’est la candidature de Vincent Peillon qui ouvre des « perspectives. Entre Montebourg et Valls, il y avait un vide que Peillon vient combler ». Et Jarema de supposer que « la gauche de la gauche va vouloir venir voter pour éliminer Valls » tandis que Muschotti, elle, imagine « des électeurs de droite participer au scrutin parce qu’ils ne se retrouvent pas dans Fillon ».
Derniers préparatifs avant une campagne éclair. Dans le « 13 », toutes les villes devraient être couvertes avec des bureaux de vote. Idem dans le Var. Même dans les mairies FN ? « Oui, ils ne veulent pas être taclés là-dessus », note Muschotti. Mais, pour être présent à Aix-en-Provence, Marseille ou Toulon, le PS va devoir payer. Or, note la n°2 de la « fédé » du Var, « faute d’élus et de militants, nos moyens sont réduits au minimum ». Même tonalité dans le « 13 » : « Mais chez nous, pour voter, les gens n’auront à payer qu’un euro. Moitié moins cher que la droite ! »
Avec sept postulants à départager, à l’union régionale du PS, on joue prudemment la synthèse : « Notre candidat, c’est la primaire. Ce qui compte, c’est le processus. » Mais chacun a choisi son poulain. Après s’être tâté, Patrick Mennucci, le député PS marseillais, roulera pour Peillon. Et si sur l’aile gauche du PS, pour soutenir les Hamon, Montebourg, ce n’est pas l’embouteillage en Paca, derrière Valls, on trouve les députés du « 13 » Michel Vauzelle, Jean-David Ciot mais aussi le conseiller général Christophe Masse !
Commentaire du candidat du Front démocrate, Jean-Luc Bennahmias qui paiera « le champagne » s’il fait le « score de NKM » (NDLR 2,6 %) : « Vu la primaire de la droite, la participation devrait être au rendez-vous. Et comme la campagne est assez courte et les gens suffisamment proches, ça ne devrait pas être trop la foire d’empoigne. Le plus malheureux, c’est que tout ce monde-là bataille pour finir perdant. J’espère au moins qu’à l’issue, la recomposition de la gauche sera possible… »
D’autant qu’au PS, avant même la présidentielle, ce qui donne la migraine, ce sont les batailles très « primaires » pour les législatives. Avec des circonscriptions particulièrement retorses. Soupir d’un militant : « Si pendant les élections, le PS marseillais pouvait s’exiler au Frioul, ça nous ferait des vacances. » Et il n’y a pas que les bisbilles internes qui font tâche. Le soutien d’un Macron non seulement par toute une galaxie guériniste mais aussi et surtout par l’ancienne tête de liste du PS aux régionales, Christophe Castaner, fait grincer des dents. Mais le député-maire de Forcalquier (04) vient pourtant d’être investi aux législatives… par le PS !
Du côté de la France insoumise, la primaire, on n’en veut pas : « Ce n’est pas une question de leader mais de programme, martèle Marie Batoux. Ce n’est pas une primaire qui va effacer nos divergences. N’est-ce pas Valls qui parlait de gauches irréconciliables ? » En soi, la militante marseillaise du parti de gauche n’est pas « fan » de l’exercice : « C’est un rouleau compresseur. Avec la primaire de la droite, c’est comme si on avait déjà joué le 1er tour de la présidentielle. Avec l’obligation, pour les candidats, de faire synthèse. Or, pour la vie démocratique, on a besoin de candidats de rupture. »
Il n’y a guère qu’au PC où, après une consultation « populaire » et de belles divergences entre la direction et la base, on fait le grand écart, entre soutien mesuré à Mélenchon et recherche d’accords avec le grand frère socialiste pour les législatives. Histoire de sauver ce qui peut l’être. On appelle ça les besoins primaires.
Sébastien Boistel
Cet article a été publié dans le Ravi n°147, daté janvier, toujours diffusé chez les marchands de journaux. Retrouvez-y notre nouvelle séquence « élection » : 4 pages d’enquêtes, d’analyses, de reportages et de dessins…