Le « roi Arthur » vassal des promoteurs
« On me dit que je brade le patrimoine, mais j’en ai rien à foutre du patrimoine qui ne rapporte rien ! » (1). Le jour de l’inauguration du parc La navale, le premier aménagement de son programme de réhabilitation du site des anciens chantiers de La Seyne-sur-Mer, Arthur Paecht, alors maire (UMP), cherchait ses mots pour mettre fin, à sa manière, à l’accusation qui le poursuivait depuis le début de son mandat : vendre la ville aux promoteurs immobiliers.
En vain. Le sujet était au cœur des dernières municipales, comme le rappelle le grand gagnant du scrutin, le socialiste Marc Vuillemot (cf notre entretien page ci-contre). De fait, de 2001 à 2008, les projets ont fleuri à La Seyne. Dans notre palmarès des bétonneurs de Paca (2), la seconde ville du Var arrive en deuxième position des communes préférées des promoteurs, derrière Marseille, et en tête pour les groupes Constructa et Eiffage (respectivement 7 et 5 programmes immobiliers) (3). Le tout sans un logement social parmi les réalisations du centre ville alors que plus de la moitié de la population est non imposable…
Durant son mandat, le « roi Arthur » n’a pas hésité : il a carrément révisé le Plan local d’urbanisme (PLU). « L’emprise au sol est désormais quasi totale et la hauteur des bâtiments a été relevée », explique Guy Mouisse, journaliste à La Marseillaise. Marcel Barbéro, élu d’opposition et colistier d’Arthur Paecht, réfute les accusations : « Le PLU a été élaboré en conformité avec la loi de 2000 de Lionel Jospin relative à la solidarité et au renouvellement urbains. Elle préconise une densification de l’habitat en cœur de ville pour protéger le mitage dans les milieux naturels. Le préfet l’a salué comme un modèle d’application de la loi. » Et l’ancien secrétaire de la section PS locale de tacler : « Il a été voté à l’unanimité. » Sous entendu, par Marc Vuillemot, alors dans l’opposition…
« Je prends mes responsabilités en tant que maire »
Le nouveau maire socialiste a finalement initié une nouvelle révision du PLU. Mais pour l’instant, il doit faire avec l’héritage de son prédécesseur. Ce qui réserve quelques surprises. « Sur l’atelier, un protocole d’intention de vente, sans indication de prix, a été rédigé à l’intention d’une société en même temps qu’était lancé l’appel d’offre. Quant au nouveau port, le groupement qui a remporté le marché avait pourtant proposé la redevance la plus faible et les anneaux les plus chers », s’étonne Janine Foglino, une UDF élue en 2001 sur la liste Paecht entrée en dissidence en cours de mandat. Interrogé par l’ancienne conseillère municipale en conseil, l’ex-maire UMP n’a pas louvoyé : « Je prends mes responsabilités en tant que maire. »
Courageux. D’autant que ce n’était pas la première fois. Dans un courrier du 28 juin 2002, Marc Pietri, PDG de Constructa, demande expressément à Arthur Paecht « la prise en compte [de ses] projets dans le PLU en cours d’élaboration. » Deux au moins ont vu le jour sur le site des anciens chantiers : un hôtel trois étoiles et la résidence Grand Horizon. Nouvelle surprise de Janine Foglino : « Curieusement, le fils d’Arthur Paecht a emménagé dans Grand Horizon. » Rendue publique entre les deux tours du scrutin, la missive a rencontré un franc succès ! Sauf auprès de Marcel Barbéro, qui dément : « Les règlements du PLU s’appliquent à tous, il ne peut y avoir de négociations en sous-main ! Arthur Paecht est foncièrement honnête et droit ! » « Foncièrement » semble être un qualificatif particulièrement bien adapté au « roi Arthur » aujourd’hui déchu…
J-F. P.