Pour faire le portrait d’un maire

février 2008

Peindre d’abord une mairie avec une porte ouverte. Peindre ensuite, quelque chose de joli, quelque chose de simple, quelque chose de beau, quelque chose d’utile : le programme de vos rêves. Pour le maire. Placer ensuite la toile contre un arbre, dans la cour d’une école, près d’un bureau de vote.

Se cacher derrière l’arbre, sans rien dire, sans bouger… Parfois le maire arrive vite, serrant les mains à la cantonade, mais il peut aussi mettre de longues années avant de se décider, de convaincre son parti de le désigner, d’échapper aux croche-pieds de ses adversaires comme de ses « amis ». Ne pas se décourager. Attendre. Attendre s’il le faut pendant des années. La vitesse ou la lenteur de l’arrivée du maire n’ayant aucun rapport avec la réussite du tableau, ni de celle de son mandat.

Quand le maire arrive, s’il arrive, observer le plus profond silence. Chasser les militants et les paparazzis. Attendre que le maire entre dans la mairie, ou le bureau de vote, et quand il est entré, fermer doucement la porte avec le pinceau puis effacer une à une, toutes les promesses de campagne qui ne seront pas tenues, les petites phrases complaisantes, les silences pour ne pas froisser l’opinion, les compromis pour ne pas s’aliéner les notables, les puissants, ceux qui détiennent le véritable pouvoir : l’argent. En ayant soin de ne pas toucher le beau costume de l’élu.

Faire ensuite le portrait de la mairie en choisissant la plus belle de ses pièces. Pour le maire. Peindre aussi le vert feuillage et la fraîcheur du vent, la poussière du soleil, et la clameur de l’opposition lors des conseils municipaux dans la chaleur de l’été. Et puis attendre que le maire se décide à chanter. Si le maire ne chante pas, c’est mauvais signe. Signe que l’élection et le tableau sont mauvais.

Mais s’il chante, c’est bon signe ! Signe que vous pouvez signer. Alors vous drapez tout doucement l’épaule du maire d’une écharpe tricolore, vous le félicitez chaleureusement pour sa victoire, et vous écrivez votre nom dans un coin du registre. A voté !

le Ravi avec Jacques Prévert

Imprimer