Du château au bungalow
« Tout le monde est inquiet. On a l’impression que l’on vend les bijoux de famille ». Et cela ne réjouit pas Paul Massabo, membre du Syndicat national des journalistes (SNJ) chez Var Matin. L’Agence centrale de Nice Matin, du même groupe, vient de vendre ses bureaux. « Pour 2 millions d’Euros, précise Paul Massabo. L’agence de Toulon est également en vente, 3 millions. La suite, ce sera peut-être le vaisseau-amiral de Nice Matin… Reste à savoir si c’est pour remettre à flot les titres, ou pour les revendre. » Grâce à la publicité institutionnelle – Région et Conseils Généraux en tête – les groupes Nice Matin et La Provence ne sont pas déficitaires. Mais la Comareg, si. C’est elle qui édite le gratuit « Paru-Vendu ». L’ardoise du GHM qui possède tous ces titres, contractée pour les acquisitions passées, s’élève à 150 millions d’Euros. Alors, pour sauver le navire, les manœuvres se multiplient.
Avec une nouvelle recrue, Dominique Bernard, venue punaiser aux murs ses diplômes. Une sainte trinité : maîtrise de Droit, Sciences Po, HEC. Dominique Bernard est entré dans les ordres du business en 1982, chez Campari, pour prendre goût au calice et en devenir directeur général. En 1989, les nuages se scindent et un cône de lumière se dessine. Miracle, les magnats des médias Jean-Louis Servan-Schreiber et Jean Boissonnat apparaissent à « Saint Bernard » qui se convertit alors à la presse et dirige la division magazine du groupe Expansion. En 1994, il parachève l’œuvre des encyclopédistes des Lumières et prend la direction des éditions Atlas pour refourguer aux bambins, numéro par numéro, vertèbres de tricératops et briques du château de Robin des bois. Après Europe-Régies, le groupe Média-Publications et Comexposium, GHM le nomme au poste de directeur général en décembre 2009. Saint Bernard est assis à la droite du père – ou plutôt du fils – Philippe Hersant, président du directoire. L’idée céleste ? Vendre les locaux par un leasing qui permet, pour certains, de vendre, tout en continuant à occuper.
« On nous explique que les ventes vont servir à financer des projets de développement comme le changement du parc informatique ou le développement du portage (sic), témoigne Serge Mercier, élu au comité d’entreprise de La Provence. L’on ne parvient pas à savoir, si Hersant vend pour renflouer les caisses ou si véritablement La Provence vend pour financer ses projets. » En janvier, Planète Médias, le bulletin paroissial du GHM, indiquait que Dominique Bernard était avant tout « soucieux du résultat que l’on doit à son actionnaire ». Depuis, on murmure le nom de Bolloré en évoquant un éventuel rachat par le prince du cash-flow, ami de Christian Estrosi. Une chance, pour ceux qui dénoncent l’omniprésence de l’OM et du RCT. Il y aurait enfin des articles. Sur la moto.
Jean-Baptiste Malet