Des blindés pour la biodiversité
En pleines Calanques, aux portes de Carnoux-en-Provence, sur près de 1500 hectares est implanté le quartier militaire de Carpiagne. C’est là que le 4ème régiment de Dragons, une unité de cavalerie, s’entraîne et maintient ses blindés, pouponnant particulièrement ses chars Leclerc. De vrais bijoux : super high-tech, moteur diesel, 1500 chevaux. Une espèce menacée par la création du parc national des Calanques programmée en juin 2011 ? Pas si sûr…
Un arrêté ministériel dit de « prise en considération », datant du 30 avril 2009, stipule que 322 hectares du quartier militaire pourraient être classés en « cœur de parc national ». Et ce n’est pas tout ! D’autres espaces du camp seront proposés par le GIP (Groupement d’intérêt public), qui préfigure le parc national des Calanques, en aire optimale d’adhésion (AOA). A ce jour, aucune demande de retrait n’a été faite par le ministère de la Défense…
La présence du quartier militaire de Carpiagne semble moins « naturelle » depuis juillet 2009, après l’incendie qui mit le feu à près de 1300 hectares de garrigue et de pinèdes. Pourtant, tout au long des phases de concertation du GIP, très peu de voix se sont élevées contre le régiment de blindés. Les associations d’usagers se mobilisent en priorité pour le maintien des activités douces en plein air. « On n’est pas au fond du Groenland. C’est un parc périurbain (…) Les militaires, ce n’est vraiment pas le cœur du problème », affirme Bernard André, président Des Calanques et des hommes. Et Denyse Ricard-Maubon, présidente du Collectif un parc pour les Calanques d’enfoncer le clou : « On est obligé d’accepter ce qu’on nous donne, c’est ça ou rien ! »
Moins consensuels, les Verts, marqués par l’incendie de l’été 2009, ont demandé la fermeture du camp, en octobre dernier, lors du conseil d’arrondissement de la mairie des 9ème et 10ème arrondissements de Marseille. « Avec la clôture du camp, l’État donnerait un bon exemple. Il ne peut pas accepter le parc national sans en mesurer les conséquences… », martèle toujours Pierre Sémériva, vice-président Vert de la communauté urbaine de Marseille.
Maintenir ou non le camp de Carpiagne, pour la direction du GIP, la question… ne se pose pas ! « À titre personnel, je n’y vois aucune contradiction », a déclaré Guy Teissier, président du GIP dans La Provence (4 février 2010). « Cela fait longtemps que les militaires sont implantés sur le site qu’ils gèrent plutôt bien », complète Lionel Royer Perreaut, son directeur de cabinet. En plus du rôle moteur qu’il joue dans la création du parc national des calanques, Guy Teissier porte de multiples casquettes. Maire UMP des quartiers sud de Marseille, il est aussi député à la tête de la Commission de la défense nationale et des forces armées. « La volonté du ministre de la Défense, Hervé Morin est de faire en sorte que les armées aient une vraie politique de développement durable », a-t-il déjà souligné (La Provence, le 4/02/2010).
Et pour preuve ! Au camp de Carpiagne, 300 moutons et quelques dizaines de chèvres broutent sur les deux berges… Visiblement peu sensible au caractère « durable » de nos forces armées, Sébastien Barles, directeur de campagne d’Europe Ecologie lors des régionales, préfère faire de l’humour que de sortir la grosse artillerie : « Le site de Carpiagne doit être repensé. Vu sa situation, le bâtiment pourrait servir de point d’accueil avec reconversion des militaires en éco gardes. »
Alice Papin