Et en plus y’a Aïoli !
09h40
Sous préfecture de Draguignan. Les journalistes râlent : pas de table et une balustrade qui barre la vue sur l’hémicycle. « On le notera dans le journal comme ça on aura peut-être du matériel pour travailler la prochaine fois ! », lance Var-matin à la chargée de Com, penaude, qui finit par nous offrir des cafés. Le Ravi passera la séance debout pour observer les élus.
09h47
Richard Sert (FN-Fréjus), crête de coq et foulard autour du cou, est déjà installé. « Tu n’as pas liké mon porte avion ! », lance Jean-Louis Masson (La Garde), teinture auburn et cravate arc en ciel, à Marc Lauriol (St Cyr-sur-Mer) en tripotant les deux micros qui lui font face. Boucles blondes décolorées et rouge à lèvres pétant, Valérie Mondone (Toulon 2) fait son entrée. « C’est quel canton Barbarella ?», nous demande un des journalistes en jetant un œil sur notre trombinoscope. Josette Mimouni (Roquebrune-sur-Argens), fervente opposante du maire de Roquebrune DVD Luc Jousse, sort son ordi portable.
09h59
Le président du conseil départemental Marc Giraud (La Crau) et son binôme Patricia Arnould s’installent. Spécificité varoise : les deux sont mis en examen (lire encadré) ! Giraud finit de petit déjeuner sur son trône.
10h03
Dernier bout de viennoiserie ingurgité, il ouvre la séance : « Bienvenus à Draguignan ! » Laëtitia Quilici (Ollioules) est présente mais sans son binôme. Ferdinand Bernhard, maire (sans étiquette) de Sanary-sur-Mer, est absent sûrement trop occupé à gérer ses mises en examen (« favoritisme, détournement de fonds publics et prise illégale d’intérêts »)… La chargée de Com nous éclaire sur le placement des élus dans l’hémicycle : « ils sont assis par ordre alphabétique. » Dumont (St Raphaël) est donc entre Masson et Lassoutanie (Brignoles) et Di Giorgio (Toulon 4) entre Aycard (Sollies-Pont) et Cavallier (Roquebrune-sur-Argens) : en France, l’analphabétisme touche 1 % de la population. Principalement des conseillers départementaux, il faut croire !
10h12
Bouclage du projet de plan de prévention et de gestion des déchets non dangereux, plan inexistant jusque là. Cavallier explique le travail effectué avec sa verve d’agrégé de philo : « On a fait dans le Var notre révolution copernicienne. Au lieu de considérer que la Terre était au centre et que le soleil tournait autour, on a inversé le postulat… On s’est mis à raisonner différemment et à considérer qu’il y avait aussi la loi, qu’il y avait aussi à changer de conception en matière de volonté publique. Dans ce domaine et dans le Var, elle a subi quelques inhibitions pour dire les choses avec pudeur. » Giraud trouve bon d’ajouter : « La partie prévention et diminution de production des déchets sera une des priorités de ce plan, pas vrai François ? » Réponse laconique de Cavallier : « C’est ce que la loi et le bon sens imposent ! »
10h40
Accessibilité et transports. Giraud espère que les transferts aux Régions seront compensés intégralement par l’Etat, mais n’y croit plus trop : « Par expérience ça n’a jamais été le cas ! En 10 ans sur le social nous avons perdu 1 milliard d’euros. Je suis très à l’aise pour en parler car à l’époque il s’agissait d’un gouvernement de ma tendance politique. »
10h50
Partenariat public-privé pour la réalisation de trois collèges. « La Loi NOTRe va nous imposer de travailler en osmose et avec un peu plus de solidarité », lance Giraud à l’opposition qui arrive à placer sept fois « PPP » en deux phrases et votera pour. « Comme quoi des miracles peuvent arriver ! », ironise Giraud.
