Des proches du maire de Nice harcelés par la justice

mai 2004
Jacques Peyrat, sénateur maire de Nice, a bien du souci avec ses gardes du corps. L'un d'entre eux va comparaître devant le tribunal correctionnel de Nice le 21 mai prochain pour « violence volontaire en réunion », l'autre est au centre d'une enquête préliminaire ouverte par le parquet et visant certains marchés de sécurité de la ville de Nice. Les deux sont les plus fidèles lieutenants de Peyrat et assurent sa sécurité depuis des années.

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Le 11 décembre 2000, en marge du premier meeting de campagne du candidat Peyrat, des manifestants avaient été violemment pris à partie par des sympathisants du maire. Plusieurs manifestants meurtris finirent la soirée aux urgences et portèrent plainte les jours suivants. Parmi la dizaine d’assaillants, Patrick Vilardry fut le seul à être formellement reconnu, prouvant par là l’inconvénient d’être une star. Car M. Villardry, fidèle de Jacques Peyrat depuis l’époque où celui-ci militait encore sous l’étiquette du FN, est une star : pompier, maître-chien, il est de toutes les catastrophes naturelles, de tous les tremblements de terre. Mais c’est grâce à la télévision qu’il toucha au faîte de la gloire lors d’un mémorable passage à Interville. Depuis 2001, il est conseiller municipal de Saint-Laurent-du-Var. Pour l’heure, cette gloire est bien encombrante et vaut donc au valeureux pompier une comparution prochaine devant le tribunal correctionnel.

Pour sa défense, M. Villardry arguera, certificat médical à l’appui, qu’il a reçu plus de coups qu’il n’en a donnés, et qu’il s’est trouvé non seulement meurtri dans sa chair mais surtout profondément choqué, au point d’aller vomir dans les toilettes de la salle Leyrit et de quitter celle-ci avant même que son champion ne prenne la parole. On a connu M. Villardry plus vaillant, notamment quand il menaçait une mère de famille qui manifestait son opposition au festival de musique militaire de la violer, « elle et ses enfants ». D’ailleurs, ses affirmations ne seront corroborées par personne, ni même par les témoignages d’employés municipaux sympathisants du maire et présents dans la salle – témoignages sollicités pourtant par M. Villardry. Nul doute que ce mensonge, ainsi que la concordance des dépositions des manifestants, fut pour beaucoup dans la décision du procureur de renvoyer le pompier devant les juges.

Le pompier porte le chapeau

Pour autant, les plaignants ne sauraient se contenter de la mise en cause du seul Villardry. Ils étaient bien une dizaine avec lui ce soir-là, qui se sont réfugiés à l’intérieur de la salle à l’arrivée de la police, celle-ci refusant alors de les interpeller. Patrick Villardry promettra un temps d’en donner la liste, mais n’en a rien fait semble-t-il. Il n’a pas non plus sollicité leurs témoignages pour sa défense, et Jacques Peyrat prétendra ne pas connaître ceux qui ont pris la sienne ce soir-là. Pourtant, certains, comme Francis Moya, se sont exposés stupidement à une éventuelle confrontation en portant plainte, prouvant par là qu’il avait participé aux échauffourées ; sa plainte fut, heureusement pour lui, classée sans suite. Francis Moya est, par ailleurs, le gérant de deux sociétés de gardiennage, Contact et Riviera Sécurité, bénéficiaires de nombreux marchés publics de la ville de Nice. D’autres ont été croisés dans la rue, photographiés lors d’un conseil municipal, sans déclencher plus de zèle de la part des enquêteurs. Enfin, plusieurs témoignages et quelques plaintes ont directement mis en cause le maire de Nice qui aurait envoyé ses troupes à l’assaut dès son arrivée sur les lieux du meeting. Interrogé par le juge, M. Peyrat a nié les faits et a maintenu qu’il avait été assailli, qu’il avait même eu très peur et que les forts à bras qui traînaient par là, et qu’il ne connaît pas, n’ont fait que le défendre. Mais dans la salle du meeting, le soir même, il n’hésite pas à en remettre une couche, souhaitant, en parlant des manifestants, « qu’ils soient encore là quand nous sortirons, ça nous permettra de nous détendre ».

Gilles Mortreux

Suite aux événements de la salle Leyrit, Gilles Mortreux a porté plainte contre X pour « coups et blessures ».

Autre histoire de marchés publics

Avec Patrick Villardry, Antonio Genovese est l’autre soutien indéfectible du maire de Nice. A tel point qu’à peine élu en 1995, Jacques Peyrat s’était fendu d’une lettre comminatoire à tous ses adjoints, déjà citée dans Le Ravi n° 1 (juillet 03) et reproduit ci-contre. C’est ainsi que M. Genovese avait pu obtenir pour ses sociétés, Team Antoine Genovese (TAG) et Pak Partner, un certain nombre de marchés publics dans la sécurité, mais également dans la buvette. Malheureusement, ses sociétés vont rapidement péricliter, mettant dans l’embarras la ville de Nice, comme l’écrivent les rapporteurs de la Chambre régionale des comptes. Ces rapporteurs s’étaient par ailleurs étonnés de cette prolifération de sociétés dirigées par un même individu ; ils s’étaient surtout étonnés de ce que les services de la Ville n’aient jamais fait le lien entre ces différentes sociétés et ne se soient pas montrés plus sourcilleux sur leurs garanties financières. La lettre du maire à ses adjoints ne les incitait pas, il est vrai, à faire du zèle.

La Chambre régionale des comptes s’étonne, mais la justice fronce les sourcils. Suite à l’article du Ravi, le parquet a ouvert une enquête préliminaire sur cette malencontreuse lettre. « Elle est encore en cours, nous a confié le procureur de Montgolfier, et la police judiciaire, étant maintenant libérée de l’affaire Vialatte, elle va pouvoir s’en occuper plus sérieusement. »

Gilles Mortreux

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