Medicine man

novembre 2007
Grâce aux subventions du Conseil régional présidé Michel Vauzelle, ancien maire de la ville, et au Conseil général des Bouches-du-Rhône, Arles a retrouvé une certaine santé financière. Mais comme la saignée, la perfusion est loin d'être un remède miracle.

En quittant Arles pour le Conseil régional en 1998, après seulement trois années comme premier magistrat de la ville, Michel Vauzelle l’avait promis aux Arlésiens : il ne les abandonnerait pas. Force est de constater qu’il a tenu sa promesse. Son site internet (1) ne manque d’ailleurs pas de le rappeler, notamment en ce qui concerne les « grands chantiers » : grâce au président PS de la Région, Arles a obtenu la rénovation des arènes et du théâtre antique, la création de l’Institut universitaire de technologie et l’installation de Supinfocom, école d’infographie, une participation à l’élaboration et au financement du plan Rhône pour la protection contre les inondations… 10rv46red_vauz.jpg Cette liste est cependant loin d’énumérer tous les bienfaits du député de Camargue pour son ancienne commune. Comme tous les Français, ce dernier a en effet son petit jardin secret. Certains collectionnent des timbres, le président de la Région, lui, verse des subventions à Arles. Chacun son truc. « A partir de 1995, les comptes ont été mis en difficulté par les grands travaux de Jean-Pierre Camoin [maire RPR de 1983 à 1995] et par l’augmentation fulgurante des frais de personnels après l’élection de Michel Vauzelle. De 2001 à 2004, sur quatre budgets, le déficit cumulé de la ville a atteint 19,61 millions d’euros. Le Conseil régional l’a couvert à hauteur de 10,29 millions d’euros grâce à des subventions », assure Jean Vernet, président du groupe d’opposition Alliance Arles (UMP). Comble de bonheur pour la ville antique, Jean-Noël Guérini, président du Conseil général, partage la même passion que son collègue socialiste. « Sur la période, le Département a de son côté apporté 6,89 millions d’euros », poursuit le conseiller municipal. Soit un total d’un peu plus de 17 millions d’euros.

En 2005, la préfecture et la Chambre régionale des comptes (CRC) Paca ouvrent enfin les yeux et mettent le holà à ces pratiques. Sans pour autant freiner l’enthousiasme des deux patrons des collectivités : en 2006, ils proposaient encore 2,8 millions d’euros de subventions chacun. Une véritable addiction ! Ou simplement un très banal clientélisme, autre drogue très répandue chez nos élus locaux ? Martial Roche, refuse cette interprétation. « Grâce à la personnalité de notre maire, les aides arrivent de façon naturelle. Celles de Michel Vauzelle sont une aubaine supplémentaire », explique le plus sérieusement du monde le premier adjoint en charge de l’économie et du commerce.

Flatterie, langue de bois, sénilité ? Simplement une mauvaise habitude, à l’image de celle de leur ancien maire. « Les élus trouvent ça normal et logique. Les services de la ville sont même devenus de véritables chasseurs de subventions : beaucoup plus de dossiers arlésiens ont été subventionnés par rapport aux autres communes », constate Catherine Levraud, ex-Verte adjointe à l’écologie, conseillère régionale de la majorité de… Michel Vauzelle et… candidate sans étiquette, pour l’instant, aux élections municipales.

La situation d’Arles est cependant loin d’être idyllique. Commune la plus grande de France (75 000 hectares) et pauvre, elle ne maîtrise pas sa politique. « La ville n’a pas de ressources pour les domaines où elle est seule compétente, comme le logement : plus de 50 % de ses habitants ne paient pas d’impôts et à cause d’une taxe professionnelle trop élevée, les entreprises préfèrent s’installer à Tarascon, Saint-Martin-de-Crau ou Nîmes », regrette Jean Vernet. « Certains dossiers, comme le Parc naturel régional de Camargue, sont ultra politisés. Au point où même les services techniques de la Région refusent de s’y impliquer réellement », complète Catherine Levraud.

Seule satisfaction pour l’ex-Verte : « Il n’y a pas de surfinancement. » Ce qui ne semble pas nécessaire. Bien qu’elles aient dû abandonner leur passion, les deux collectivités locales sont toujours très généreuses envers la ville de Michel Vauzelle : le Conseil régional vient d’injecter 20 millions d’euros dans les anciens Ateliers SNCF et le Département gère depuis 2003 le musée de l’Arles antique. Un jouet voulu par Jean-Pierre Camoin, qui lui coûte 2,7 millions d’euros par an. Quand on aime (les voix ?), c’est bien connu, on ne compte pas…

J-F P.

1. www.michel-vauzelle.fr

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