Une pétition pour que le maire rempile
« Une pétition pour le maire ? Je veux la signer moi aussi ! », s’empresse Antoinette, 80 ans, en se jetant sur notre stylo. Dans les allées du marché du Beausset – petite commune varoise de 9000 habitants – José se demande plutôt si ce n’est pas tout simplement de « l’esbroufe politicienne». Il est vrai que d’habitude on fait plutôt signer une pétition pour que les élus démissionnent… Joseph Allal, retraité et fervent partisan du 1er magistrat, a réussi, lui, à récolter des signatures pour que le maire en place, Jean-Claude Richard (DVD) – qui dès le départ avait émis le souhait de ne faire qu’un seul mandat – se représente en 2014. « On me dit que ce n’est pas courant comme geste, note Joseph Allal. Mais quand on a un maire qui est un homme bien et pas un fou, on a envie qu’il reste ! C’est bien simple, les qualificatifs qui reviennent le plus souvent c’est "honnête" et "intègre" ».
Des impôts qui n’ont pas augmenté en six ans, une diminution de la dette (le ratio s’élève à 495 € contre une moyenne de 874 € au niveau national), des logements sociaux qui voient enfin le jour, des comptes administratifs excédentaires : le fan-club n’est jamais à court d’arguments pour défendre le bilan positif du maire. « Bien souvent, il enfile lui même la casquette de maître-d’œuvre pour faire économiser de l’argent à la commune ! précise Joseph Allal. A la mairie, on le surnomme le Charles-de-Gaulle. » Non pas parce que le 1er magistrat tombe en panne souvent et coûte cher comme le porte-avions tricolore, mais parce qu’il a fait carrière dans la Marine. Mousse à 15 ans, il reprend ses études et devient ingénieur spécialisé dans la sécurité nucléaire, puis intègre l’Ecole navale pour finir sa carrière avec un MBA (Maîtrise en administration des affaires)… Ce self-made-man de 66 ans, breton d’origine, vit au Beausset depuis 1989. C’est par intérêt pour son village d’adoption qu’il aurait accepté de rejoindre Josette Pons (UMP) sur sa liste en 1995, devenant adjoint à la sécurité, avant de démissionner pour des divergences d’opinions.
« Dans la Marine il est de bon ton de dire qu’à la retraite, pour s’occuper, on finira conseiller municipal !», ironise Jean-Claude Richard qui, méfiant avec la presse, accepte finalement de nous rencontrer. En 2011, il s’est senti « floué » par l’émission d’Envoyé spécial sur les décharges illégales du Var dont celle du Beausset (le Ravi N°110). Un montage de 54 secondes sur deux heures d’entretien avec, à l’arrivée, ses choix escamotés… « J’alimente régulièrement le dossier en justice pour bien montrer que cette décharge sauvage n’a en aucun cas l’aval et encore moins l’aide de la mairie », martèle-t-il. Avant de rajouter : « J’ai pour habitude d’assumer mes erreurs. Et je ne trahirai ni ma parole, ni ma conscience pour aucun strapontin que ce soit. Au risque d’être un peu différent dans le microcosme politique, cette différence je l’assume et rien ne me fera changer !» L’homme vit dans une petite maison, « comme le simple citoyen que je suis », n’est encarté nulle part et ne vise aucun autre mandat que celui de maire. « Je suis là pour les Beaussétants et pas pour faciliter la vie des promoteurs, poursuit-il. La légalité doit s’inspirer de la légitimité grâce à laquelle on a été élu, c’est tout. »
Bien sûr, Jean-Claude Richard n’a pas que des amis au Beausset ! Il y a six ans c’est Claude Alimi (DVD) – sûr de ne pas être élu – qui est venu le chercher pour lui proposer d’être à la tête de « sa » liste. Le but n’était pas que Richard reste… C’était mal connaître un Breton ! De fait, il se retrouve face à des colistiers qui jouent les opposants. Claude Alimi lui-même s’est vu retirer son titre de premier adjoint (1) et termine dans l’opposition (lire aussi en fin d’article le courrier qu’il nous adressé). Ce dernier vient d’ailleurs d’annoncer sa candidature pour 2014, faisant campagne contre le maire actuel. Quant à Claude Richard, il a donc décidé de rempiler ! Il devrait officialiser sa candidature lors d’une réunion publique le 11 octobre. Et Joseph de sourire : « Le maire m’avait dit qu’au-delà de 300 signatures il réfléchirait, je lui en ramène plus du double ! » Et si Jean-Claude Richard rêve d’une liste d’intérêt communal plus que de sensibilité politique, il garde la tête froide : « une pétition n’a jamais fait une élection ! »
Samantha Rouchard
(1) Confirmé par le jugement de la cour administrative d’appel de Marseille le 31 janvier 2013. Claude Alimi a été condamné à payer à la commune la somme de 2000 € au « titre des frais exposés par la commune ».