Marseille, conseil municipal du 16 juillet 2007

août 2007

14rv44lop_gaudin.jpg8 h 15 Journalistes et politiques se saluent et plaisantent sur le Vieux Port. Quelques uns partagent un café en terrasse. Renaud Muselier, le 1er adjoint UMP, s’invite à une table où se trouve le radical de gauche Antoine Rouzaud, son challenger malheureux aux législatives. Sourires crispés entre deux batailles électorales…

8 h 29 minutes 59 secondes Jean-Claude Gaudin fait l’appel, perché au centre du moderne hémicycle, place Bargemon, où se déroulent désormais, les conseils municipaux. Le sénateur maire ne déroge pas à sa réputation : une ponctualité maniaque et quasi-infaillible.

8 h 31 Robert Bret, conseiller municipal et sénateur PCF, réclame une intervention préliminaire sur le recours juridique des communistes contre la délégation au privé du nouveau tramway. « Ce n’est pas très correct, peste Gaudin. Vous utilisez le début de séance pour donner de la solennité à vos propos. Mais maintenant que j’ai dit ça, allez-y ! »

8 h 34 « Vous êtes bien bon, Monsieur le Maire, de leur donner la parole », déplore Jacques Rocca Serra, adjoint délégué à la régie des transports. Le leader local du Modem ne manque jamais une occasion d’affirmer sa solidarité avec Jean-Claude Gaudin, vice-président de l’UMP, contre lequel François Bayrou risque pourtant de le contraindre à présenter une liste aux municipales.

8 h 37 « Ce serait bien que dans les rangs de l’opposition, on constate le succès du tramway », attaque Renaud Muselier, bronzage déjà presque parfait en ce début d’été. « Eh, oui ! Ils en crèvent ! Ils en crèvent », surenchérit, pagnolesque, Jean-Claude Gaudin.

8 h 39 Patrick Mennucci, président du groupe socialiste, tente une prise de parole. Il est aussitôt crucifié par le maire : « Vous avez préféré prendre des vacances pour maigrir quand le président de la République était ici pour inaugurer le tramway. » Mennucci : « C’est scandaleux ! Je ne vous parle jamais de votre vie privée ! »

8 h 46 Est-ce pour conjurer le mauvais sort électoral ? Le groupe communiste, affaibli par la démission de sa présidente Annick Boët, et par la perte de son député marseillais, monopolise la parole. Frédéric Dutoit, nouveau président du groupe, dénonce longuement la libéralisation du port autonome. « Il faudrait donc pour vous que cette ville soit toujours malheureuse, la moins riche possible », rétorque Jean-Claude Gaudin. Et de vanter « ceux qui ont le courage d’installer des entreprises sur le port en bravant la CGT ».

8 h 55 Patrick Mennucci, jouant la carte d’une opposition « constructive », affirme être ouvert à des discussions sur la réforme du port. La majorité chahute. « Est-ce que je peux parler sans être interrompu ? », proteste-t-il. « C’est moi qui décide du temps de parole », tranche le maire. 8 h 59 Annick Boët, sans étiquette, mais toujours assise avec le PCF, à propos de la vente de l’Hôtel Dieu pour le transformer en hôtel de luxe, lance au maire : « C’est la période des soldes d’été mais avec vous, c’est la braderie permanente. »

9 h 06 Jean-Pierre Fouquet, conseiller municipal Vert, s’insurge contre le passage par le centre de Marseille de la future ligne à grande vitesse vers Nice. « Pourquoi choisir le scénario le plus cher et le plus compliqué ? », interroge-t-il. « Demande à Madrolle ! », se moque Gérard Chenoz, conseiller UMP. Mais Christophe Madrolle est déjà parti en vacances. Bien méritées ! Son ralliement au Modem passe mal chez ses anciens amis Verts qui ne veulent plus qu’il siège près d’eux…

9 h 12 « Je ne partage pas l’intégralité de ce qui vient d’être dit par Jean-Pierre Fouquet », lance Patrick Mennucci, toujours très « responsable ». « Vous serez sur la même liste, ce n’est donc pas très grave », ironise le maire.

9 h 35 Infatigable, dans un groupe socialiste atone, Mennucci multiplie les critiques, sur l’insuffisance de l’offre de logement social notamment. « Quoi que vous disiez, ce sera écrit demain dans le journal alors que ma réponse n’y figurera pas », râle le maire. Le journaliste de La Provence affiche un sourire crispé.

9 h 41 Bruno Mégret entre silencieusement dans la salle. L’ancien numéro 2 du Front national n’est plus que conseiller municipal d’opposition à Marseille. Et encore, le président du MNR, groupuscule d’extrême droite criblé de dettes, brille par son absentéisme.

