Champions du monde de l’intercom
Lélu : Bogosse, cette fois fait pas le zouave ; Il y a le reporter du Ravi qui vient nous poser des questions sur l’intercommunalité aujourd’hui. Tu as bien révisé ?
Bogosse : C’est bon, j’ai tout lu la fiche, je crains dégun sur le sujet ! Comme je le dis souvent : l’intercom, c’est comme l’inter de Milan, c’est une grande équipe qui gagne !
Lélu : Oui, mais enfin, le foot c’est pas…
Lélu s’interrompt en voyant entrer le célèbre, et redouté, Sam Ravi.
Sam : Monsieur Lélu, vous êtes président de l’intercommunalité, ainsi que maire de notre belle ville. Pouvez-vous nous expliquer les subtils équilibres qui s’opèrent au niveau intercommunal ?
Lélu : Eh bien, nous avons fait en sorte que chaque maire, et donc chaque commune, soit représenté en obtenant un poste de vice-président. Ca leur plait aux maires, surtout ceux des petites communes. Ils ont l’impression d’exister. Peuchère, c’est pas tous les jours drôle de diriger une petite commune qui est à côté d’une très grosse.
Sam : Quand même ! Une vice-présidence pour une commune de 3000 habitants. Ca veut dire qu’un maire de toute petite commune se retrouve avec un chauffeur et une voiture de fonction, c’est pas très sérieux.
Bogosse : Ouais, puis avant on avait des Safranes alors que maintenant on a des Peugeot, c’est cool, ça permet d’envoyer un max sur l’autoroute. (Il mime un changement de vitesse à la volée.)
Lélu : Euh, oui, Bogosse prend très à c?ur le bien-être des habitants des communes péri-urbaines et de leurs représentants… euh, notamment en termes de déplacements.
Sam : Ce n’est pas gênant de donner un poste de vice-président à des maires très proches du front national ?
Lélu : En matière de coopération intercommunale, ce n’est pas la couleur politique qui compte, c’est l’intérêt général. La politique, c’est savoir oublier les rivalités d’hier pour aller ensemble vers demain, c’est… (Il regarde vers l’horizon, tel un capitaine au long cours.)
Bogosse : Ouais, puis les voix de l’extrême droite, on en a bien besoin si on veut niquer la gauche, alors une petite présidence par-ci, une petite voiture de fonction par-là, hein, ça peut pas être mauvais, pas vrai… ? (Il regarde Lélu, qui a l’air accablé, puis s’adressant à lui.) Mais c’est toi qui me l’a dit !
Sam : La nouvelle loi concernant les listes aux élections régionales oblige à présenter autant de femmes que d’hommes. Du coup, on dit que la parité a obligé certains élus à renoncer à leurs mandats au Conseil régional et que vous les avez recasés au niveau intercommunal.
Lélu : Améliorer la représentation des femmes et plus généralement des minorités est un objectif démocratique ambitieux, qui peut effectivement poser problème au niveau local. Néanmoins…
Bogosse : Vè, c’est simple. A l’intercommunalité, on a récupéré les estrasses. On les a mis là où ça se voit pas trop. C’est pour ça que Lélu, il m’a donné plein de pouvoir à l’intercom… Comme il dit, au pays des muges, les gôbis sont rois.
Sam : On dit que les structures intercommunales ne font que voter des projets approuvés au préalable par les communes, qu’elles n’exercent pas réellement leur pouvoir. En gros, on les accuse de n’exister que pour récupérer l’argent donné par l’Etat. Est-ce vrai ?
Lélu : Ouais, c’était pas de la tarte. Au départ chacun voulait récupérer son argent. Petit à petit, on commence à mettre des choses en place. C’est vrai que notre administration n’est pas encore au tôpe…
Bogosse : Oh, fan. C’est pas compliqué, l’Etat envoie de la tune pour à condition que l’intercommunalité s’occupe des estrons et des bordilles. Alors, avé les collègues, on repeint les camions poubelle et on se partage la monnaie. Et zou ! Le tour est joué.
Lélu : Bogosse… (Il se prend la tête à deux mains.)
Propos recueillis par intercommunication grâce à Sam Ravi avec le soutien de Guillaume Hollard