Sur la corde raide
Les semelles fondues par des cuves chauffées à bloc et les narines bercées à la poussière d’amiante, Eric Louis enchaîne les chantiers qui nécessitent des cordistes, de préférence sans le sou et prêts à tout. Il se déplace en camion là où l’envoie l’agence intérim. Ce qui lui permet aussi de braver les nuits gelées… Ces chroniques auraient bien pu rester la malice silencieuse d’un ouvrier solitaire. Seulement voilà, il croise la route de Quentin, bien plus jeune, et appelé à le rester, enseveli sous le poids de la crasse d’une cuve. Pas grand monde lors de la pose de la plaque funéraire. Patrons et médias étaient prévenus, pas venus. Alors il faut dire et publier. Donner une visibilité aux Cordistes en colère, l’association d’autodéfense des cordistes créée en 2018, qui édite ce livre. Entre Pôle Emploi et employeurs vicelards, le cadre du cordiste est traversé d’inimitiés systémiques. Ce qui rend d’autant plus fortes les rencontres alliées ! Comme cette fois où Eric finit de couvrir le toit d’une maison de retraite de pics anti pigeons. Ce soir-là, Michel, agent de maintenance, lui proposera en catimini de poser ses ailes fatiguées dans une chambre réservée aux visiteurs. Au milieu des silos et des fumées noires, des éclats de raison !
Chroniques sur cordes, par Eric louis, Editions Le Cordiste en colère, 80 pages, 5 euros. Bénéfices pour l’association Cordistes en colère, cordistes solidaires.