L’enfer de Berre
Un drame familial martégal. Un roman surtout, qui suit Jessica – une jeune femme un peu perdue – et son fils de trois ans, deux gamins attachants, son grand-père et son meilleur collègue qui squattent leur calen jusqu’à plus soif (de pastis) pour tenter de pêcher les muges et faire de leurs œufs la fameuse poutargue. Bien d’autres encore, des fantômes qui hantent ce bout de terre et de mer embué par les fumées des torchères de la pétrochimie où osent se rendre les touristes l’été.
Précision des détails, rythme, parlé Marseillais jusqu’à la lie… Sigolène Vinson, ancienne avocate devenue chroniqueuse à Charlie hebdo (rescapée des frères Kouachi) et désormais installée dans le coin, nous fait passer un an mélancolique à coups de voyage en Nevada dans un décor qui pourrait être aussi beau qu’il est apocalyptique.
« L’opinion de Jessica ne variait pas sur ce point, la pétrochimie rendait malade. » Cancers et leucémies côtoient la peur, le secret mais aussi un attachement profond à cet étang pas comme les autres. Au moment où, dans la vraie vie, 14 riverains du pourtour – dont certains luttent contre la maladie – poursuivent en justice plusieurs gros industriels du coin pour « trouble anormal de voisinage ». Des gens pudiques, comme dans ce triste roman. Raison de plus de l’acheter, c’est l’ami photographe Franck Pourcel qui signe la couverture de l’ouvrage.
Maritima, par Sigolène Vinson, éditions de l’observatoire, 299 pages, 20 euros.