L’UMP pour un tri sélectif
La première semaine du recyclage des ordures s’est tenue du 12 au 27 juin, mais depuis longtemps, le Sud excelle dans une autre forme de recyclage, celui des élus d’extrême droite. Les succursales de plusieurs entreprises spécialisées dans la chose, le RPF de feus Charles Pasqua et Jean-Charles Marchiani et « la droite » de l’inénarrable Charles Millon, se sont longtemps disputés une matière première abondante, celle des hommes politiques prêts à taire leur conviction pour sortir enfin du caniveau dans lequel ces mêmes convictions les cantonnaient jusque-là.
Si l’on excepte Guy Teissier, ancien responsable du Parti des forces nouvelles et dont le recyclage date déjà de la fin des années 70, l’un des premiers à bénéficier d’une virginité toute neuve offerte par le RPR fut Jacques Peyrat, sénateur-maire de Nice. Mais l’habit ne fait ni moine ni l’élu républicain, et Jacques Peyrat a su montrer à tous ses anciens camardes de parti que l’on pouvait parfaitement découdre l’étiquette FN et garder le vêtement. Le pli était pris, la voie ouverte, et ce d’autant plus que l’élection à la présidence du conseil régional, en 1998, allait montrer que nombre d’élus de droite faisaient peu de cas des principes républicains et de leurs convictions, si jamais ils en eurent. Plutôt que des les citer, louons ceux qui, à l’époque, préférèrent rester dans l’opposition en refusant de coucher avec le diable : François Léotard bien sûr, qui depuis a fait le mur mais que l’on finira par regretter, Jean-François Mattéi qui, en tant que médecin, connaît les ravages de la peste, et Jean-Claude Gaudin, ce dernier n’ayant pas toujours fait preuve d’une telle constance.
C’est par la suite que le recyclage connu son apogée. Se voyant offrir la possibilité de se racheter une virginité à moindre coût, plusieurs élus FN, dont MM. Tarelli, Crépin, Gost et François, sacrifièrent amis et convictions pour rejoindre les rangs d’une droite qui, à chaque ralliement, devenait de moins en moins républicaine. Ces transfuges connurent des fortunes diverses, et peu d’entre eux aujourd’hui sont encore conseillers régionaux, prouvant par-là qu’il existe peut-être bien une justice immanente, ou bien que les électeurs se laissent moins facilement que prévu prendre pour des cons. Ou encore, que la droite n’est guère reconnaissante : ainsi de Jean-Pierre Gost, haute figure du FN à Nice, qui renia plusieurs fois le nom de Le Pen pour un strapontin que l’on ne lui a jamais proposé. D’autres eurent un parcours plus sinueux, comme Max Baeza. Sous l’étiquette FN, il se fait élire au conseil régional en 1986, et Jean-Claude Gaudin, qui s’est fait rayer sa voiture le matin même, lui accorde même une vice-présidence. En 1995, il suit l’exemple de son mentor Peyrat et renonce à l’étiquette infamante pour un poste de 3e adjoint à la mairie de Nice. Après, on perd sa trace : certains affirment l’avoir vu au RPR, d’autres jurent l’avoir croisé à l’UDF. En 1998, on le retrouve chez Charles Millon, puis, peu après, dans l’entourage de Charles Pasqua. Est-ce un retour d’age ? On l’a dernièrement vu renouer avec ses amours de jeunesse et présider le club Aviso 06, qui entend promouvoir les mérites de la Marine.
Le recyclage s’opère maintenant sous le label UMP, nom d’un développement durable de la droite dans la région. Le dernier à en profiter est Daniel Simonpieri, élu maire de Marignane sous l’étiquette FN avant de se rallier à Mégret, et à qui il a suffit de battre un autre candidat FN aux dernières cantonales pour retrouver une honorabilité que l’on ne lui soupçonnait pas.
Gilles Mortreux
