Des Russes sous les palmiers
Les Russes aiment la Côte d’Azur et elle le leur rend bien. Christian Estrosi, maire LR de Nice, ne cesse de multiplier les marques d’amitié à leur attention. Le 14 mars dernier, Nice et Moscou ont signé un nouveau programme de coopération. On pourrait y voir la suite d’une belle amitié historique, depuis l’arrivée de l’aristocratie russe au siècle dernier. Mais cette relation repose aussi sur d’importants intérêts financiers. Tourisme, investissement dans l’hôtellerie, la restauration, le luxe mais surtout dans l’immobilier, la communauté russe joue un rôle économique prégnant sur la Côte d’Azur.
« La Russie et la France ont des liens profonds culturels et d’amitié », affirme Hélène Metlov, présidente de la Maison de la Russie à Nice. Une relation historique qu’elle s’efforce de faire connaître au grand public mais qui ne semble plus trouver grâce aux yeux des Russes nouvellement installés.
Faire des affaires. Voilà ce qui les attire aujourd’hui sur la Côte d’Azur. Laurent Merengone a fondé le « Business Club France Russia » à Nice en octobre 2018. Une branche économique qui manquait selon lui : « On assiste à la création de petits commerces tenus par des Russes, comme des business plus importants dans l’immobilier, la restauration, l’hôtellerie, les services. (…) Ce sont plutôt des Russes jeunes, la trentaine, qui parlent anglais et français pour beaucoup d’entre eux, qui sont allés à l’université. »
Entre ces « nouveaux » Russes, Hélène Metlov évoque des réseaux de solidarité basés sur l’échange de bons plans, comme le très actif groupe Facebook « Круассан » (Croissant). Eleonora Larina, Russe arrivée sur la Côte d’Azur il y a six ans et fondatrice de l’agence Larina Translation, confirme cette forte entraide. « Il y a une véritable communauté russe. Parfois je fais la connaissance d’une personne russe et j’apprends qu’on a plusieurs amis en commun. Les liens entre nous sont chaleureux, on essaye de se soutenir. Par le biais de groupes WhatsApp par exemple. » Hélène Metlov relativise cette idée de communauté unie et sépare les Russes de classe moyenne des riches oligarques. « Il y a toute cette classe, que tout le monde ignore et qui se veut ignorée, qui a beaucoup d’argent et de choses cachées dans les plus beaux endroits de la Côte d’Azur. »
Ces riches Russes, Cécile Dumas, conseillère municipale PCF à Antibes, les voit s’installer sur le littoral antibois depuis quelques années. Ils acquièrent de coûteuses villas via des agences immobilières et ce qu’elle pense être des sociétés écran : « La plupart de ces transactions se font par Sociétés civiles immobilières enregistrées à Monaco, au Luxembourg, aux îles Caïman ou à Chypre. Tous ces pays-là ont un point commun : ce sont des paradis fiscaux. (…) Il y en a qui se font prendre à ce petit jeu-là, par les patrouilles du fisc. »
En mars 2019, Souleimane Kerimov, représentant du Daghestan à la chambre haute du Parlement de Russie, a été mis en examen car soupçonné d’avoir dissimulé le vrai prix d’achat de villas de luxe au Cap d’Antibes pour se soustraire à l’imposition en France. Une affaire qui pourrait amener la justice à se pencher sur les propriétés de nombreux oligarques russes sur la Côte d’Azur.