Starsky et Hutch en mode Derrick
Chargés d’encadrer la fédération du PS des Bouches-du-Rhône sous tutelle depuis mars, Alain Fontanel et Christophe Borgel n’ont pas usurpé leur surnom de « Starsky » et « Hutch ». Quand on les appelle, ça ressemble à ça : « Vous avez demandé la police, ne quittez pas… » Et il n’y a pas que les interviews que zappe le duo. Ainsi, ni Borgel, ni Fontanel n’ont participé aux « ateliers du changement » le 20 juin à Aix-en Provence, un grand raout militant avec Harlem Désir et l’indéboulonnable patron de la « Fédé », Jean-David Ciot (1).
Autant dire que, dans le « 13 », le changement, ce n’est pas pour maintenant. Et les pommes de discorde sont légion : Guérini et ses mises en examen, le rapprochement avec l’UMP du maire PS d’Allauch, Roland Povinelli, pour les municipales (2). Ou encore le micmac à Gignac où la section locale du PS est sous tutelle d’une « Fédé » qui l’est aussi. Et n’évoquons même pas le tour de passe-passe de Christophe Masse, candidat aux primaires après qu’il ait viré de la présidence du groupe PS au conseil municipal Patrick Mennucci parce que ce dernier était… candidat aux primaires (3) ! Pierre Orsatelli, de Renouveau PS 13, déplore que la tutelle ne s’occupe que « des primaires à Aix et à Marseille. Pourtant, cette tutelle, on l’a réclamé ! Mais, alors qu’on attendait d’elle une remise en ordre de marche du PS, rien n’est fait. Or, comment prétendre pouvoir l’emporter dans de telles conditions ? »
Joker !
Une question qu’élude Jean-Pierre Mignard, le patron de la haute autorité censée contrôler les primaires : « Quand une tutelle se met en place, un vide s’installe sans jamais être comblé. Mais, vu les moyens limités dont elle dispose, il est normal que la tutelle se focalise sur les primaires. » Or, avec des candidatures début juillet pour un scrutin en octobre, la tutelle a déjà du grain à moudre, ne serait-ce que pour les parrainages. En témoignent les premières bisbilles à Aix, où l’un des candidats, Jacky Lecuivre, est secrétaire de la section locale. « Or, entre un candidat qui a accès aux listings des militants et les autres, je vous assure qu’il y a une vraie différence, peste l’un de ses adversaires, Cyril Di Méo. Il aurait aussi fallu penser à encadrer les sections… »
A Marseille, ça persifle aussi. Ainsi, Joël Canicave, bras-droit de Marie-Arlette Carlotti, se souvient que, pour les primaires en 2012, « il y avait des réunions chaque semaine. Là, Fontanel et Borgel ne sont venus que trois fois ! Et l’on ne sait rien de l’organisation du scrutin. Quant au reste, comme la tutelle doit s’achever en mars, on sera en plein dans la campagne, alors… » De fait, à la Fédé, la tutelle, on ne la vit pas trop mal. On s’en sert même de « joker » face aux questions qui fâchent. Et, au quotidien, la « Fédé » reste toute puissante : « De quoi on s’occupe ? De tout ce que Fontanel et Borgel ne font pas », pouffe Ciot, chargé, sans rire, de chapeauter « les municipales hors Aix et Marseille »…
Eviter les vagues
La Fédé va même jusqu’à se mêler… des primaires ! « Elle a envoyé un mail aux candidats pour leur indiquer où adresser leurs parrainages. Sauf qu’elle a « oublié » deux candidats, Carlotti et Mennucci, soupire la marseillaise Cécile Alzina, chargée de la rénovation. L’explication ? Ces derniers, attendant d’avoir plus de précision sur la charte des primaires, ne l’ont pas encore signée. Ne l’ayant pas fait, la fédé a considéré qu’ils n’étaient pas candidats… » Même si, depuis, « l’oubli » a été réparé, Cécile Alzina déplore : « On voit là toutes les limites qu’il y a à laisser certaines responsabilités à une fédération sous tutelle. Car elle risque de ne pas les assumer. Ou de le faire à mauvais escient… »
Une situation qui ne surprend guère du côté de la « Fédé » de l’Hérault qui, elle aussi, a connu la tutelle (et Fontanel) : « La "Fédé", on l’appelait "le bunker". Autant dire que la mise sous tutelle était plus que nécessaire, se souvient Sophie Suply, membre de "Militer autrement". Mais, très vite, on s’est rendu compte que le but, ce n’était pas la rénovation. C’était d’éviter de faire des vagues avant les élections. »
Qu’importe : même si « la priorité, c’est de réussir les primaires », pour Harlem Désir, dans le « 13 », « la rénovation avance ». Et le patron du PS d’annoncer à La Provence que « le système Guérini est fini ». A Aix, face aux militants, il aura été plus prudent : « Il faut, face au clientélisme, faire le ménage. Mais il faut avant tout que la justice fasse son travail. » En clair, pour Renouveau PS 13, « Solférino veut surtout faire l’économie d’une exclusion. Le problème, c’est que Guérini, on va le payer collectivement. »
Sébastien Boistel