Municipales : Prêt ? Partez !
786. C’est le nombre de communes appelées à désigner leur maire dans les six départements de la région Provence Alpes Côte d’Azur. Même s’il est très difficile de se repérer dans le maquis des élus sans étiquettes, le rapport de force sorti des urnes en 2001 est sans équivoque : l’UMP, addition du RPR et du gros des troupes de l’ancienne UDF, peut seule s’enorgueillir d’une centaine de maires dûment estampillés… Les villes d’Avignon (84), Nice (06), Marseille (13) et Toulon (83) sont toutes dans l’escarcelle du parti fondé par Jacques Chirac et aujourd’hui voué à Nicolas Sarkozy. Les maires sont élus pour un mandat de six ans. Au motif d’un calendrier politique extrêmement chargé en 2007 – avec le tremblement politique des présidentielles puis sa petite réplique des législatives – les premiers magistrats se sont vus offrir en bonus une année supplémentaire. C’est toujours bon à prendre pour achever des grands travaux, inaugurer un tramway, ou simplement redonner un dernier coup de peinture au réfectoire d’une cantine scolaire…
Il y a sept ans – souvenez-vous, jeunes gens ! – un certain Lionel Jospin était 1er ministre et les élections municipales n’ont pas été une partie de plaisir pour la gauche plurielle alors majoritaire. En Paca, l’addition a été particulièrement sévère. Aix-en-Provence (13), Brignoles (83), La Ciotat (13), La Garde (83), La Seyne-sur-Mer (83), et Miramas (13) ont basculé à droite. La victoire du parti socialiste à Salon-de-Provence (13) et celle, plus modeste, à l’Isle-sur-la-Sorgue (84) ont été une maigre consolation. Même madame la ministre Elizabeth Guigou s’est cassée les dents en tentant de ravir Avignon (84) à Marie-Josée Roig.
Pour 2008, le PS table sur une lassitude après des années de gouvernements Raffarin, Villepin et Fillon. Et espère, en dépit de sa profonde crise d’identité, bénéficier cette fois-ci du traditionnel retour de balancier des élections dites « intermédiaires ». À l’inverse, les élus UMP comptent encore miser sur la carte Sarkozy dont l’étoile ne devrait pas encore avoir trop pâli dans une région qui a plébiscité à 62 % « Nicolas » au second tour des présidentielles.
Le parti socialiste, pourtant quasiment marginalisé dans les Alpes-Maritimes et le Var lors des législatives et des présidentielles, domine sans partage la gauche régionale. En 2001, la victoire des communistes à Arles, au détriment du PS, n’avait pas compensé sa déroute à La Ciotat (13), la Seyne-sur-Mer (83) et Miramas (13). Le PC aura le plus grand mal à prendre sa revanche en 2008. Il se réjouira, au mieux, en conservant la dizaine de communes qu’il administre toujours dans les Bouches-du-Rhône et des bastions comme Martigues (13), Arles (13), et Aubagne (13). Les Verts hésitent entre faire acte de témoignage au premier tour ou négocier d’emblée, s’ils le peuvent encore, des strapontins dans une majorité PS.
Du côté de la droite régionale, l’UMP est tout juste titillée par le Modem. À peine né, le parti centriste se divise déjà entre ses adhérents « historiques », habitués à une alliance à droite, et les petits nouveaux qui prennent à la lettre la profession de foi d’indépendance de François Bayrou sans exclure des accords tactiques avec le PS. Du côté de l’extrême droite, c’est la Bérézina. Jacques Bompard à Orange (84) et Daniel Simonpieri à Marignane (13), devraient être réélus en 2008 mais avec respectivement, le label MPF et celui divers droite. Et non plus comme en 2001 en brandissant avec fierté le drapeau du Front national ! Même le parachutage, encore hypothétique, d’un Bruno Gollnisch à Toulon, le numéro 2 du FN, fait sourire Hubert Falco, le maire UMP qui avait triomphé sans difficultés de Jean-Marie le Chevallier. Dans un paysage politique régional plus que jamais bipolaire, la campagne qui débute s’annonce pourtant tumultueuse et beaucoup moins prévisible qu’il n’y paraît. Aux logiques d’appareils et aux confrontations d’idées, se mêle, à droite comme à gauche, le choc des ambitions personnelles. Sans compter les mouvements de recomposition – et décomposition ! – exacerbés par le recentrage du parti socialiste et la stratégie de débauchage mise en ?uvre par la droite décomplexée.
A Nice (06), deux socialistes et un bataillon de prétendants à droite se disputent l’honneur de pousser dans les orties le maire sortant Jacques Peyrat. A Aix-en-Provence (13) les rivalités au sein du PS font écho aux perpétuelles dissensions au sein de la majorité UMP de Madame le maire, Maryse Joissains. A Marseille (13), l’entrée dans la bataille de Jean-Noël Guérini, qui a réussi du haut d’un Conseil général fortuné à dompter l’indisciplinée fédération socialiste des Bouches-du-Rhône, perturbe le scénario d’une réélection triomphale de Jean-Claude Gaudin. Jusqu’à quel point ? 2008 sera aussi l’année des revenants : l’ex-socialiste François Bernardini, jadis condamné pour abus de confiance et de bien sociaux, se prépare à reconquérir Istres (13). A Cannes (06), l’ex-maire UDF Michel Mouillot, tout juste sorti de prison, reprendrait goût à la politique. Les municipales sont les élections préférées des Français, après les présidentielles. Parce que les joutes oratoires et les rebondissements multiples y sont souvent spectaculaires et croquignolesques. Mais pas seulement. Elles sont aussi l’occasion de demander des comptes sur la gestion des dossiers qui façonnent le quotidien de nos villes, d’initier des débats essentiels, d’impulser des décisions novatrices. De faire de la politique en quelque sorte. Allez ! On peut rêver…
Michel Gairaud
AU SOMMAIRE
– Nice : Salade de crabes – Toulon : Gérer la crise – Hyères : Sous les palmiers, les rumeurs – Cannes : Le retour de M le maudit – Draguignan : Le classico en Dracénie – Marseille : Le tango des frères ennemis – Aix : Ratatouille aixoise – Istres : Voie royale pour le « président » – Martigues : Bienvenue en Lombardie