Lendemains qui déchantent
« Il n’y a aucune combine stratégique ou financière, seul un PCF fort permet des avancées sociales et démocratiques ». Après avoir défendu mordicus la candidature unitaire de Marie-George Buffet, et malgré la gamelle de cette dernière, Jean-Marc Coppola, secrétaire de la fédération des Bouches-du-Rhône, récidive. Et persiste : « Des candidats communistes ou soutenus par le PCF seront présents dans les 40 circonscriptions de la région ». La décision peut surprendre. Les deux derniers députés communistes de Paca – Frédéric Dutoit à Marseille et Michel Vaxès autour de l’Etang de Berre – sont en effet sous la menace des candidats de leurs anciens partenaires socialistes. Par la voix de Patrick Mennucci, le PS a été catégorique : « Il n’y a plus aucune raison de conserver le PCF sous assistance respiratoire ». Pourquoi n’avoir pas tenté de faire revivre l’ancienne dynamique unitaire ? Réponse lapidaire de Jean-Marc Coppola : « Il aurait fallu un accord au sommet sur un programme et une démarche. Ca n’a pas été le cas ». « La LCR voulait présenter des candidats partout, même là où ceux proposés par les communistes pouvaient être considérés comme bons, et de son côté le PC n’a pas voulu discuter », corrige Rémy Jean, ancien porte-parole de José Bové issu de la LCR, qu’il vient officiellement de quitter.
Malgré l’entêtement des communistes canal historique, la gauche du PS, à l’exception de Lutte ouvrière qui présente des candidats partout, a été magnanime. Les soutiens du leader altermondialiste ont ainsi décidé de ne présenter qu’une poignée de candidats dans la région, et surtout aucun dans les Bouches-du-Rhône. Autres consolation pour Jean-Marc Coppola, toutes les mouvances unitaires se sont ralliées derrière Frédéric Dutoit. « Il a toujours ?uvré pour le rassemblement antilibéral », justifie Camille Roux, nouvelle porte-parole du parti trotskyste et candidate à Marseille, avant de lâcher : « Et Henri Jibrayel est ce que le PS fait de pire ». La division de l’extrême-gauche conduit parfois à des situations cocasses. Si dans les Alpes-Maritimes, la LCR et la Gauche alternative 2007 ont opéré une répartition de fait (quatre pour la première, trois pour la seconde), dans le Var, la configuration relève du surréalisme ! Dans la 6ème circonscription, les Verts, la LCR et les Alternatifs font bloc derrière le candidat Bovéiste, lui-même soutenant les écolos dans la 1ère, la 3 ème et la 5 ème, et les candidats d’Olivier Besancenot dans les 2 ème, 4 ème et 7 ème. Du grand art !
Les communistes, mieux implantés localement que les trotskystes, ont toutefois du souci à se faire. Forte de la progression en nombre de voix d’Olivier Besancenot en Paca lors des présidentielles, la Ligue a décidé de passer à l’offensive et présente 30 candidats dans la région. « Nous sommes la deuxième force de la gauche, nous voulons faire le score le plus haut pour que notre double position d’anticapitalisme et d’indépendance du PS devienne hégémonique, annonce sans ménagement Camille Roux. Plus nous progresserons électoralement, plus la gauche de la gauche se portera bien. »
« Le PCF et la LCR ont des gênes en commun, ça nous aurait fait grand bien qu’ils soient modifiés ! », tempête Annick Boët. Symbole d’un parti communiste en explosion et d’une gauche en pleine recomposition, la présidente du groupe « communistes et partenaires » à la mairie de Marseille s’est engagée aux côtés de la candidate socialiste de la 6ème circonscription marseillaise, après avoir quitté le PCF pour soutenir José Bové. « Chacun à la gauche du PS cherche à tirer la couverture à lui, je ne crois plus à un rassemblement », se justifie-t-elle. Candidat « gauche alternative » dans la 3ème circonscription des Alpes-Maritimes, Bruno Della Sudda ne la contredira pas. Bien que le discours soit toujours à l’unité, notamment pour 2008, les partisans de José Bové ont décidé de poursuivre l’aventure en solo à l’issue des législatives. « Nous souhaitons réunir toutes les sensibilités qui ne veulent plus dépendre d’une organisation, nous structurer et nous installer dans la durée, explique le conseiller municipal niçois. Après, on pourra discuter avec le PCF et la LCR. »
Est-ce la fin annoncée du communisme ? Toujours aussi mesuré, Frédéric Dutoit tempère : « Il n’est pas mort, mais c’est la fin du grand parti qu’on a connu ». Si rien ne change, les municipales de l’année prochaine pourraient cependant marquer la date de son oraison funèbre. Le 6 mai, Nicolas Sarkozy est arrivé largement en tête dans les dernières mairies rouges des Bouches-du-Rhône…
Jean-François Poupelin