Scénario décroissant : Grippés volontaires !
La pandémie nous pend au nez, mouchés les politocrates ? Allez ! Sortez-la votre blague : « Et si on apprenait à la basse-cour des gestes simples d’hygiène comme se moucher à usage unique ou encore, éviter d’éternuer dans la figure de son interlocuteur ? »
Et bien non ! H1N1 c’est avant tout une histoire de choix. Moi, j’ai opté pour le tissu et je l’ai prêté : tous unis pour la pandémie (et pour le retour au lit !). Ah, celle-là on l’aura pas volée ! Il fallait travailler, travailler encore, additionner, démultiplier et « plus » disaient certains… Couac : on s’est bien usés, on s’est bien fatigués, on l’a tous chopée, d’ailleurs on l’a fait exprès ! On les a bien eus ! L’échange ça nous connaît, ça on sait faire. On va pas être radins, il fallait pas gâcher ce si précieux instant de répit qu’on pouvait maîtriser du local au global. Oui, la délocalisation c’est l’affaire de tout un chacun : une véritable gestion des excrétions corporelles. Prends-toi ça dans la face !
La rétorque politique est facile : limiter, encercler, contenir et éradiquer la grippe. La grippe ? Euphémisme : « les grippés volontaires », enfin les nouveaux récalcitrants au travail. – « Là, les gars, va falloir être bétons pour leur faire croire que travailler vaut mieux qu’être grippé. » – « Un plan d’alerte pandémique de niveau 6 fera l’affaire. Port du masque obligatoire, déplacements réglementés, commerces fermés, rassemblements interdits… »
« Les nouveaux récalcitrants au travail ! »
Et du global au local, moi, Varois, intermittent et grippé, je me retrouve sans travail et perché sur ma colline où mes poules qui picorent en liberté me narguent et semblent dire : « Tu vois ce que c’est la grippe maintenant, hein?! » « Vendues ! Rigole pas trop « cocotte », tu risques d’y passer avant Pâques. »
Chaque matin, j’attends le passage de Claire, la bonne amie du producteur de légumes de mon village, qui me dépose au bout du chemin de quoi subsister. Et alors ? C’est pas parce que c’est la pandémie que je vais bouffer des boîtes, non ?! J’attends la guerre pour ça. Faudrait pas se laisser aller et au pire, y’a les poules !
Peu d’argent en poche, je fais face à mon addiction tabacologique en fumant ce que j’ai pu faire sécher de mon jardin. De l’argent de toute façon plus personne n’en a, alors… Alors on fait des ardoises, on échange (et pas que la grippe), ça fait déjà un moment que les infusions de thym ont remplacé le café et la verveine le thé. Quant à la bière, une semaine aura suffit pour que le village soit à sec. Alors, on trouve l’ivresse dans quelques vieux bag-in-box de la coopé ou encore au fond des rares dame-jeanne du voisin qui troque son génépi contre de la viande, du poulet, pour l’instant surgelé.
Surgelée la viande bien sûr : les bergers sont encore en estive et sont ravitaillés par l’armée, pas moyen de négocier un agneau à crédit en attendant l’embellie. La viande, c’est ce dont je me passe le plus facilement quoique, certains matins, je me le saignerais bien ce con de coq ! – «Tais-toi ! Le réveil matin, c’est fini ! On n’en a plus besoin, imbécile ! »
A défaut de pouvoir se rassembler sur la terrasse du bar, un forum dont l’adresse internet a été photocopiée et distribuée par Claude le postier nous sert de support pour nos échanges officiels. Sans argent, évidemment. Et puis à partir de 22h, en grand secret on se réunit tous chez Doumé et contre toute interdiction c’est… poulet à volonté ! (fallait pas se moquer).
Petite ombre au tableau : si ça dure, je vais devoir trouver une solution pour passer la frontière des Alpes-Maritimes et rejoindre ma princesse cloîtrée dans le Comté de Nice, en plein centre ville, encerclée par des poulets qui eux, bien vivants, maintiennent parqués les citadins bien grippés.
Vive l’épidémie de grippe A 2009 ! Enfin… à la campagne…
Un texto d’un collègue m’annonce le dépôt de bilan de la compagnie : j’ai plus qu’à me reconvertir dans… l’élevage de poulets ! Ou peut-être directement dans la police… à Nice.
BoZzzo