Rentrée politique

septembre 2006

La porte s’ouvre, Bogosse retient son souffle, resserre sa cravate et entre…

Bogosse : Et regardez monsieur Lélu, pour la rentrée, je me suis fait beau comme un sou neuf. (il montre en sautillant d’excitation sa cravate et son costume neuf Giorgio Armani)

Lélu : (Il soupire et murmure pour lui-même) Ah ça ! Pour être beau, si ça tenait qu’à ça… Il serait déjà président l’autre andouille. Dix ans d’efforts pour se récolter ça, c’est malheureux quand même…

Bogosse : Et puis regardez (il ouvre un magnifique cartable aux couleurs de la mairie et le vide sur le bureau de Lélu). J’ai acheté un agenda Clara Morgane, avec un poster en page centrale (il cligne de l’?il en direction de Lélu qui baille). Ça c’est du pur produit local (il regarde la fameuse photo avec l’?il l’humide).

Bogosse (continuant son déballage) : Et vé, la trousse en forme de cigale avé la fermeture éclair qui fait ksss ksss… On se croirait dans la pinède !

Lélu : Oui mais enfin, Bogosse, on va pas faire campagne juste avec ces… gadgets (il lève les mains au ciel avant de les laisser retomber, l’air épuisé).

Bogosse (tenant fièrement un objet qui semble être son arme ultime) : Et là, y a rien là ? Imaginons que vous vouliez gommer quelque chose (il joint le geste à la parole, et gomme avec vigueur ce qui s’avère être le discours sur lequel Lélu travaille depuis six heures du matin). Alors, là qu’est-ce que ça sent ? (Il brandit sous le nez de Lélu ce qui ne ressemble maintenant plus que de très loin à du papier.)

Lélu : Ça sent la défaite, voilà ce que ça sent !

Bogosse : Mais non ! Ça sent le pastis ! Génial non ? Et puis j’ai aussi les chouineuh-gommeuh à la lavande.

Lélu : (Il fond en larme) Mais qu’est-ce que j’ai fait pour mériter ça ?

Bogosse : Monsieur Lélu, toujours émotif. Une senteur du pays et hop ! Une petite larme. Ah quelle leçon, quel grand politique !

Cette fois Lélu explose. Il attrape la cravate de Bogosse et s’y mouche bruyamment. Assisté de sa fidèle secrétaire, il empoigne Bogosse par le revers de son costume et le jette hors de son bureau.

Bogosse (un peu dépité) : Heureusement que je lui ai pas montré mes capotes aux couleurs de l’OM…

Du côté de Lopozan, l’ambiance est plus calme, quoique… Bloqué depuis une heure dans sa décapotable, il a eu tout le temps d’évaluer l’état d’avancement des chantiers du tram en cours dans notre belle ville.

Lopozan : (Il chante à tue-tête pour accompagner la chanson diffusée par son autoradio qui couvre le bruit des klaxons) O sole, mioooooooooo… (Perdant patience) Et voilà, bloqué ! Juste le jour où j’ai rendez-vous avec les écolos. Putain, ils vont encore me faire caguer. Eux, ils viennent en bus et ils sont toujours à l’heure. Ca, y vont pas me rater. Les verdâtres, c’est vraiment pas rigolo tous les jours de faire de la politique avec eux. Chaque fois ils me demandent si je consomme des produits éthiques. J’en sais rien moi. Je mange au restaurant ou chez ma mère. Alors, éthique ou pas, je me goinfre. N’empêche, avec leur chantier qui emmerde tout le monde, y vont avoir chaud aux fesses à la mairie. Mais le problème, c’est que ces angoisses vivantes de verdâtres, le tram y sont pour. Et l’autre là, il l’a achetée la route (il déboîte furieusement pour gagner 10 mètres et doubler une voiture immatriculée 75). Non mais ! Ils se croient où, ceux-là !

Propos de rentrée, recueillis par ondes sympathiques par Sam Ravi et décryptés par Guillaume Hollard et Elsa Poutchkovsky

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