Rejet Généralisé d’une Politique Persécutrice
Est-ce parce que, d’après le grand Charles, les Français seraient « des veaux » que le programme de l’UMP a été confié au ministre de l’Agriculture ? Au « campus » de l’UMP à Marseille, Bruno Le Maire s’est montré en tout cas bien évasif sur ses travaux. Pas facile, en fait, de rendre la rigueur « glamour ». À un an de la présidentielle, la révision générale des politiques publiques fait l’unanimité contre elle. À gauche de la gauche, rien de surprenant. Pour le communiste Jean-Marc Coppola, la RGPP, c’est une « machine de guerre contre les services publics » qui se traduit par « moins d’école, moins de soins, moins de justice, moins de sécurité et donc moins d’égalité et de démocratie ». Et le vice-président de la Région de prévenir : « Dans notre collectivité, la RGPP n’est pas la bienvenue. » Lors de la discussion du budget 2011, le socialiste Jean-Louis Joseph, chargé des finances, a tonné : « Il n’y aura pas de RGPP à la Région ! » Soumises elles aussi à la diète, les collectivités territoriales ont permis au PS de faire ses armes contre cette politique. La feuille de route pour 2012 est donc claire, même si certains, lors des primaires, ont pris des libertés. Hollande promet 60 000 enseignants ? Aubry, alors en campagne à Marseille, avait dégainé ses 10 000 flics.
Grimace de Sébastien Barles, porte-parole marseillais d’Europe Ecologie Les Verts : « L’urgence, c’est la santé, l’éducation, la culture… Quant à la sécurité, il faut privilégier la prévention et le social. » Il n’en fustige pas moins la RGPP, au contraire : « Cette approche managériale des politiques publiques, sous couvert de remettre l’usager au centre, n’a qu’un but : la réduction des dépenses publiques. Or, on ne peut d’un côté décentraliser et de l’autre refuser de donner plus de compétences et de moyens aux collectivités locales. » Même à « l’extrême centre », on n’est pas en reste : « Ce n’est pas du gauchisme mais si l’on trouve de l’argent pour les banques, on peut le faire pour les services publics », assène Christophe Madrolle, secrétaire général adjoint du Modem. Et de promettre, pour 2012, « le remplacement de tous les départs en retraite de fonctionnaires, au nom de la continuité du service public… À condition qu’il y ait un véritable service minimum. »
« Pas question de faire une pause ! »
In fine, il n’y a qu’à droite qu’il y a des surprises. La plus grosse vient du FN. Après des années à casser du sucre sur le dos des fonctionnaires, Marine Le Pen vient de leur écrire une « lettre » de réconciliation. Pour elle, « il faudra tourner la page de la RGPP et donner à l’État les instruments juridiques et techniques de sa puissance ». Mais pas question de se lancer dans « une course aux effectifs », sauf, bien entendu, dans la police, seul domaine où, au niveau local, les élus du Front daignent évoquer la RGPP. Un peu comme leurs collègues de l’UMP…
De fait, l’exemple vient d’en haut. S’il « assume », même Sarkozy a avoué avoir « conscience des limites » de cette politique, évoquant de possibles « assouplissements » du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux. « Il faut des évaluations, cette règle n’ayant pas vocation à perdurer dans l’éducation, la sécurité ou la justice », reconnaît le député-maire Bernard Reynès. « Mais pas question de faire une pause ! » Le monsieur « commerce de proximité » de l’UMP admettrait donc que les services publics s’éloignent ? « C’est gênant mais, face à la crise et à la dette, il n’y a pas d’autre choix que de rationnaliser, même dans la police, poursuit-il. Depuis 2007, les maires ont de nouvelles compétences en la matière. À eux de s’en servir… » Vu sous cet angle, la RGPP, ça sent le Far West. Cela dit, des cow-boys pour des veaux, c’est l’idéal, non ?
Sébastien Boistel