Peut-être la fin du mortel ennui…
21h, un soir de semaine à la Seyne-sur-Mer. Quelques voitures passent en trombe sur le port. Le vent soulève quelques papiers gras abandonnés. Les quelques restaurants du centre-ville font 3, 4 tables, sans plus. Même les Kebabs sont désertés. La ville semble abandonnée. « Revenez demain, ce sera pareil, sourit avec fatalité Cédric Psiala, chanteur du groupe Petite Musique. La Seyne est morte. Ils sont tous partis dans les bars de Sanary, Six fours ou même à Toulon. Le samedi soir, à la limite, ils vont à la villa Bivona, la boîte de la Seyne. C’est normal, ici, il n’y a rien pour les jeunes. » Pour une ville de près de 60 000 habitants, dont un bon tiers a moins de 25 ans, la Seyne-sur-Mer dispose d’un seul grand équipement culturel. Avec une programmation axée sur les arts de la rue, le cirque contemporain et le théâtre tout public, le théâtre Europe n’est pas tout à fait destiné à la jeunesse seynoise. Celle-ci ne peut même pas oublier le désert des tartares dans lequel elle vit en se faisant une petite toile. Car la ville ne compte aucun cinéma. « Le problème n’est pas seulement seynois, poursuit Cédric Psaïla. Voilà 20 ans que les priorités des élus dans le Var sont le tourisme, l’extension immobilière et un cadre de vie adéquat avec l’âge des retraités qui viennent s’installer. Si, en plus, on rajoute le coma collectif suite à la fermeture des chantiers navals, vous obtenez la Seyne aujourd’hui : une zone où seules quelques lueurs subsistent. »
« Une zone où quelques lueurs subsistent »
Le Café théâtre de la 7ème vague fait incontestablement partie des phares culturels de la ville. Ouvert depuis 10 ans par une équipe de bénévoles réunis autour de Gérard Rinaldi, Alias Tonton Dgé, ce petit lieu propose 70 soirées spectacles par an, allant du concert au théâtre en passant par les one man show. Une formule qui marche puisque l’association compte 1500 adhérents. Mais comme la salle ne peut contenir que 50 spectateurs, il est quasiment impossible d’improviser une soirée à la 7ème vague. Autre lieu : les Chantiers de la lune (Lire également page 9). Mais cette salle d’exposition, de concert et de débats attire plus une population allant de 30 à 70 ans reconnaît Jacqueline Herrero. Comme au café-théâtre 7ème vague, elle organise des soirées-spectacles avec repas compris. « C’est la seule formule qui nous permette l’équilibre, car un concert ou une lecture de poésie seule ne parviendra jamais à attirer les Seynois », souligne-t-elle. Un peu plus loin, au bout de la place de la lune, juste en face de la porte des anciens chantiers navals, se trouve le Damero. A l’intérieur, de la chaleur, du monde, des sièges design de coiffeur devant des miroirs stylisés et plus loin des ordinateurs. « C’est un concept cyber bar coiffeur, avance Damien, qui tient le bar ce soir-là. Au départ, on cherchait juste une grande surface, 200 mètres carrés pour installer un salon de coiffure. Mais comme le local avait aussi une licence IV, on a monté un bar. » Seul troquet ouvert tous les soirs jusqu’à 3 heures du matin, le Damero propose depuis 2 ans des concerts quasiment tous les soirs. « Sur la Seyne, il existe au moins une cinquantaine de formations musicales dans tous les genres, affirme Cédric Psaïla. Ce sont des lieux comme cela qu’il faudrait ouvrir pour amener les jeunes à faire vivre la ville. » Un souhait que semble avoir entendu la mairie qui a incité l’association toulonnaise Culture plus à organiser la première édition de son festival Couleurs urbaines à la Seyne fin avril. « C’est simple, la Seyne-sur-Mer a été la seule ville du Var à accepter notre projet de festival, explique Beligh Gueraz, de Culture plus. Nous espérons 2 500 spectateurs chaque soir et si ça marche, nous souhaitons pérenniser le festival sur la Seyne. » Bientôt la fin de la dépression ?
Jean Tonnerre