"Un projet qui suscite motivation et volonté chez les jeunes"
Avec le covid et le confinement, comment s’est organisé le programme J2R cette année ?
Karim Rahali : Tout le pari était de maintenir un minimum d’activités autorisées sur l’ensemble de la Fédé et des équipements sociaux. Tout en tenant compte du contexte et avec un protocole à tenir. Avec aussi des moyens spécifiques et financiers à apporter à chaque équipe. L’idée, de manière générale, c’était comment, tout en restant à distance, assurer une continuité des programmes, notamment sur la question de l’action des identités multiples.
Ça n’a pas été trop difficile de tout réorganiser au dernier moment ?
K. R. : La seule organisation à laquelle on a pensé c’est de demander aux animateurs s’ils étaient d’accord de se saisir de l’action, de faire des propositions durant l’été et d’apporter la logistique pour chaque structure en fonction de ses propositions. D’habitude, l’été sort du programme car c’est une période très fatigante pour les équipes et où l’on est très accaparés. Normalement il y a toute une programmation de séjours sur ce temps estival. Les animateurs ont été force de propositions avec des programmes qui tenaient la route. On a vérifié qu’ils soient bien dans les clous des objectifs du projet. Et on a surtout veillé à ce que les stages créatifs aient une partie théorique en proposant de la formation avec la présence d’intervenants spécialisés.
Chloé Bernard : On a repris les thématiques que l’on aborde normalement sur le parcours, lors du weekend au Frioul et des journées de formation habituelles. Mais ce sont les animateurs qui ont choisi en fonction des thématiques qu’ils devaient aborder sur leurs chantiers. L’Huveaune et St Joseph devaient travailler sur le thème des déchets et ils ont gardé ce sujet-là. Pareil pour la Gavotte-Peyret avec la migration. Andy à Bompard travaille habituellement sur le sport et la santé mais, à la demande des jeunes, il a abordé cet été la question des violences sexistes.
Est-ce que les jeunes se sont démotivés quand ils ont su qu’ils ne pourraient pas partir cette année ?
C. B. : Je n’ai pas trop l’impression. Mais s’ils se sont adaptés cette année, pas sûr qu’il en soit de même si on n’est toujours pas en mesure de partir l’an prochain. On remarque au niveau national que pour les jeunes inscrits dans le programme J2R, le voyage est toujours source de motivation, et pas seulement pour ceux des centres sociaux.
K. R. : Dans cette phase de formation il y a quand même comme espoir pour les jeunes de concrétiser et de partir en voyage. La difficulté que l’on risque de rencontrer si l’an prochain on vit la même crise sanitaire c’est qu’on ne pourra pas recommencer sur le même modèle que cette année. Par exemple, La Solidarité devait partir avec La Viste en Tunisie pour travailler sur le nettoyage du littoral, on espère que ça pourra se faire en 2021…
En quoi J2R transforme les jeunes que vous suivez ?
K. R. : Au niveau de leur comportement, du discours, du regard sur l’autre. Motivation et volonté, c’est ce que suscite chez les jeunes la question de l’interculturalité et de l’engagement. À la Solidarité, on avait des problèmes de mixité, filles et garçons, aujourd’hui j’ai la nette impression que ce programme J2R nous a permis de débloquer la situation. Sur l’ensemble des activités, j’ai des filles et des garçons, ce qui n’était pas le cas avant. On sent que, désormais, ils partagent.
C. B. : Le fait aussi que des centres sociaux se mélangent ça apporte beaucoup. Ce que les jeunes de l’Huveaune et de St Joseph ont préféré, au delà de l’activité en elle-même, c’est de pouvoir partager avec des jeunes d’autres quartiers. C’est qu’apporte aussi le weekend au Frioul normalement.
K. R. : Tous les programme que l’on monte consistent à les faire sortir de leur environnement habituel pour les mettre en immersion. Et là tu réussis à faire faire ce que tu veux aux jeunes, reprendre les bases de savoir-vivre en collectivité, s’accepter les uns les autres… C’est un peu un défi de pouvoir se mélanger, ça montre une ouverture d’esprit et vers l’extérieur de la cité.
Pouvez-vous nous dire deux mots de la WebTv J2R ?
C. B. : L’idée c’est de créer un dialogue entre les jeunes. Ça l’était avant le Covid et ça l’est d’autant plus aujourd’hui. C’est une sorte de plateforme vidéo où les Français, les Tunisiens, les Marocains et les Algériens vont pouvoir diffuser les vidéos qu’ils auront créées avec leurs éducateur.trices. Il va y avoir une ligne éditoriale où pendant trois mois les jeunes vont travailler sur une thématique commune. Cette année l’Algérie fait partie de J2R mais à cause de la crise politique et sanitaire c’est compliqué à mettre en place. Grâce à la WebTV ils vont quand même pouvoir participer et s’exprimer en postant des vidéos. S’ils ne peuvent pas bouger et si on ne peut pas aller les voir, au moins ils auront cette fenêtre-là. Le but c’est que les jeunes se parlent entre eux et que ce soit interactif. On veut que ça devienne un média. La WebTV devrait être lancée pour mi-décembre. On est en train de voir comment enclencher des ateliers vidéos avec des jeunes qui sont enfermés chez eux et qui ne peuvent sortir que pour aller à l’école. Il y aura aussi ce qu’on appelle le multiplex. Qui là s’adresse aux éducateur.trices sous forme d’atelier d’échange de pratiques professionnelles sur les quatre territoires.
Propos recueillis par Samantha Rouchard