La Méditerranée a-t-elle un avenir pour la Région post-Vauzelle ?
Au cours de ses mandats à la tête de la région Paca, le président Vauzelle (PS) avait fait des politiques internationales son « domaine réservé » et de l’espace méditerranéen un espace d’expression privilégié. Cet engagement remontait aussi loin que son entrée en politique. En août 1975, jeune avocat de 31 ans qui sortait du cabinet ministériel de Jacques Chaban-Delmas, il critiquait dans une tribune la politique méditerranéenne de la France en défendant « la culture méditerranéenne, bâtie autour d’une philosophie de la vie différente ». Un quart de siècle plus tard, parvenu à la présidence de la Région, il a tenté d’appliquer ce que la politiste Claire Visier appelait « une idéologie méditerranéenne ». Celle-ci s’est traduite par des projets de coopération, mais surtout sur un discours. Un discours plaidant pour des financements et une reconnaissance du rôle des Régions dans la coopération internationale. Un discours finalement impuissant à dire quelque chose du Printemps arabe et de son reflux. Et pour un discours, rester sans voix, c’est ennuyeux.
Vauzelle parti, la droite « estrozienne » est-elle disposée à quelque ambition à l’endroit de la Méditerranée ? Lors du dernier débat du Conseil régional avant les élections de décembre 2015, ses représentants avaient violemment critiqué une délibération sur les « nouvelles politiques internationales ». Dénonçant le coût et l’inutilité de la Villa Méditerranée, réduisant la politique méditerranéenne à des « opérations de communication », les orateurs de la droite promettaient dès leur élection « la défense des femmes au Maghreb » et une intensification du partenariat avec la « seule démocratie » du bassin, Israël.
En 2016, la Méditerranée est revenue sur le devant de la scène une décennie après les premières formulations de feu l’Union pour la Méditerranée. Mais le vocable des « projets concrets » et de la « territorialisation de la coopération » a été remplacé par les réfugiés des guerres de Libye, de Syrie, du Soudan ou d’Érythrée. Et le nouveau président Estrosi (LR) n’est pas resté silencieux face à cette détresse humaine. Le 25 mars dernier, par exemple, il proposait de « couler les bateaux des passeurs » (« quand ils sont vides » prenait-il soin d’indiquer). À ceux qui lui reprocheraient son imprécision, il répondait « à l’arme blanche, [avec] des couteaux, [pour] crever tous ces Zodiac qui sont de plus en plus utilisés pour traverser la Méditerranée ».
Quelques semaines plus tard, au sein de l’assemblée plénière, un rapport relatif à un appel à projet régional de « soutien au dialogue euro-méditerranéen » est mis au vote. Son objet, « la prévention des radicalismes ». S’en sont suivis de vifs échanges entre la droite et l’extrême droite sur « l’islamisme radical » et « l’intégrisme religieux ». La passe d’armes se conclura par la bruyante sortie de l’hémicycle de l’ensemble des élu-es frontistes. Ils ne verront donc pas la délibération du rapport n°49 portant sur la réduction de la participation financière à la Villa Méditerranéenne, exécutant le leg de la politique internationale de l’ancien président Vauzelle.
Tribune par Nicolas Maisetti
Tribune publiée dans le Ravi n°145, daté novembre 2016