Macron : une marche… très légendaire
Contrairement aux pronostics, l’exode massif et instantané de socialistes réformistes en cas de victoire de Benoît Hamon à la primaire de la « belle alliance populaire » n’a pas eu lieu. A l’image d’une petite vingtaine de députés de la droite du PS, seule une poignée de figures de la gauche régionale a fait la bascule : Joël Giraud, député-maire PRG de L’Argentière (05) ; François-Michel Lambert, député « écolo » de Gardanne (UDE) ; les maires PS de Rousset, Jean-Louis Canal, et de Saint-Cannat, Jacky Gérard, un guériniste. Ils rejoignent les trois exilés de la première heure : deux autres proches du multi-mis en examen, Jean-Pierre Maggi et Michel Amiel, respectivement député-maire de Velaux et sénateur-maire des Pennes-Mirabeau, et Christophe Castaner, député-maire PS de Forcalquier, un fan de la première heure.
Suivant l’exemple de Ségolène Royal ou de proches de Manuel Valls, beaucoup se sont pour l’instant mis simplement en retrait. Ils scrutent les conditions du rassemblement promis par Benoît Hamon et certainement aussi le sens dans lequel le vent tournera. C’est le cas de Jean-David Ciot, député d’Aix-en-Provence et patron de la fédération des Bouches-du-Rhône, de Samia Ghali, sénatrice-maire des 15e et 16e arrondissement de Marseille, et de Jean-François Lovisolo, maire de la Tour d’Aigues et ancien premier secrétaire de la fédération du Vaucluse. D’autres encore, à l’image de la députée de Marseille et ancienne secrétaire d’Etat Marie-Arlette Carlotti, qui aurait proposé ses services à Emmanuel Macron selon Mediapart (26/01), ne donnent plus signe de vie. « On ne cherche pas de tête de gondole car c’est Macron qui prend la lumière », balayait avant le second tour de la primaire Christophe Castaner, le porte-parole de l’ancien ministre de l’économie.
Zones blanches
S’ils ne cherchent pas de « têtes de gondoles », Christophe Castaner et son protégé recherchent par contre des « forces de frappe », selon l’expression du député de Forcalquier, des réseaux sur lesquels s’appuyer. Mais hors des élus, socialistes et apparentés, les locomotives ne sont pour l’instant pas nombreuses. Côté politique, si l’UDI s’est en partie mise en marche derrière Emmanuel Macron chez les centristes, le Modem est lui encore dans l’attente de la décision de son leader Maximo. « Si François Bayrou est à 7 % ou 9 % dans les sondages, il ira », explique Childéric Müller, le leader du parti dans le « 13 ». Au dernier pointage, le 29/01, il plafonnait à 5 %…
A gauche, les forces sont très variables. Si le PRG Joël Giraud fait le boulot – il aurait beaucoup œuvré pour convaincre les maires du « 05 » de donner leur parrainage au fondateur d’En Marche ! – dans d’autres départements la situation est plus difficile. « Dans les Alpes-Maritimes et le Var, on est plutôt fragiles, c’est difficile de s’appuyer sur des forces de gauche », constate Christophe Castaner. « Dans le "06", Il y a un maire PRG d’une petite commune, des UDI et moi », reconnaît Marc Concas, ex PS adhérent d’En Marche ! et conseiller municipal de Nice.
Société civile très politisée
Hors politique, le tableau de chasse est également plutôt maigre pour l’instant. « Les médecins se posent des questions, comme les cadres d’entreprise », remarque le socialiste Jean-David Ciot. « Dans le Vaucluse, on a la French Tech d’Avignon et des acteurs de la culture », liste de son côté Christophe Castaner. Avant de préciser : « Mais pas de stars. »
Finalement, seules les Bouches-du-Rhône détonnent. Avec 90 comités locaux et près de 5000 adhérents revendiqués (l’inscription est gratuite), elles sont un des deux plus importants départements du mouvement avec le Nord [En Marche annonce 3200 adhérents dans le « 06 » et 2200 dans le « 83 »]. Surtout, le comité départemental s’appuie sur le réseau des chefs d’entreprises de PME et PMI. Une singularité due à la référente départementale, Corinne Versini, PDG de Genes’Ink, une société spécialisée dans la production d’encres pour l’électronique imprimée, siégeant au comité exécutif du Medef local. Une grosse moitié des quatorze membres du « staff » d’En Marche 13 vient ainsi du sérail.
Mais à bien y regarder, presque autant ont aussi un passé ou des engagements politiques. Trois ont des mandats locaux sous des étiquettes différentes (Modem, PS et LR), un autre a été encarté chez Les Républicains et le dernier fait partie du conseil fédéral du PS 13. On est loin d’un Macron porté par une foule d’anonymes… Qu’importe, la légende est « en marche » !
Jean-François Poupelin
Article publié dans le Ravi n°148, daté février 2017