9 h 42 Hubert Savon, le 2ème élu du MNR, fustige le projet de grande Mosquée et dit vouloir « faire respecter l’état de droit laïque ». L’extrême droite a déjà fait annuler une première délibération accordant un bail au gestionnaire du futur lieu de culte.

9 h 50 Yvon Claire, ex-MNR, rallié au MPF de Philippe de Villiers, est désormais assis aux côtés des élus UMP, séparé par deux sièges vides de Mégret et Savon. Pour le reste, comme d’habitude : il dénonce la construction «d’ une mosquée géante cinq fois plus grande que Notre Dame de la Garde ». Son temps de parole, non décompté, est offert par le maire.

9 h 55 Mennucci : « Comment peut-on laisser dire des insanités pareilles ! ». Gaudin : « Mr Claire s’exprime tellement rarement ». Mennucci : « On verra si on le retrouve sur vos listes ». Gaudin, aux élus du MNR et du MPF : « j’irai aussi dans les mosquées même si cela ne vous plaît pas ». Mennucci, faisant allusion à l’alliance de Jean-Claude Gaudin, alors président de Paca, avec le FN : « C’est une tache sur votre conscience ». Gaudin : « Sordide ! Sordide ! (…) Quand j’arriverai au paradis, on pourra me le dire… mais ça ne presse pas ! ».

10 h 01 Lucien Weygand, conseiller socialiste, ancien président du Conseil général des Bouches-du-Rhône, poursuit sa petite sieste soigneusement calé dans son siège.

10 h 10 Philippe Sanmarco prépare l’avenir. Le président de la Convention citoyenne, ancien secrétaire général de Gaston Defferre, a le profil idéal pour incarner l’ouverture à gauche, sauce Sarkozy, sur les listes Gaudin aux municipales. Il acte d’un « état d’esprit qui a changé » en mairie. Lorsqu’il dénonce « l’accumulation de malfaçons dans les logements réhabilités au centre ville » il précise aussitôt à l’égard du maire : « Vous n’êtes pas directement responsable… ». Enchanté, Jean-Claude Gaudin acquiesce : « on ne peux pas dire que notre politique consiste à chasser les pauvres et les indigents pour les remplacer par des gens qui voteraient pour nous (…) Monsieur Sanmarco a raison d’alerter notre attention… »

10 h 36 Muré dans son silence, Bruno Mégret quitte le conseil municipal.

10 h 43 Samia Ghali, pour le groupe socialiste, s’interroge sur la nouvelle carte scolaire. Marie-Louise Lota, adjointe à l’éducation, n’apprécie pas les critiques : « Seuls des gens qui ont l’esprit retors peuvent mettre en cause la réalité des investissements. »

11 h 09 Le président du groupe socialiste, candidat déclaré pour la mairie du 1er secteur détenue par Jean Roatta, auquel il a failli ravir le siège de député, lance sa campagne. Mennucci : « Préparez-vous la fermeture de l’école de la Colline ? Les habitants s’inquiètent ». Gaudin : « Surtout si vous ne leur dites pas la vérité et que vous les excitez. » Roatta à Mennucci : « Taisez-vous, il n’y a pas des caméras de télévision ! ». Mennucci : « Soyez polis ! ». Roatta (au sujet de Mennucci) : « Je vais lui faire connaître le secteur, il n’y met jamais les pieds. »

11 h 15 Mennucci : « Alors, elle ferme ou pas cette école ? Je crois qu’elle ferme. » Gaudin : « On demandera à Ségolène. »

11 h 25 Infatigable, Patrick Mennucci revient sur la session de l’Hôtel Dieu. « Marseille vend à des investisseurs l’un des fleurons de son histoire (…) Il s’agit en fait d’une subvention déguisée de 1,5 millions d’euros, versée à la compagnie Axa. »

11 h 35 Un quiproquo manque de tourner à l’affrontement physique. Patrick Mennucci lance « amicalement » au Vert Jean-Pierre Fouquet un « fada ». Mais l’UMP Gérard Chenoz se croit visé : « tu veux qu’on sorte ! »

11 h 38 Jean-Claude Gaudin, vindicatif : « Nous n’en sommes plus aux juges populaires. C’était une autre époque et cela n’existera pas. Que vous le vouliez ou non, c’est nous qui pilotons cette ville et obtenons de bons résultats. De cela, vous en crevez ! »

11 h 51 Les élus désertent la salle du conseil. Il est l’heure de conclure. Le maire : « Je vous souhaite à tous de prendre des vacances. Monsieur Mennucci n’ira pas maigrir. C’est déjà fait. »

Michel Gairaud

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