11h15
Modification du règlement intérieur lié à la Loi NOTRe. « Je me garderai bien de commenter personnellement l’article 71 ter, le simple fait de dire cela vous comprendrez le fond de ma pensée… »,lance Masson. Cet article prévoit une amende de 75 euros par journée d’absence d’un conseiller départemental. Rires dans l’hémicycle. L’élu d’opposition FN, Damien Guttierez (La Seyne-sur-Mer 1) insiste sur la charte de l’élu local « qui veille à prévenir ou à faire cesser tout conflit d’intérêt ». Il attaque frontalement Caroline Depallens (Toulon 4) et son association le CEDIS « largement subventionnée par le département ». L’élue affirme ne plus en être la présidente. [Ndlr : le site internet de l’association n’est donc pas à jour]. Giraud le stoppe dans son élan : « A un moment donné il faut savoir garder raison. Nous vous avons toujours traités avec beaucoup de correction. Essayez d’en faire de même. On ne cite pas de noms ! On n’est pas au café du commerce ! » Guttierez
enchaîne sur la condamnation du département à payer la somme de 625 000 euros à une association liquidée. «N’essayez pas de laver plus propre que propre !, tacle Giraud. Nous avons une majorité cohérente et unie. » Lors de son élection à la présidence, 4 élus de sa majorité ont voté blanc et 2 nuls…
11h23
Budget supplémentaire 2015. Il s’agit de voter 13 millions d’euros. Dont 9 millions qui concernent le RSA et son augmentation de 2%. « C’est assez confortable pour l’Etat de décider d’une augmentation et de la faire payer par d’autres », s’énerve Masson.
11h37
« Un budget supplémentaire qui témoigne de l’échec tant de votre politique que de votre gestion », tacle Sert qui est aussi adjoint aux finances de Fréjus dont il met en avant la bonne gestion, notamment de la masse salariale. Critiquant au passage celle d’Elie Brun, l’ancien maire (et ancien conseiller général) grâce auquel tout de même le FN a gagné les municipales. « Donneurs de leçon, autoproclamés compétents, ne se départant jamais de ce mépris envers les français qui nous soutiennent, les alliés de l’herpès voient désormais leur vernis craqueler », conclut-il sous les huées de la majorité. Le FN vote contre. Masson s’éternise en justifications et répète quatre fois que le « constat n’est pas alarmant ». Guttierez sourit. Dominique Lain (Le Luc) parvient quant à lui à tacler le FN en une phrase en précisant que si la masse salariale de Fréjus a baissé de 300 000 euros, celle du Luc (FN aussi), dont Lain est élu d’opposition, a augmenté de 740 000 euros ! « Je voulais corriger cet oubli », conclut-il. Face au FN, certains de la majorité vireraient presque rouge ! Le NPA s’est emparé de Christine Amrane (Le Luc) : « La crise c’est la faute aux subprimes ! ». Et Depallens a mangé Laguiller au petit déj : « N’oublions pas que derrière chaque allocataire du RSA il y a un être humain en souffrance ! »
11h59
Long soliloque de Giraud : « Souvenez-vous lorsque vous étiez à Toulon ! 1995-2001, c’était pas triste ! […] Fréjus ? Vous naissez, c’est votre premier budget ! […] Et Oui Elie Brun fait partie de mes amis et je ne vois pas pourquoi je dirais que c’est quelqu’un de pas fréquentable. » [ndlr : Peut être parce qu’il a été condamné à cinq ans d’inéligibilité pour prise illégale d’intérêts ?] 153 communes vous en avez trois, et vous avez trois cantons ! Un peu d’humilité, soyez gentils ! […]Je voudrais un peu plus de solidarité […] Je suis un homme d’avenir […]Vous êtes en campagne permanente ! Si vous nous faites des propositions, nous en discuterons. Nous ne sommes fermés à rien. »
12h14
« Moi, ce que je lis, c’est que Toulon a eu une bonne gestion financière », répond l’élu FN. « Vous le pensez vraiment ? Si c’est une lecture de votre parti, c’est sûr ! », lance Giraud. « Je viendrai vous voir, on fera une séance de lecture, renchérit Serre. On verra les résultats aux régionales dans le Var ! » Giraud s’exaspère : « Ici on n’a pas à parler des régionales ! Vous êtes piqué par la politique politicienne et moi je suis piqué par l’intérêt général ! On ne va jamais s’entendre ! »
12h28
La faim supplante le débat : « C’est l’heure de manger ! En plus y’a aïoli… Un plat parisien ! », lance le président. Masson expédie la dernière délibération concernant l’ouverture par anticipation des crédits. Pour Giraud, l’appel du ventre supplante aussi la concordance des temps… « On a travaillé jusqu’à midi et demi pour pouvoir aller déjeuner, parce que si on aurait dû [sic] revenir après l’aïoli, ça aurait été un peu difficile ! »
Samantha Rouchard